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Le Parlement turc se déchire sur le sort de quatre ex-ministres accusés de corruption

Le Parlement turc se déchire sur le sort de quatre ex-ministres accusés de corruption

La session extraordinaire mercredi du Parlement turc pour examiner la levée de l'immunité de quatre ex-ministres accusés de corruption a tourné à l'affrontement entre députés quant à l'opportunité de publier les charges pesant sur eux et s'est achevée sans décision.

A dix jours des élections municipales, le camp du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a utilisé toutes les armes à sa disposition pour éviter la lecture en séance publique de l'acte d'accusation rédigé par le bureau du procureur d'Istanbul. Les détails ont pourtant été étalés dans la presse et sur les réseaux sociaux.

Juste avant l'ouverture des débats, le Parti de la justice et du développement (AKP) a proposé la mise en place, après le scrutin du 30 mars, d'une commission d'enquête parlementaire sur les affaires de corruption qui empoisonnent le pouvoir depuis la mi-décembre, a-t-on appris de source parlementaire.

Sitôt la séance ouverte, le vice-président de l'Assemblée, Sadik Yakut, membre du parti majoritaire, a annoncé sa décision de ne pas lire à la tribune l'acte d'accusation des anciens membres du gouvernement, au nom du "secret de l'instruction".

Les élus de l'opposition ont immédiatement dénoncé cette décision en frappant sur leurs pupitres et le député du Parti républicain du peuple (CHP) Akif Hamzacebi a dénoncé une "tache sur la démocratie en Turquie".

Dans un climat très tendu, son collègue du Parti de l'action nationaliste (MHP) Faruk Bal a accusé le pouvoir de "faire en sorte que les enquêtes qui le visent ne soient plus l'affaire de la justice".

Le ministre de la Justice Bekir Bozdag a réfuté tous leurs arguments. "Le Parlement ne peut outrepasser les lois", a-t-il martelé, "Personne n'a le droit de violer la justice, surtout pas les députés".

Réclamée par l'opposition, cette séance extraordinaire qui a fait revenir les députés de vacances décrétées pour la campagne électorale, a été symbolique car l'AKP, dont sont membres les ministres visés, dispose d'une large majorité parlementaire.

Les députés de la majorité ont refusé de passer lors d'un vote à un examen approfondi des cas des élus incriminés et la séance a été levée jusqu'à avril sur un constat de désaccord global. "La corruption et les pots-de-vins sont partout", ont alors scandé des députés de l'opposition dans l'hémicycle.

Près de 900 demandes de levée d'immunité attendent au Parlement depuis des années, sans être votées.

Trois de ces ex-ministres, ceux de l'Intérieur Muammer Güler, de l'Economie Zafer Caglayan et de l'Environnement Erdogan Bayraktar, ont été contraints de démissionner en décembre, quelques jours après l'inculpation de leurs fils dans le cadre d'une vaste enquête de corruption visant des dizaines de proches du régime.

Un quatrième, celui des Affaires européennes, Egemen Bagis, avait été remercié à la faveur d'un important remaniement précipité par la démission de ses trois collègues.

Tous sont accusés, selon la presse, d'avoir touché des pots-de-vins se comptant en dizaines de millions de dollars en échange de faveurs octroyées à des d'hommes d'affaires, notamment à des chefs d'entreprise.

Les quatre élus n'étaient pas présents à la session, pas plus que le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, en pleine campagne électorale.

Placés en détention provisoire, les fils de MM. Güler et Caglayan ont été remis en liberté en février avec tous les autres suspects incarcérés dans le cadre de cette affaire, après le remplacement, dénoncé par l'opposition, du procureur chargé du dossier.

Outre ses anciens ministres et des dizaines de proches, M. Erdogan est lui-même personnellement mis en cause dans ce scandale, qu'il attribue à un "complot" ourdi par ses ex-alliés de la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen pour le faire tomber avant les municipales du 30 mars et la présidentielle d'août.

BA/gg

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