Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

L'Allemagne fait un grand pas vers son salaire minimum

L'Allemagne fait un grand pas vers son salaire minimum

L'Allemagne a franchi mercredi un grand pas vers l'instauration d'un salaire minimum pour tous, avec l'adoption en conseil des ministres de ce projet clé du nouveau gouvernement d'Angela Merkel.

"La voie est libre" pour le salaire minimum, a annoncé la ministre de l'Emploi Andrea Nahles lors d'une conférence de presse, à l'issue du conseil des ministres.

"Le travail ne sera plus bradé (...), nous lui rendons sa valeur", a-t-elle dit, qualifiant la loi approuvée de "législation sur le travail la plus complexe et la plus réussie depuis des décennies" et de "tournant" dans les relations sociales du pays.

Le niveau du salaire plancher a été fixé à 8,50 euros bruts de l'heure. Il entrera en vigueur au 1er janvier 2015. Après une période de transition pour les secteurs qui seront encore sous le coup d'un accord de branche, il concernera au plus tard en 2017 tout le monde, sauf les moins de 18 ans, les stagiaires et les chômeurs de longue durée pendant les six mois suivant leur embauche.

A 8,50 euros, le salaire minimum allemand est "dans la moyenne" de ses équivalents ailleurs, a dit Mme Nahles. Il est inférieur au Smic français (9,53 euros de l'heure) mais un peu plus élevé que ses équivalents britannique (6,31 livres, soit environ 7,60 euros) et américain.

L'instauration d'un Smic à l'allemande s'apparente à une révolution dans un pays qui historiquement laisse les partenaires sociaux négocier les salaires entre eux.

Face à l'essor ces dernières années d'un secteur de bas salaires et d'une frange de "travailleurs pauvres", la mesure rencontre un soutien large parmi les Allemands. Plus de 80% d'entre eux y étaient favorables selon un sondage effectué l'an dernier. Selon un autre sondage récent, 56% pensent même qu'elle va renforcer l'économie allemande contre 40% qui pensent le contraire.

Les partenaires de l'Allemagne, France en tête, espèrent que le salaire minimum va remédier à des situations de dumping dans certains secteurs, notamment l'agro-alimentaire, et stimuler la consommation dans la première économie européenne.

Mme Merkel et son parti conservateur y ont consenti à contre-coeur, et uniquement pour s'assurer la participation des sociaux-démocrates au gouvernement. Une partie de la droite et les milieux économiques ont milité ces derniers mois pour une multitude d'exceptions, à commencer par tout l'Est du pays.

Au final Mme Nahles a fait la sourde oreille à la plupart des revendications et opté pour un champ d'application très large, et un plancher valable sur tout le territoire. Selon une estimation de l'institut de recherche économique DIW, 4,5 millions de salariés allemands gagneront moins de 8,50 euros de l'heure juste avant l'entrée en vigueur du salaire minimum.

Ses opposants ont rivalisé de projections alarmistes, évoquant des centaines de milliers d'emplois détruits.

Mais pour Mme Nahles l'effet sur le marché du travail sera neutre. "Je m'appuie sur les expériences dans les secteurs qui en avaient déjà un, et de l'étranger".

Effectivement globalement "le salaire minimum n'est aucunement une catastrophe pour l'économie", a admis mardi le président de la fédération patronale BDA, Ingo Kramer, la plupart des entreprises payant déjà ce montant.

Au cas par cas toutefois, "pour certains salariés, il sera décisif pour savoir s'ils conservent ou pas leur emploi", argue-t-il. Le sort des chômeurs ou débutants peu qualifiés l'inquiète tout particulièrement.

Mais c'est surtout "l'ingérence" de la politique dans les négociations salariales qui passe mal, a reconnu le patron des patrons.

Même chose d'ailleurs du côté des syndicats. Au nom de la justice sociale, ils soutiennent l'idée du salaire minimum mais seulement "comme solution de fortune pour des secteurs où les partenaires sociaux sont faibles, pas plus", expliquait récemment Detlef Wetzel, président d'IG Metall.

La confédération syndicale DGB critique en outre les exceptions et une période de transition jugée trop longue.

La loi doit encore être approuvée, selon toute vraisemblance début juillet, par les députés du Bundestag, chambre basse du parlement, puis par la chambre haute Bundesrat à l'automne. Dans les deux cas cela ne devrait poser aucun problème.

mtr/oaa/fw

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.