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A Washington, la lassitude de la guerre en Afghanistan menace son financement

A Washington, la lassitude de la guerre en Afghanistan menace son financement

Les Etats-Unis comptent toujours maintenir un contingent militaire en Afghanistan après 2014, mais la lassitude qui a gagné Washington risque de remettre en cause à plus ou moins long terme le financement d'un pays vivant sous perfusion.

Après 13 ans de guerre, des centaines de milliards de dollars engloutis, des milliers de vies brisées et une menace talibane persistante, l'opinion et une partie des élus ne croient plus à une issue positive, concèdent des experts.

Certes, en dépit des rebuffades du président Hamid Karzaï, Washington compte toujours voir l'accord bilatéral de sécurité (BSA) signé par son successeur afin de maintenir environ 10.000 hommes jusqu'à la fin 2016 en Afghanistan pour entraîner les forces afghanes et continuer la "mission antiterroriste" contre ce qu'il reste d'al-Qaïda.

Les principaux candidats à la présidentielle, dont le premier tour a lieu samedi, sont "tous des personnes avec qui nous pouvons travailler, avec qui les relations seront bien meilleures qu'avec le président Karzaï", observe Ronald Neumann, ancien ambassadeur américain en Afghanistan. Tous sont favorables au BSA.

Mais le maintien d'une présence américaine dépendra avant tout des conditions dans lesquelles l'élection se déroule et de la légitimité du nouveau pouvoir aux yeux de la population, estiment les experts.

"S'il y a une fraude effrénée, un échec à négocier un résultat représentatif, on risque de voir s'effondrer le soutien politique aux Etats-Unis et dans les autres pays pour continuer à fournir une assistance à l'Afghanistan. Cela mettrait le gouvernement afghan dans une situation de crise, il lutterait alors pour sa survie", pronostique l'ex-numéro trois du Pentagone Michèle Flournoy.

Or "le Congrès fait très attention à la légitimité et à la crédibilité du gouvernement" issu des urnes, selon elle.

Et c'est lui qui détient les cordons de la bourse. Il a déjà commencé à gronder en février en divisant par deux en 2014 l'aide américaine au développement pour l'Afghanistan , à 1,12 milliard de dollars.

Le seul financement des 352.000 hommes des forces afghanes en 2013 a coûté 6,5 milliards de dollars, dont 5,7 milliards pris en charge par Washington, "deux fois le revenu de l'Etat afghan", note Stephen Biddle, du Council on Foreign Relations, un groupe de réflexion de Washington.

A partir de 2015, une fois la mission de combat de l'Otan achevée, les forces afghanes coûteront encore 5 milliards, dont environ 3,2 milliards à la charge de Washington et 1,3 milliard à la communauté internationale.

Actuellement sur le terrain, "aucun camp ne peut l'emporter", selon lui. La situation militaire est dans l'impasse.

"Le seul moyen pour l'armée afghane de maintenir le statu quo est que des étrangers paient les factures et l'acteur central à ce titre est le Congrès américain", explique M. Biddle.

"Après 2014, la guerre va devenir un concours d'endurance entre le Congrès et les talibans. A moins de penser que le Congrès américain est plus patient que les talibans, tôt ou tard s'il n'y pas de règlement négocié à cette guerre, l'armée afghane cessera d'être financée, elle se fragmentera et la guerre sera perdue", craint-il.

L'assèchement du financement risque de s'accélérer fortement si le BSA tarde trop.

"Nous nous préparons pour un retrait complet au cas où nous n'aurions pas le BSA. Mais c'est une issue dont personne ne veut", confie le porte-parole du Pentagone, le contre-amiral John Kirby. A ce stade, le président Barack Obama n'a pris aucune décision sur l'avenir d'une présence américaine en Afghanistan ou son ampleur.

"Le risque d'un retrait en bon ordre commence à être élevé à partir de septembre", a avancé le mois dernier devant le Sénat le général Joe Dunford, commandant des troupes américaines en Afghanistan.

Signe du désintéressement qui gagne l'opinion et certains élus, lors de cette audition, le faucon républicain Lindsay Graham s'était ému que la salle soit "quasi-vide".

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