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Sinistrée, l'économie serbe place ses espoirs dans les élections et les réformes

Sinistrée, l'économie serbe place ses espoirs dans les élections et les réformes

La ville de Loznica agonise depuis que le complexe chimique Viskoza est en faillite et place ses espoirs dans les promesses de redressement que multiplient les politiques à la veille des législatives anticipées du 16 mars en Serbie.

"On a fermé mon usine, confisqué mes outils, accroché un fusil à mon épaule pour m'envoyer faire la guerre", raconte d'une voix posée Milovan Djuricic, 60 ans, ancien ouvrier à Viskoza, en faisant référence à la série de guerres sanglantes qui ont accompagné le démantèlement de l'ex-Yougoslavie au début des années 1990.

"Quand je suis revenu il ne restait plus rien", dit cet homme aux cheveux et à la barbe grisonnants, portant une vieille veste militaire américaine.

Loznica, une ville d'environ 30.000 habitants à l'extrême ouest de la Serbie, avait fleuri autour de son usine qui produisait de la viscose et de la cellophane. Aujourd'hui le chômage touche plus de 40% de la population active de la ville, un des niveaux les plus élevés en Serbie.

L'économie sinistrée de ce pays de 7,1 millions d'habitants est, en conséquence, au centre de la campagne électorale.

Qu'ils soient au pouvoir ou dans l'opposition, les partis s'attèlent à convaincre qu'ils redresseront la situation de la Serbie dont le déficit budgétaire est supérieur à 7% du PIB et la dette dépasse les 60% du PIB.

Le taux de chômage a atteint 20,1% et le salaire mensuel moyen tounre autour de 400 euros.

Le parti conservateur pro-européen du puissant vice-Premier ministre Aleksandar Vucic qui domine la coalition au pouvoir compte mettre à profit le soutien dont il jouit au sein de l'électorat notamment après le début récent des négociations d'adhésion à l'Union européenne afin de mettre en oeuvre des réformes structurelles impopulaires.

L'usine Viskoza n'est qu'une des 179 compagnies qui attendent une solution.

Au plus fort de ses activités elle employait 11.000 ouvriers et traitait 1.400 m3 de bois par jour. Illustration de sa puissance, Viskoza avait son propre terminus d'autocars qui transportaient les ouvriers et sa propre centrale thermique, dont les excédents d'énergie servaient à alimenter le système de chauffage central de la ville.

De nos jours, le géant est un paysage apocalyptique, une suite de halles gigantesques, désertes où trainent ça et là quelques boites en carton remplies de bobines de fils de soie artificielle qui n'ont jamais atteint leurs acheteurs, reliées par des allées vides au béton craquelé où poussent des herbes folles.

Les toits de certains bâtiments se sont effondrés les remplissant de gravats. Tout ce qui aurait pu être revendu - tuyaux, carrelage, robinets -, a été volé au fil des années.

"Jadis, ces allées étaient remplies d'une marée humaine qui se rendait au travail. Aujourd'hui on a le sentiment qu'une bombe atomique y a été lancée", soupire Ivanko Jankovic, un ancien employé.

"Nous avons tout essayé pour attirer un investisseur privé mais en vain. En 2005 tout s'est arrêté. L'usine a été mise en faillite et est depuis gérée par l'Agence nationale pour la privatisation", raconte cet homme énergique.

"Il faut donner une chance à ceux qui vont gagner les élections de redresser la situation, mais honnêtement je n'y crois pas", déclare Radosav Marjanovic, employé de la centrale thermique, l'unique unité de Viskoza qui a survécu après avoir été privatisée.

"Mais les nouveaux patrons n'ont rien fait. Ils nous doivent 22 mois de salaires", martèle cet homme désabusé.

Ivanko Jankovic reconnaît que le complexe ne pourra plus être remis sur pied. "Tout est tellement ruiné qu'il est impossible de relancer la production", dit-il.

Les espoirs des habitants de Loznica reposent désormais sur l'hypothétique ouverture d'une mine de jadarite, un minerai contenant du lithium servant à produire des pîles pour téléphones portables, découvert à proximité de la ville par la compagnie Rio Tinto en 2006, mais qui depuis 2012 ne s'est pas manifesté à ce sujet.

"L'ouverture de la mine apporterait des emplois, c'est notre seul espoir", soupire Ivanko.

mat/cn/ros

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