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Dans les bastions des "colectivos" à Caracas, les manifestants sont indésirables

Dans les bastions des "colectivos" à Caracas, les manifestants sont indésirables

La voix d'Hugo Chavez résonne dans les haut-parleurs d'un quartier pauvre de l'ouest de Caracas, comme pour rappeler que dans ce bastion "chaviste", les manifestants de l'est aisé de la capitale ne sont pas les bienvenus.

"Vive la Révolution !", le cri de l'ex-président Chavez (1999-2013) retentit désormais chaque jour dans le quartier du 23 janvier, considéré comme la place forte des "colectivos", les groupes communautaires dévoués au gouvernement de Nicolas Maduro.

Jusqu'à présent, les étudiants et sympathisants de l'opposition qui battent le pavé depuis un mois pour protester contre la gestion de l'héritier politique de Hugo Chavez ne se sont pas aventurés dans cette zone.

Corps civils officiels, les "colectivos" affirment que le rôle qui leur a été confié par le "comandante" est de garantir la sécurité et la propreté dans les rues, d'organiser des activités pour les enfants et de promouvoir les programmes de santé et d'éducation du gouvernement.

Mais les manifestants les voient davantage comme les exécutants zélés des basses oeuvres du gouvernement et les accusent de mener des expéditions punitives en tirant à l'arme à feu sur les protestataires. Les violences qui ont émaillé les manifestations depuis un mois ont déjà fait officiellement 20 morts.

"Ils diabolisent les +colectivos+ parce qu'ils veulent se débarrasser de ceux qui conduisent le processus" révolutionnaire, se défend Mauricio Urbina, employé municipal de 49 ans et coordinateur du "Colectivo La Libertad".

"S'ils veulent la paix, pourquoi envoient-ils les +colectivos+ ?", répond Miguel Rodriguez, étudiant en droit de 21 ans qui fait partie des militants radicaux qui affrontent quasi quotidiennement les forces de l'ordre dans le quartier cossu de Chacao, à l'est de la capitale.

Cette fracture économique et idéologique entre l'est et l'ouest de Caracas était particulièrement sensible mercredi au moment des hommages rendus à Hugo Chavez.

Alors qu'à Chacao des groupes de jeunes provoquaient une nouvelle fois les forces de l'ordre, les habitants du 23 janvier lançaient des feux d'artifice et des cerfs-volants en l'honneur du "commandant éternel".

"Les pauvres font la fête et les riches manifestent", résumait au "23 janvier" Urbina, casquette à étoile rouge vissée sur la tête.

Les dirigeants des "colectivos" reconnaissent que leur présence dissuadent les protestataires de chercher à entraîner les quartiers déshérités dans leur sillage. Pourtant les plus démunis sont autant, voire davantage, touchés par l'insécurité et les problèmes économiques reprochés à M. Maduro.

"Ce sont des zones où la majorité soutient le gouvernement révolutionnaire, rappelle Urbina. On se montre et alors les gens se disent : +Nous sommes une minorité, je ne vais pas sortir+".

Les "colectivos" ont fait leur apparition bien avant la première élection de Chavez en 1998. Ils se sont fait connaître en se rebellant contre plusieurs gouvernements dans les années 1970 et 1980.

Aujourd'hui, ils figurent à l'avant-garde, accompagnant les programmes sociaux du gouvernement financés par la manne pétrolière comme les centres de soins gratuits où officient de nombreux médecins cubains ou des projets éducatifs et sportifs.

Les policiers municipaux s'aventurent rarement au "23 janvier". Les "colectivos" sont censés y assurer la sécurité, mais sans armes à feu, insistent-ils.

"La seule arme que nous avons est la Constitution", clame Keyvins Tablante, 27 ans, du Colectivo Salvador Allende, en contrebas de la Caserne de la Montage, où repose depuis un an la dépouille de Hugo Chavez.

"Les +colectivos+ ont prouvé que nous ne sommes pas violents", insiste-t-il, alors que des rumeurs circulent sur la possession d'armes au sein d'un autre groupe, La "Piedrita" ("Petite pierre"), dont les responsables ont décliné les demandes d'entretien d'un journaliste de l'AFP.

"Ils surveillent le secteur, circulent pour maintenir l'ordre, s'assurer qu'il n'y ait pas de vente de drogue", assure de son côté Irma Reyes, 49 ans et mère de quatre membres de "colectivos".

"Nous sommes organisés. Nous voulons la paix et l'harmonie", plaide-t-elle encore.

lth/ag/hdz/bir

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