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Pour Ankara, le blocage de Twitter vise à éviter la "diffamation systématique"

Pour Ankara, le blocage de Twitter vise à éviter la "diffamation systématique"

Le gouvernement turc a justifié samedi le blocage de Twitter, largement contourné par des internautes en colère, en déclarant qu'il s'agissait d'une "mesure préventive" contre une entreprise de "diffamation", à la suite d'une série de fuites dans un scandale de corruption impliquant le Premier ministre.

"Twitter a été utilisé comme un outil de diffamation systématique en faisant circuler des enregistrements acquis illégalement, des écoutes téléphoniques truquées", ont indiqué à l'AFP dans un communiqué en langue anglaise, les bureaux du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.

"Le gouvernement turc est contre la libre circulation de ces enregistrements (...) sur Twitter et d'autres sites et réseaux sociaux qui visent à entraver la Sécurité de l'Etat et à salir la réputation des citoyens. Il n'est pas contre Internet".

L'autorité turque des télécommunications a interdit jeudi soir l'accès à Twitter, après que M. Erdogan, impliqué dans un scandale de corruption, eut annoncé sa décision d'éradiquer le site de microblogging.

M. Erdogan a également menacé de s'en prendre à YouTube et Facebook après la tenue le 30 mars d'élections municipales, aux allures de référendum pour ou contre le chef du gouvernement, au pouvoir depuis 2003.

"Il est de notre devoir de prendre les mesures nécessaires contre les éléments qui menacent notre sécurité nationale", a-t-il déclaré samedi devant une foule de partisans lors d'un meeting de campagne à Ankara.

Le gouvernement a indiqué avoir décidé ce blocage après que le réseau social basé aux Etats-Unis eut refusé de se conformer à des "centaines de décisions de justice" depuis janvier dernier, sur le retrait des enregistrements de conversations téléphoniques piratées.

"L'indifférence de Twitter et son attitude biaisée et partiale sont difficiles à comprendre; nous pensons que cette attitude lui porte préjudice et donne une impression inexacte et injuste de notre pays", poursuit le communiqué.

La décision d'Ankara, qui a suscité une avalanche de critiques au plan national et international, a été très largement perçue comme une tentative du gouvernement de faire taire les accusations de corruption mettant en cause le Premier ministre et son proche entourage.

Les accusations les plus compromettantes proviennent de deux comptes Twitter, baptisés Haramzadeler ("Fils de voleurs") et Bascalan ("le premier des voleurs", un pseudonyme utilisé pour ridiculiser le Premier ministre), ayant accès à une quantité considérable de documents secrets et d'écoutes policières liées à l'enquête.

Les enregistrements dévoilent notamment une conversation présumée d'Erdogan avec son fils, où il est question de dissimuler d'importantes sommes d'argent, ainsi que de pressions exercées par le Premier ministre sur la justice ou la presse et d'ingérences dans des ventes immobilières.

Erdogan a a catégoriquement rejeté ces accusations de corruption, qu'il a attribuées à ses rivaux politiques.

Le département d'Etat américain a dénoncé vendredi le blocage de Twitter, jugeant qu'une telle décision était "contraire au désir exprimée par la Turquie elle-même d'être un modèle de démocratie".

"Cet homme nous a dénigrés aux yeux du monde", a déclaré samedi Kemal Kilicdaroglu, chef du principal parti d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP), lors d'un meeeting de campagne à Izmir (ouest), alors que la foule scandait "Gouvernement démission".

Loin de brider l'utilisation de Twitter, l'interdiction a provoqué une explosion du nombre de tweets, qui ont augmenté de 138%, selon une étude réalisée par la société d'analyse des des médias sociaux Brandwatch.

Furieux, les Turcs ont eu recours aux réseaux privés virtuels (VPN) et changé de système de noms de domaines (DNS) pour contourner les restrictions.

Twitter a aussi rappelé aux utlisateurs qu'ils pouvaient accéder à sa plateforme à travers le système de messagerie SMS.

"Je suis heureux d'être sur Twitter... Je suis devenu utilisateur de Twitter à l'âge de 83 ans pour contourner l'interdiction", écrit l'usager @NejlaKoker.

Selon des informations non confirmées, le gouvernement tente à présent de bloquer l'accès aux listes de DNS alternatifs.

"La guerre du gouvernement contre Twitter se poursuit avec le blocage de l'accès aux adresses des serveurs DNS de Google depuis la Turquie", postait sur le site de microblogging Yaman Akdeniz, professeur en droit d'internet à l'université Bilgi d'Istanbul.

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