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Proscrit et assiégé, le Hamas cherche une issue à la souricière

Proscrit et assiégé, le Hamas cherche une issue à la souricière

La décision de la justice en Egypte de proscrire le Hamas pourrait pousser le mouvement islamiste palestinien, au pouvoir à Gaza, à se risquer à une confrontation avec Israël pour sortir de la nasse, selon des analystes.

"La situation entre l'Egypte et le Hamas a atteint un point de non-retour", s'inquiète Moukhaïmer Abou Saada, professeur de science politique à l'Université Al-Azhar de Gaza.

"Pour le Hamas, les choix sont très réduits: soit la réconciliation avec le président Mahmoud Abbas et son mouvement Fatah, soit la confrontation ouverte avec Israël pour embarrasser l'Egypte et s'attirer la sympathie du monde arabe", analyse-t-il, jugeant "cette dernière option coûteuse et aventureuse".

Un tribunal du Caire a proscrit mardi en Egypte le Hamas, considéré comme la branche palestinienne des Frères musulmans, mouvement du président islamiste déchu Mohamed Morsi, déclaré en décembre "organisation terroriste" par les autorités transitoires installées par l'armée.

Le mouvement palestinien, qui nie catégoriquement, est accusé de prêter la main aux attentats en Egypte depuis la destitution le 3 juillet par l'armée du premier président égyptien élu démocratiquement, imputés par le nouveau pouvoir aux Frères musulmans.

Sous strict blocus israélien depuis 2006, le Hamas à Gaza avait bruyamment fêté la chute de Hosni Moubarak en février 2011 puis la victoire de M. Morsi en juin 2012.

Les dirigeants du Hamas, redoutant qu'après la démolition des centaines de tunnels de contrebande où transitaient armes et munitions, mais aussi produits de première nécessité et matériaux de construction, l'Egypte ne leur porte le coup de grâce, se sont insurgés contre une décision qui "vise à étrangler la résistance et sert l'occupation israélienne".

La destruction des tunnels a généré des pertes mensuelles évaluées à 230 millions de dollars (environ 170 millions d'euros), de l'aveu même du gouvernement du Hamas, qui peine à payer ses fonctionnaires.

Ceux-ci ont réclamé lundi dans un communiqué de leurs arriérés de salaires, qui n'ont pas été versés intégralement depuis quatre mois.

Le conseiller pour les Affaires étrangères du chef du gouvernement du Hamas, Ismaïl Haniyeh, Bassem Naïm, a qualifié de "choquante" la décision de la justice égyptienne, espérant dans une déclaration à l'AFP qu'elle ne se traduirait pas par "des restrictions à la circulation des personnes" à Gaza.

Depuis juillet, le terminal frontalier de Rafah, seul accès du territoire palestinien qui ne soit pas supervisé par Israël, est très souvent fermé par les autorités égyptiennes, excipant de raisons sécuritaires.

Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), Rafah n'a été ouvert que six jours en janvier et à peine plus en février, empêchant l'accès des Gazaouis en particulier aux traitements médicaux.

L'analyste gazaoui Hani Habib considère néanmoins la décision de justice comme "une formalité qui n'aura guère d'impact supplémentaire", rappelant que "les mesures sécuritaires égyptiennes et la fermeture de Rafah étaient déjà en vigueur".

Il escompte peu de conséquences concrètes "car le Hamas n'a pas de bureaux en Egypte".

Un lieutenant du chef du Hamas, Khaled Mechaal, basé au Qatar, Ezzat al-Rishq, a néanmoins considéré que l'interdiction allait "ouvrir les portes à de nouvelles agressions et à la guerre contre Gaza".

Jusqu'à présent, le Hamas s'efforce de faire respecter une trêve précaire avec Israël, conclue en novembre 2012 grâce à une médiation égyptienne, en dépit des tirs récurrents de roquettes vers le territoire israélien, revendiqués pour la plupart par des groupes salafistes.

"La rupture définitive entre l'Egypte et le Hamas signifierait une pression accrue sur Gaza au risque que la situation n'explose à la figure de l'Egypte ou d'Israël", analyse Adnane Abou Amr, professeur de science politique à l'Université Oumma, à Gaza, soulignant que le Hamas pourrait instrumentaliser certains groupes salafistes radicaux dans le Sinaï égyptien.

"Le Hamas doit s'abstenir de réagir violemment à la décision égyptienne parce que Gaza fait partie de la Palestine et a besoin de garder de bonnes relations avec l'Egypte, tout autant que cette dernière a besoin de Gaza pour sa sécurité nationale", assure le politologue Naji Charab.

"La meilleure option pour le Hamas pour sortir de la crise est la réconciliation avec le Fatah", plaide-t-il.

Le Fatah et le Hamas, qui gouvernent respectivement les zones autonomes de Cisjordanie et Gaza, ont signé en 2011 au Caire un accord de réconciliation pour mettre fin à la division politique entre les deux territoires.

Mais la plupart des clauses en sont restées lettre morte et les échéances constamment repoussées.

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