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Sarkozy : Hollande juge la comparaison avec la Stasi insupportable

Sarkozy : Hollande juge la comparaison avec la Stasi insupportable

Comparer la justice française à celle d'une dictature est « insupportable », a déclaré jeudi soir François Hollande en réponse aux propos de Nicolas Sarkozy qui a assimilé les écoutes judiciaires, dont il est l'objet, aux méthodes de la Stasi, la police politique de l'ex-RDA.

« Notre pays est un pays démocratique, un pays qui est fier d'être reconnu comme celui des droits de l'Homme où la justice, en tout cas j'y veille depuis que je suis président de la République, peut agir en toute indépendance », a répliqué le chef de l'État lors d'une conférence de presse organisée au soir de la première journée du Conseil européen à Bruxelles.

Quelques heures plus tôt, son prédécesseur avait rompu le silence qu'il s'était imposé depuis la publication d'extraits des écoutes judiciaires réalisées sur ses téléphones.

Dans une tribune à paraître dans Le Figaro ce vendredi, à deux jours du premier tour des élections municipales, Nicolas Sarkozy dénonce une « violence inédite » et une « absence de scrupules sans précédent » de la part de l'exécutif.

« Aujourd'hui encore, toute personne qui me téléphone doit savoir qu'elle sera écoutée. Vous lisez bien. Ce n'est pas un extrait du merveilleux film La Vie des autres sur l'Allemagne de l'Est et les activités de la Stasi. Il ne s'agit pas des agissements de tel dictateur dans le monde à l'endroit de ses opposants. Il s'agit de la France », écrit-il.

Le site d'informations Mediapart a révélé mardi la teneur des écoutes effectuées sur la ligne téléphonique ouverte de Nicolas Sarkozy sous une fausse identité et qui ont poussé la justice à ouvrir une information judiciaire pour « trafic d'influence » afin de déterminer s'il a tenté de peser sur le cours de la justice.

L'avocat de l'ex-président, Thierry Herzog, a annoncé jeudi qu'il déposerait une plainte pour violation du secret de l'instruction, dénoncé la publication d'écoutes « tronquées » et appelé le procureur national financier à rendre publics les éléments de la procédure prouvant ses dires.

Pour Nicolas Sarkozy, la mise sous écoute de ses téléphones ordonnée par des juges - alors que le parquet s'est posé la question dans un rapport sur leur légalité - revient à « fouler aux pieds les principes sacrés de la République ».

Hollande se dit le garant des institutions

François Hollande, que certains membres de l'opposition soupçonnent de faire travailler un « cabinet noir » pour empêcher le retour de son ancien rival, a assuré que le gouvernement n'était pour rien dans les déboires judiciaires de Nicolas Sarkozy.

« Il n'y a plus d'interventions dans les affaires individuelles », a-t-il dit, se posant comme le garant des institutions et ajoutant que son devoir était « d'assurer l'indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs, l'exercice des droits de la défense, la présomption d'innocence ».

« Je l'assurerai, ce devoir, chaque fois que la justice sera mise en cause, car vouloir atteindre ces principes-là, c'est altérer la confiance que les citoyens doivent avoir à l'égard de la justice », a-t-il encore dit.

Dans ce texte, également mis en ligne sur son compte Facebook, l'ex-président ironise aussi sur les dénégations de Christiane Taubira et Manuel Valls, qui affirment ne pas avoir été informés - ou tardivement - de sa mise sous écoute.

« Je sais, la ministre de la Justice n'était pas au courant, malgré tous les rapports qu'elle a demandés et reçus. Le ministre de l'Intérieur n'était pas au courant, malgré les dizaines de policiers affectés à ma seule situation. De qui se moque-t-on? On pourrait en rire s'il ne s'agissait de principes républicains si fondamentaux », écrit-il.

« Il s'agit de la France »

« Qui aurait pu imaginer que, dans la France de 2014, le droit au respect de la vie privée serait bafoué par des écoutes téléphoniques? Le droit au secret des conversations entre un avocat et son client volontairement ignorés? », écrit-il encore.

« Les juges entendent les discussions que j'ai avec les responsables politiques français et étrangers. Les conversations avec mon avocat ont été enregistrées sans la moindre gêne », ajoute-t-il.

Les écoutes judiciaires, a répondu François Hollande, sont « décidées par des juges indépendants, sans que l'exécutif, que ce soit le garde des Sceaux et encore moins le ministre de l'Intérieur, n'ait à intervenir ».

Pour Nicolas Sarkozy, qui se demande si ces écoutes n'ont pas pu aller jusqu'à l'Élysée, « l'ensemble fait l'objet de retranscriptions écrites dont on imagine aisément qui sont les destinataires! ».

Ayrault dénonce la comparaison avec l'ex-RDA

Nicolas Sarkozy, qui dit avoir subi quatre perquisitions ayant mobilisé 3 juges et 14 policiers, se dit totalement innocent dans tous les dossiers judiciaires le visant, dénonçant la « prétendue affaire Karachi » ou le supposé financement de sa campagne de 2007 par Mouammar Kadhafi.

Se défendant de faire un plaidoyer pro domo, il affirme que son texte est « un appel à la conscience, aux convictions, aux principes de tous ceux qui croient en la République ».

Visant François Hollande, qui avait dit vouloir être un président « normal », il conclut : « Tous ceux qui auraient à redouter mon retour, qu'ils soient assurés que la meilleure façon de l'éviter serait que je puisse vivre ma vie simplement, tranquillement. Au fond, comme un citoyen "normal"! »

Jean-Marc Ayrault a publié un communiqué pour estimer que Nicolas Sarkozy avait commis une « grave faute morale » en mettant en cause « l'honneur de la police et de la justice ».

« Dans un État de droit, les juges sont indépendants, et la police agit dans le cadre des lois. Le gouvernement y veille scrupuleusement. La comparaison entre la République française et l'Allemagne de l'Est est insupportable », a-t-il écrit.

Mais le camp de Nicolas Sarkozy estime qu'il a le droit de se défendre comme tous les Français.

« Les Français, grâce au travail de juges indépendants, prendront bientôt la mesure du complot médiaticopolitique qui s'est abattu sur l'ancien chef de l'État, au mépris de toutes les valeurs qui fondent une démocratie », a déclaré le député UMP Georges Fenech sur iTélé.

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