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Mystère autour du sort de la fille déchue du président ouzbek

Mystère autour du sort de la fille déchue du président ouzbek

La publication de lettres au sens décousu attribuées à Goulnara Karimova, la fille aînée du président de l'Ouzbékistan, a relancé les spéculations sur le sort de celle qui était toute-puissante dans l'ex-république soviétique avant de tomber brutalement en disgrâce.

Au moins quatre lettres attribuées à Mme Karimova ont été publiées ces derniers jours par des médias ouzbek à l'étranger et par la BBC, sans qu'il soit possible de s'assurer de leur authenticité.

Écrites en russe, ces lettres regorgent d'images violentes évoquant le sang, des passages à tabac et des trahisons.

Elles semblent être avant tout un plaidoyer de Mme Karimova pour obtenir le pardon de son père Islam Karimov, 76 ans, inamovible président de l'Ouzbékistan.

M. Karimov, à la tête de cette république de 30 millions d'habitants depuis 25 ans, a manifestement perdu patience face à son ambitieuse fille depuis qu'elle a été citée dans des enquêtes pour corruption et blanchiment d'argent en Suède et en Suisse.

Si elles sont bien de sa main, ces lettres confirment que Goulnara Karimova, 41 ans, a été placée en résidence surveillée à Tachkent depuis février avec sa fille Iman, 15 ans.

"Le cri perçant que tu entends est comme du verre sur le métal, lorsque le plus solide des métaux se brise en invisibles particules de douleur, le verre laisse des gouttes de sang sur l'entaille et elles deviennent un ruisseau", écrit-elle dans une lettre publiée par le site d'informations ouzbek basé à l'étranger Uznews.net, dans un style décousu et parfois incohérent.

Dans une autre lettre, reçue et publiée par Radio Ozodlik, le service ouzbek de la radio américaine Radio Liberty, Mme Karimova dit être retenue en "otage" dans sa maison du quartier de Bodomzor, à Tachkent, et avoir besoin d'être opérée d'urgence.

"Il devient difficile de contenir le saignement. J'ai perdu tout espoir et je demande à tous ceux qui soutiennent mon appel de transmettre ce message au président Karimov", écrit-elle.

S'adressant directement à son père, elle lui demande: "Je fais appel à votre raison et il y a de l'espoir que vous m'écoutiez et que vous me laissiez sortir, ainsi que mon enfant".

Evoquer le sort de Mme Karimova en public est interdit en Ouzbékistan, dirigé par une main de fer par le président Karimov.

Le sort actuel de Goulnara contraste singulièrement avec sa situation il y a encore un an, quand elle était le visage à l'étranger de l'Ouzbékistan. Elle avait notamment été ambassadrice en Espagne et aux Nations unies à Genève. Surtout, elle était vue par certains comme l'éventuel successeur de son père.

Jouant la carte de la modernité, adepte de Twitter, elle avait créé une ligne de parfum et poursuivait une carrière de pop-star, sous le nom de scène de Googoosha, enregistrant même une chanson avec l'acteur français Gérard Depardieu.

Sa déchéance brutale est devenue évidente lorsque fin 2013, les boutiques de mode et de musique qu'elle possédait avec son compagnon, le chanteur de pop Roustam Madoumarov, ont été perquisitionnées et fermées.

Les chaînes de télévision dont elle était propriétaire ont aussi été fermées, ainsi que son compte Twitter, où elle a raconté sa chute sans détour.

Le 17 février, des responsables de la sécurité ont perquisitionné sa maison, arrêté plusieurs de ses associés, dont M. Madoumarov, et placé Mme Karimova en résidence surveillée, selon des médias ouzbeks.

Dans ses lettres, elle accuse des responsables des services secrets proches de son père, dont Roustam Inoïatov, dirigeant du redouté Service de la sécurité nationale, d'avoir causé sa chute.

Elle s'en prend aussi à sa mère, Tatiana Karimova, l'accusant d'avoir monté son père contre elle, et n'épargne pas non plus sa soeur Lola Karimova-Tillaïeva, représentante permanente de l'Ouzbékistan à l'Unesco à Paris, avec laquelle elle entretient des relations tendues.

"La réponse aux interrogations sur les relations entre (le président) Karimov et Goulnara ne se trouve pas dans le domaine de la politique mais dans celui de la psychologie", estime Konstantin Kalatchov, à la tête du Groupe d'expertise politique basé à Moscou.

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