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Thaïlande: la Première ministre esquive la commission anticorruption

Thaïlande: la Première ministre esquive la commission anticorruption

La Première ministre thaïlandaise Yingluck Shinawatra, contestée par la rue depuis quatre mois, a esquivé jeudi une convocation pour négligence de la commission anticorruption (NACC), procédure qui pourrait mener à sa destitution.

Après des mois d'une crise politique meurtrière, Yingluck se bat pour sa survie politique alors que la pression augmente de toutes parts: de la commission anticorruption, des tribunaux et de la rue, avec des manifestants moins nombreux mais qui ne désarment pas.

La NACC estime que Yingluck a ignoré les mises en garde contre la corruption qu'aurait engendré le programme controversé d'aide aux riziculteurs. Elle l'a donc convoquée pour lui faire part officiellement d'accusations de négligence.

Mais la Première ministre, en déplacement dans son fief du nord du pays, a envoyé ses avocats à sa place.

Yingluck, qui clame son innocence, "a l'intention de coopérer", a assuré l'un d'eux, Norrawit Larlaeng, précisant qu'elle croyait toujours en ce programme qui a conduit le gouvernement à acheter le riz aux paysans jusqu'à 50% au-dessus du prix du marché.

Si Yingluck était reconnue coupable, le dossier pourrait être transmis à la justice et en même temps transféré au Sénat, qui pourrait l'interdire de vie politique pour cinq ans.

La Première ministre fait également face depuis l'automne à des manifestants qui veulent remplacer le gouvernement par un "conseil du peuple" non élu.

Ils lui reprochent d'être une marionnette de son frère Thaksin Shinawatra, ancien Premier ministre en exil renversé par un coup d'État en 2006, qu'ils détestent.

Alors que les partis pro-Thaksin ont gagné toutes les législatives depuis plus de dix ans, les protestataires accusent également la famille Shinawatra de corruption et d'utiliser l'argent public pour s'assurer le soutien des campagnes du nord et du nord-est, coeur de son électorat.

Les violences engendrées par cette crise, attaques à la grenade ou fusillades visant principalement les manifestants, se sont multipliées ces derniers jours, portant le bilan à 22 morts et des centaines de blessés.

Les législatives du 2 février n'ont pas réussi à apaiser les tensions. Les manifestants ont en effet largement perturbé le scrutin, empêchant la publication des résultats et la réunion du nouveau Parlement, en attendant de nouveaux scrutins partiels.

Alors que le gouvernement a plaidé pour des négociations, le leader du mouvement, Suthep Thaugsuban, a déclaré jeudi qu'il ne discuterait avec Yingluck que face-à-face et en direct à la télévision.

Un appel qu'elle a rejeté. Son vice-Premier ministre Surapong Tovichakchaikul a lui indiqué jeudi avoir invité le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon à venir en Thaïlande pour servir de médiateur.

Le programme d'aide aux riziculteurs avait contribué à la large victoire de la Première ministre aux élections de 2011. Mais il s'est depuis retourné contre elle.

Ses détracteurs accusent cette politique d'avoir entraîné une corruption massive, porté un coup aux finances publiques et créé une montagne d'invendus. Et des riziculteurs se sont joints à la grogne en raison de l'incapacité du gouvernement à les payer depuis fin 2013.

Mais les partisans de Yingluck et certains experts jugent ces attaques politiques, estimant qu'elles sont destinées à provoquer un "coup d'État judiciaire" similaire à 2008, lorsque la justice avait chassé deux gouvernements pro-Thaksin.

"Ce sont des plans élaborés pour renverser le gouvernement sans organiser un coup d'Etat physique", a noté Verapat Pariyawong, avocat et commentateur politique.

Des dizaines de sénateurs pro-Yingluck font aussi face à une procédure de la NACC pour leur tentative ratée d'amender la Constitution pour faire du sénat une assemblée entièrement élue, et non plus en partie nommée.

S'ils étaient interdits de vie politique et en l'absence de chambre basse, un vide politique pourrait émerger, laissant les sénateurs nommés en charge de désigner un nouveau Premier ministre, selon des experts.

Autre coup dur pour Yingluck: la justice a lui interdit d'utiliser la force contre les manifestants, limitant sa marge de manoeuvre face à des militants qui continuent à bloquer administrations et carrefours clé de Bangkok.

Des membres du mouvement pro-Thaksin des "chemises rouges" ont imité jeudi la tactique de leurs ennemis dans la rue depuis l'automne, se rassemblant devant le bâtiment de la NACC dont ils ont cadenassé l'entrée. La réunion a dû avoir lieu ailleurs.

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