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Aux côtés des cosaques en Crimée, une poignée de combattants serbes

Aux côtés des cosaques en Crimée, une poignée de combattants serbes

Ils portent les cheveux longs, barbes hirsutes et bonnets de fourrure à longs pompons, tête de mort sur l'épaule. Ces guerriers venus de Serbie inspectent les coffres des voitures près de Sébastopol, en Crimée, avec le sentiment d'avoir volé au secours de leurs frères russes.

Ces "tchetniks", qui se disent héritiers des résistants nationalistes anti-allemands pendant la Seconde Guerre mondiale, ne sont qu'une poignée en Crimée, à deux jours du référendum qui va décider du rattachement de la péninsule à la Russie, mais leur présence est symbolique et ne passe pas inaperçue.

Entre deux interviews pour les caméras du monde entier, leur chef, Bratislav Zivkovic, fier de se présenter à 39 ans comme "chef d'un groupe de combattants tchetniks" assure que "les cosaques de Russie et de Crimée" ont toujours été leurs frères d'armes. "Les peuples russe et serbe sont frères. Ils nous ont aidé, sont venus combattre à nos côtés quand nous avions besoin d'aide. A notre tour", explique-t-il.

Quelques dizaines de combattants, parfois mercenaires, venus de l'ex-URSS étaient en effet présents, pas toujours en première ligne, aux côtés des forces serbes lors des guerres dans l'ex-Yougoslavie au milieu des années 90.

Près du village de Pyroguivka, à une trentaine de kilomètres au nord de Sébastopol, Bratislav et ses cinq camarades ont monté leur tente près d'un barrage et filtrent voitures et camions à la recherche d'armes ou de "provocateurs nazis". Les drapeaux de la Russie, de la Flotte de la mer Noire et les trois couleurs des Cosaques du Don ont été fixés sur un camion militaire. Sous la reproduction d'une icône orthodoxe des lettres rouges clament "Défense de Sébastopol".

Avec son bâton lumineux noir et blanc, Bratislav fait signe à un camion de s'arrêter. Un cosaque et un Serbe font ouvrir la remorque. Elle est vide, il repart. Le Serbe porte sur son treillis les quatre lettres S en cyrillique, abréviation de la devise "Seule l'unité sauvera les Serbes".

"Nous avons pris un vol de Belgrade à Moscou, puis de Moscou à Simféropol à la fin février", raconte Bratislav. "Nos frères cosaques nous ont appelé, nous sommes venus. C'est une bonne occasion d'être ensemble, c'est bon pour leur moral".

Il montre le couteau à sa ceinture. "Nous n'avons pas d'armes, nous sommes ici en mission pacifique. Mais si bien sûr on nous attaque, nous ne répondrons pas avec des pierres", dit-il.

"Et s'il faut recevoir du renfort de Serbie, cela ne posera pas de problème", assure-t-il, estimant néanmoins que "tout va rester pacifique" et que ses combattants rentreront en Serbie la semaine prochaine.

Sur le barrage, seul un des hommes portant cagoule porte un fusil à pompe. Une kalachnikov est posée contre un mur, des postes de tir derrière des sacs de sable ont été creusés mais personne ne s'y poste. L'ambiance est détendue, les automobilistes s'exécutent de bonne grâce.

Nemanja Popovic, 24 ans, porte le même uniforme, sur l'épaule le même écusson que Bratislav. Il déplie fièrement un drapeau noir, tête de mort, tibias croisés, loup hurlant à la lune, pour qu'un volontaire russe de Crimée se fasse prendre en photo à ses côtés. Les deux hommes s'embrassent, se tapent dans le dos. Derrière eux un vieux blindé à chenilles porte l'inscription en cyrillique "Division Barracuda".

"Je suis originaire de Pristina", la capitale du Kosovo désormais indépendant, "mais là je vis à Nis", en Serbie, dit-il. "Je suis au chômage. Nous sommes là pour nous assurer que les fascistes du Nord ne vont pas venir troubler le référendum sur le retour en Russie de la Crimée, qui a toujours été une terre russe", martèle-t-il. "Nous en avons l'expérience en Serbie: la guerre n'a jamais apporté rien de bon à personne".

Sur le muret de béton préfabriqué placé sur la chaussée pour former une chicane, une main a tracé à la bombe de peinture un vers du héros militaire russe canonisé par l'Eglise orthodoxe Alexandre Nevski: "Celui qui vient vers nous avec une épée..."

Pas besoin d'écrire la suite, tout le monde la connait: "Périra par l'épée".

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