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A Bangui, espoir et doute après la visite du président Hollande

A Bangui, espoir et doute après la visite du président Hollande

"Ange gardien" ou chef militaire d'une opération "vouée à l'échec": au lendemain de la visite du président français François Hollande à Bangui, les réactions étaient partagées samedi en Centrafrique où les violences persistent trois mois après le début de l'intervention française.

"Le président François Hollande a redonné l'espoir à tous les Centrafricains. Et il a prouvé qu'il est vivement préoccupé par la situation centrafricaine en risquant sa vie, parce qu'il est venu alors que la paix n'est pas totalement restaurée", estime Alfred Kongala, un étudiant de la capitale.

"C'est notre ange gardien", renchérit un commerçant, Serge-Théophile Gouengali. "Il a ordonné une intervention militaire au moment où on ne savait pas quel était notre sort. Et il vient constater l'évolution de la situation, c'est un réconfort très important".

Au cours de sa deuxième visite en Centrafrique depuis le déclenchement de l'intervention française ("opération Sangaris") le 5 décembre, M. Hollande a rencontré la présidente de transition Catherine Samba Panza et les autorités religieuses du pays.

Solidement escorté, le président français a traversé certains quartiers dangereux de Bangui comme pour montrer que la situation s'était améliorée.

"La vie a repris, les commerces ont rouvert, l'activité est là" même "s'il reste beaucoup à faire", a-t-il souligné vendredi soir.

La France a dû réviser ses objectifs initiaux en envoyant 400 soldats en renfort des 1.600 déjà présents et en prolongeant une opération qui se voulait courte - le gouvernement a reconnu des "difficultés considérables sur le terrain".

Samedi, trois ex-rebelles de la Séléka ont été abattus et un autre grièvement blessé à Bangui lors d'une nouvelle attaque, alors qu'ils rejoignaient en taxi un des derniers quartiers musulmans de la ville.

Le bilan global est difficile à établir. Cette semaine, la Croix-Rouge centrafricaine a déclaré avoir ramassé 1.240 corps à Bangui depuis le 5 décembre.

Mais le total des morts est plus élevé: certains cadavres disparaissent, d'autres sont directement récupérés par les familles.

Quant au niveau de violence hors de Bangui, il reste largement méconnu, les informations parvenant au compte-gouttes.

A Bouar (nord-ouest), ville clé de l'axe reliant le Cameroun à Bangui, "il y a une accalmie" depuis l'arrivée des troupes françaises mi-février et le départ des ex-Séléka, auteurs de multiples exactions, selon les autorités locales.

En revanche, dans la ville minière de Berberati (sud-ouest), des échanges de tirs ont opposé vendredi des soldats de la force de l'Union africaine (Misca) à des miliciens anti-balaka qui refusaient d'être désarmés, selon une source de la gendarmerie centrafricaine, qui précise qu'"au moins" 17 musulmans y ont été tués par les anti-balaka depuis début février.

Face à la persistance des tueries et des pillages, doutes et inquiétudes sont palpables dans la capitale centrafricaine.

"Près de 8.000 soldats (2.000 Français et 5.700 Africains de la Misca) pour sécuriser uniquement Bangui, avec une population de 800.000 habitants, et cela dure depuis plus de deux mois, c'est un résultat mitigé", déplore Joseph Bendounga, ancien opposant au régime de François Bozizé et ministre du précédent gouvernement de transition.

Pour lui, "ce que la France est en train de faire en Centrafrique est voué à l'échec (...) M. François Hollande continue à agir comme les autres présidents français. Ils agissent en chefs militaires, alors que la crise centrafricaine est politique".

Cela fait bientôt un an que la Centrafrique a basculé dans le chaos, depuis le renversement en mars 2013 du régime Bozizé par la coalition rebelle à dominante musulmane de la Séléka.

Des mois d'exactions perpétrées en toute impunité par ses combattants contre la population majoritairement chrétienne ont abouti à la formation de milices d'autodéfense anti-balaka, déclenchant un cycle infernal de violences interconfessionnelles.

Ces violences ont provoqué une crise humanitaire sans précédent, avec des centaines de milliers de déplacés internes et l'exode de dizaines de milliers de civils musulmans terrorisés.

Pour Juste-Roland Angbapa, juriste, "le président Hollande et la France nous ont fait éviter le pire".

"C'est désormais à la classe politique centrafricaine de prendre ses marques et de s'intégrer dans le processus de transition en cours", juge Enoch-Dérant Lakoué, ancien Premier ministre du président André Kolingba.

Vendredi, François Hollande a fixé le prochain cap: "L'enjeu, ce n'est même pas de rétablir, mais d'établir l'Etat" et pour cela, "il faut commencer par payer les fonctionnaires".

Fonctionnaires et membres des forces de sécurité ne sont plus payés depuis des mois, un phénomène récurrent dans l'histoire troublée de la Centrafrique.

bur-cl/mba

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