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Les violences de Boko Haram font s'effondrer le système de santé dans le nord-est du Nigeria

Les violences de Boko Haram font s'effondrer le système de santé dans le nord-est du Nigeria

Le système de santé s'est effondré dans le nord de l'Etat de Borno, au Nigeria, en raison des violences des insurgés islamistes du groupe Boko Haram qui font fuir le personnel médical.

Du coup, médecins et infirmiers s'inquiètent d'une hausse de la mortalité tandis que les maigres effectifs restants sont débordés.

"L'ensemble du système de santé dans le nord de l'Etat de Borno s'est effondré et aucun soin n'est plus délivré", affirme Musa Babakura, un chirurgien du Centre hospitalier universitaire de Maiduguri (UMTH), la capitale de l'Etat, et fief des islamistes

M. Babakura qualifie la situation de "crise sanitaire en expansion", qui force les malades à franchir de grandes distances pour recevoir des soins et interrompt les programmes de vaccinations.

L'insurrection de Boko Haram sévit depuis 2009 mais les insurgés ont été particulièrement violents ces dernières semaines.

Quelque 500 personnes ont péri dans des attaques attribuées aux islamistes depuis début 2014. Les villages isolés proches de la frontière du Cameroun sont les plus touchés, malgré l'augmentation des effectifs militaires dans la région.

Hôpitaux et cliniques ont également été visés: du personnel médical a été kidnappé, contre rançon ou pour soigner des combattants de Boko Haram blessés, et des pharmacies, en général tenues par des chrétiens, ont été la cible d'attaques à main armée et de pillages.

L'insécurité a poussé certains habitants à passer la frontière pour chercher des soins au Cameroun. Des femmes enceintes, des infirmes utilisent des ânes et des pousse-pousse à moteur sur des pistes difficiles.

Mais le voyage épuisant fait son lot de victimes, déplore Modu Faltaye, chef du village de Wulgo, sur les rives du lac Tchad.

"Le temps que les malades arrivent à l'hôpital (au Cameroun), leur état a empiré, ce qui fait que nous perdons beaucoup de nos malades", explique-t-il.

"Il est évidemment certain que les taux de mortalité maternelle et infantile vont augmenter dans la région, à cause de complications découlant des mauvaises conditions de transport vers l'hôpital", renchérit le docteur Babakura.

Le Nigeria est l'un des trois seuls pays au monde - avec l'Afghanistan et le Pakistan - où la poliomyélite est endémique. 53 cas ont été recensés en 2013, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), dont plus de la moitié se trouvait dans l'Etat de Borno et son voisin de Yobe, également touché par les violences des islamistes.

En février 2013, ces derniers avaient pris d'assaut deux cliniques de vaccination dans la ville de Kano (nord), tuant au moins neuf personnes.

Selon un responsable local de la santé, les vaccins sont désormais administrés uniquement à Maiduguri parce que les soignants chargés de les inoculer ont peur de se rendre dans nombre d'endroits de l'Etat.

A Baga, un village de pêcheurs du lac Tchad, une fièvre cérébrale a tué des dizaines de personnes depuis décembre mais les habitants n'ont reçu aucun traitement, raconte l'un d'eux, Husseini Goni.

"Les gens crèvent comme des poulets", lâche-t-il.

Les problèmes de livraison dans les zones touchées par les violences et la fermeture des pharmacies ont également entraîné une flambée des prix des médicaments, jusqu'à 35%, selon les médecins et infirmiers.

Et la fermeture des établissements en zone rurale a fortement augmenté la charge de travail des hôpitaux de Maiduguri, qui souffrent de pénuries de personnel.

Dans l'un de ces hôpitaux, deux des trois chirurgiens orthopédiques ont démissionné, tandis qu'un certain nombre de spécialistes chevronnés sont soit en vacances, soit en congé sabbatique jusqu'à la fin des violences, selon le docteur Kabiru Ibrahim.

"Les patients souffrant de maladies comme le VIH, le diabète ou l'hypertension ont besoin d'un accès aux médicaments à intervalles réguliers et ces médicaments peuvent seulement se trouver à Maiduguri", s'inquiète M. Ibrahim. "Ce type de patients n'a parfois pas l'occasion de venir prendre ses médicaments à cause des attaques de Boko Haram sur les routes".

D'après le docteur Babakura, des hôpitaux comme l'UMTH fournissent désormais des traitements qui étaient jusque-là fournis au niveau local, par les hôpitaux de brousse.

Les fermetures de ces établissements "ont énormément accru notre nombre de patients, ce qui nous fait travailler plus longtemps et risque d'entamer notre efficacité", estime-t-il.

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