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"Engagez-vous !", rengaine d'un officier russe devant une caserne ukrainienne

"Engagez-vous !", rengaine d'un officier russe devant une caserne ukrainienne

Il a l'oeil rieur, le sourire bienveillant et la voix douce : le général Igor Kojine, chef de l'aviation navale russe, a passé quelques heures samedi à recruter des soldats ukrainiens devant la base de Novofedorivka.

Son uniforme noir est impeccable et tapissé de décorations. Il en impose face aux jeunes soldats ukrainiens qui l'entourent et qui ont à peine quelques minutes pour décider de leur destin.

Dans une heure, l'armée russe prendra possession de cette grande base aérienne ukrainienne, située dans l'ouest de la Crimée. Il leur faudra choisir entre leur armée d'origine et celle du futur occupant des lieux.

"Je ne vois aucun traitre ici", lance-t-il aux nouvelles recrues.

Un homme en tenue de camouflage et chapka militaire brune s'interroge : "Est-ce que l'armée russe a vraiment besoin de nous ?"

L'officier lui répond avec conviction : "Moi, personnellement, j'ai besoin de gens qualifiés".

Un autre demande s'il existe une limite d'âge pour servir Moscou. "Ce n'est pas un problème. Vous pourrez faire votre service jusqu'à 60 ans si vous êtes en bonne santé", lui assure l'officier Kojine.

La discussion, sous un tilleul de Crimée dont les branches voilent à peine les rayons du soleil printanier, est informelle et tranquille. Mais les inquiétudes des soldats ukrainiens sont réelles.

La plupart craignent de ne pas pouvoir retourner en Ukraine s'ils prêtent allégeance à l'armée russe. Les familles à leurs côtés semblent encore plus préoccupées.

"Côté russe, vous aurez tous les droits et vous serez tranquille", leur assure-t-il. "Mais pour le reste, tout dépend de l'Ukraine. Je ne pense pas que l'Ukraine sera arrangeante avec vous. Vous savez bien qui a le pouvoir aujourd'hui..."

Il poursuit: "Je sais qu'il y a beaucoup de gens bien à Maïdan. Mais le résultat de tout cela n'a pas été utilisé par de bonnes personnes".

"A Kiev, il y a des gens qui lèvent le bras", ajoute-t-il, en référence au salut nazi, tout en fixant les soldats avec ses yeux bleus perçants.

Les questions reprennent. Les nouveaux passeports russes ? "Ils seront fait pour vous, dans la base. Ce sera très rapide." Comment rejoindre l'armée russe ? "Vous avez juste à remplir une demande."

Un jeune homme sous contrat avec l'armée ukrainienne car l'Etat lui a payé ses études craint de devoir rembourser s'il rejoint la Russie. "Ce contrat, nous ne le reconnaissons pas", glisse le général, sous-entendant qu'il n'aura rien à débourser.

Il résume: "De votre côté, vous devez faire un choix. Du nôtre, nous ferons tout rapidement et automatiquement."

"Vous n'êtes pas des traitres", leur répète-t-il, en se tenant les mains.

"Devons nous venir demain ?", demande un jeune homme inquiet.

"Si vous voulez servir l'armée russe, oui."

zap/neo/gg

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