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Chine: un groupe solaire victime du premier défaut de paiement sur des obligations

Chine: un groupe solaire victime du premier défaut de paiement sur des obligations

Un fabricant chinois de panneaux solaires s'est dit vendredi incapable de verser des intérêts dus sur des obligations de l'entreprise --un type de défaut inédit en Chine, susceptible selon les experts d'ouvrir la voie à un assainissement du marché.

Le groupe shanghaïen Chaori Solar Energy Science & Technology avait averti dès mardi qu'il n'avait pas les moyens d'honorer le paiement de 89,8 millions de yuans (10,7 millions d'euros) d'intérêts dus en fin de semaine sur des obligations qu'il avait émises en 2012.

Liu Tielong, secrétaire du conseil d'administration du groupe, a confirmé vendredi que le groupe se trouvait en défaut de paiement, selon Dow Jones Newswires.

"Le défaut est d'ores et déjà un fait établi", a par ailleurs affirmé à l'AFP l'avocat Gan Guolong, qui représente des investisseurs lésés.

Selon les experts, Chaori est le tout premier groupe à essuyer en Chine continentale un défaut de paiement sur des obligations d'entreprises --signal que Pékin est désormais prêt à accepter de telles défaillances.

"Nous avons l'intention d'aider les souscripteurs à récupérer les intérêts qui leur sont dus, par la voie légale", a ajouté M. Gan.

Certains ont ainsi demandé à la plus haute instance judiciaire de la province du Guangdong (sud) d'ordonner à l'entreprise, mais aussi à la place boursière où elle est cotée et aux établissements ayant garanti l'émission initiale, de réaliser le paiement escompté, a expliqué l'avocat.

Aussi bien les actions que les obligations de Chaori Solar s'échangeaient à la Bourse de Shenzhen, qui avait décidé le 19 février de suspendre le titre du groupe.

"L'opérateur boursier ne nous a jamais averti des risques, c'est de sa faute. Quand vous achetez un produit contrefait dans un centre commercial, c'est sa responsabilité", a indiqué à l'AFP Wang Yong, qui avait investi 1,28 million de yuans dans les obligations Chaori.

Les difficultés du groupe ne sont cependant pas une surprise, le secteur chinois du solaire étant sinistré et miné par les surcapacités.

Mais si le cas de Chaori (où les montants en jeu restent extrêmement limités) a tant attiré l'attention, c'est avant tout parce qu'il semble témoigner d'un changement d'attitude des autorités.

"Ces dernières années, les gouvernements municipaux et les banques (publiques) intervenaient toujours pour aider les entreprises en détresse à honorer les paiement sur leurs obligations", ont observé des analystes de l'agence financière Moody's.

"Ces renflouements systématiques avaient conduit nombre d'investisseurs à sous-estimer les risques inhérents au marché obligataire", ont-ils noté.

Or l'Etat semble prêt désormais, dans ce type de situation, à "laisser le marché jouer son rôle", selon un commentaire publié jeudi par l'agence Chine nouvelle.

"Un défaut contribuerait à réduire +l'aléa moral+" qui pousse nombre d'investisseurs à prendre des risques "parce qu'ils croient qu'un gouvernement tout-puissant sera toujours là pour renflouer les firmes défaillantes", avait-elle expliqué.

"C'est tout à fait naturel d'assister à des fluctuations sur les marchés financiers", a renchéri vendredi Qin Gang, porte-parole du ministère des Affaires étrangères.

Pour les experts, une telle évolution pourrait permettre d'assainir un marché miné par les obligations douteuses, en incitant les investisseurs à agir avec davantage de discernement.

"Une économie normale a besoin de ces défauts afin de distinguer les obligations saines des produits de crédit" à risque, a ainsi observé Lu Ting, de Bank of America Merrill Lynch.

Tout en prévenant que "ce type de défaut (...)n'a absolument rien à voir avec l'effondrement d'une institution bancaire majeure", et qu'une crise systémique n'était donc pas en vue.

Ce défaut intervient cependant alors que s'avivent en Chine les préccupations sur les produits émis par une soixantaine de trusts et sociétés de crédit, évoquant pour certains le spectre des "obligations pourries" américaines.

Cas emblématique, un produit d'investissement portant sur l'équivalent de 360 millions d'euros, commercialisé par la plus grosse banque chinoise (ICBC) et destiné à financer un groupe minier, a évité de justesse un défaut fin janvier... après le secours d'une partie tierce restée anonyme.

Un autre produit d'investissement (116 millions d'euros), adossé à un groupe minier, a échoué à au moins cinq reprises à rembourser capital et intérêts --selon un décompte mi-février.

"Les investisseurs vont apprendre à mieux évaluer les risques", mais cet accès de défiance aura pour conséquence "inévitable" de freiner le crédit et les investissements, avertit Yao Wei, économiste de Société Générale.

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