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Dans une forêt allemande, l'attente de résidus d'armes chimiques syriennes

Dans une forêt allemande, l'attente de résidus d'armes chimiques syriennes

Dans une forêt du Nord de l'Allemagne, derrière de hautes barrières, des agents en bleu de travail se préparent à détruire des résidus d'armes chimiques syriennes, dont du gaz moutarde qui fut pour la première fois testé sur ce site pendant la Première Guerre mondiale.

Des employés de la société publique GEKA commandent à distance un incinérateur de déchets chimiques depuis une salle d'opérations ultra-moderne, sur ce site ultra protégé, située à 70 km au sud de Hambourg, au cours d'une "journée presse" mercredi.

Peu connu jusqu'ici, le site, proche de la petite ville de Münster, est en effervescence depuis qu'il attend l'arrivée de résidus de gaz moutarde en provenance de Syrie.

A partir du début de l'été, 12 à 15 conteneurs doivent arriver sur le terrain de la Société fédérale pour le traitement des armes et des résidus d'armes chimiques (GEKA), dans l'Etat régional de Basse-Saxe. Le traitement sur ce site de 67.000 m2, qui comprend deux incinérateurs et une installation pour détruire des explosifs, devrait s'achever d'ici à la fin de l'année.

La cargaison sera acheminée par bateau jusqu'à un port allemand qui n'a pas encore été désigné, avant de rejoindre par camion le site de Münster où travaillent jour et nuit environ 140 personnes. Les résidus, stockés dans des conteneurs, seront directement acheminés via un réseau de tuyaux dans un incinérateur où ils seront portés à une température d'un millier de degrés pour leur ultime destruction.

"Ce n'est pas du gaz moutarde qui arrive ici" mais des résidus bien moins dangereux, souligne Andreas Krüger, le patron de GEKA, à l'occasion d'une visite de presse. Le traitement chimique de ce gaz, qui peut être létal, est effectué en Méditerranée sur le navire américain Cape Ray, par un système d'hydrolyse.

Pour autant, avertit un porte-parole de GEKA, "ce n'est pas un parc de loisirs ici. On n'y fête pas des anniversaires pour les enfants".

Au total, la société GEKA, qui travaille également à la décontamination des sols et la destruction des armes des deux guerres mondiales, doit traiter 370 tonnes de détritus.

C'est sur ce même site que, pendant la Première Guerre mondiale, l'armée allemande a testé des armes chimiques, notamment du gaz moutarde, avant de les déployer sur le front à partir de 1915. Cette substance inflige de graves brûlures. Sous sa forme pure, le gaz moutarde apparaît comme un liquide visqueux, "du miel qui provoque des sortes de cloques sur la peau, attaque les muqueuses et les yeux si vous en inhalez beaucoup", explique Ulrich Stiene, qui dirige l'une des unités techniques de la GEKA.

En 1919, un accident provoqua l'explosion d'un million de grenades qui réduisit à néant le site de Münster et ravagea les alentours sur un rayon de trois kilomètres. Mais il servit de nouveau sous le régime nazi, notamment pour la production de gaz sarin. Son sol est toujours contaminé aujourd'hui et certaines zones autour de Münster sont interdites au public. "Cela donne à réfléchir de voir que cent ans après le déclenchement de la Première Guerre mondiale, le problème (de l'utilisation des armes chimiques) est toujours d'actualité", souligne Andreas Krüger.

Le 9 janvier, le gouvernement allemand avait annoncé qu'il allait détruire sur son territoire une partie des résidus d'armes chimiques syriennes à la demande de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC). Et c'est la GEKA qui a été retenue pour cette opération.

"Même si nous ne sommes qu'un petit maillon de la chaîne, cela nous donne une certaine motivation et aussi une certaine fierté" de voir que le travail de l'OIAC a été récompensé à l'automne par le Prix Nobel de la paix, assure M. Krüger.

La Syrie, en proie à un conflit armé depuis trois ans, a accepté de détruire son arsenal chimique composé de quelque 1.300 tonnes de gaz moutarde et sarin, après une attaque au gaz sarin le 21 août qui avait causé la mort de nombreux civils et indigné la communauté internationale.

Mais le transfert des produits et des armes chimiques les plus dangereux a pris du retard en raison des combats qui font rage.

yap/aro/sym

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