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Nouvelle ère en Ukraine: Timochenko libérée, Ianoukovitch introuvable

Nouvelle ère en Ukraine: Timochenko libérée, Ianoukovitch introuvable

Une nouvelle ère s'ouvrait dimanche en Ukraine après la folle journée de la veille, marquée par la destitution de facto du président Viktor Ianoukovitch, introuvable depuis, et la libération de l'opposante Ioulia Timochenko.

Tôt dans la matinée, le centre de Kiev, métamorphosé en quasi-zone de guerre après trois mois de crise aigüe, semblait renouer avec un semblant de normalité, même si le service d'ordre des manifestants gardait toujours les barricades.

Sur le Maïdan (place de l'Indépendance), l'heure était au soulagement et au recueillement. Tôt dimanche matin, quelques centaines de personnes y étaient rassemblées, chantant la main sur le coeur l'hymne national, conclu par de tonitruants "Gloire à l'Ukraine !"

A proximité, les magasins, restés fermés ces derniers jours, avaient rouvert dimanche.

Dans le même temps, le siège du parti communiste, allié du parti de Viktor Ianoukovitch au Parlement, a été saccagé par des manifestants et les inscriptions "Criminels", "assassins", "esclaves de Ianoukovitch" ont été taguées sur la façade du bâtiment.

Quelques 40 statues de Lénine ont aussi été déboulonnées ou vandalisées depuis le début de la semaine, principalement dans l'est du pays, selon les médias ukrainiens.

Des documents détaillant un système de pots-de-vin organisé et une liste de journalistes à surveiller ont été découverts dans la résidence du président déchu dans la banlieue de Kiev. Le site, resté ouvert toute la nuit, a été visité par des milliers d'Ukrainiens dont beaucoup sont restés bouche bée devant le faste des lieux, perçus comme le symbole de la corruption du régime.

Les affrontements à Kiev ont fait près de 80 morts cette semaine, un niveau de violence inédit pour ce jeune pays issu de l'ex-Union soviétique.

Si l'extrême tension des derniers jours est retombée, les inquiétudes concernant ce pays de 46 millions d'habitants restent très vives. Il apparaît en effet à la fois profondément divisé et au bord de la faillite financière.

L'Ukraine s'est imposée comme thème lors de la réunion du G20 dimanche à Sydney.

"Les Etats-Unis et d'autres pays sont prêts à aider l'Ukraine dans ses efforts de retour à la démocratie, à la stabilité et la croissance", a déclaré le secrétaire américain au Trésor, Jack Lew, qui a espéré la formation d'un "gouvernement multipartite et technocrate, désireux de mener les réformes économiques nécessaires".

Le processus de formation d'un nouveau gouvernement devrait être lancé dimanche, après des consultations qui ont duré toute la nuit, a annoncé un député.

La communauté internationale a en outre clairement fait part de ses craintes que la crise n'ait encore creusé le fossé entre l'Est russophone et russophile, majoritaire, et l'Ouest nationaliste et ukrainophone.

La représentante de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a appelé les responsables politiques ukrainiens à agir "de manière responsable" pour maintenir l'"unité" du pays.

A Kharkiv, ville de l'est du pays, des responsables locaux des régions pro-russes de l'est ont remis en cause samedi la "légitimité" du Parlement ukrainien, qui selon eux travaille actuellement "sous la menace des armes".

Et à Sébastopol (Crimée, sud), une manifestation pro-russe était annoncée pour dimanche à 14H00 GMT.

Le paysage politique de l'Ukraine a été totalement chamboulé en l'espace de 24 heures avec la libération de l'ex-Premier ministre Ioulia Timochenko, emprisonnée depuis 2011. Elle apparaît dès à présent comme une candidate de poids à l'élection présidentielle anticipée fixée au 25 mai.

A peine sortie de prison, l'égérie de la Révolution orange en 2004 s'est rendue sur le Maïdan où elle a salué les "héros" de l'Ukraine et leur a demandé de poursuivre le combat.

"Si quelqu'un vous dit que c'est terminé et que vous pouvez rentrer chez vous, n'en croyez pas un mot, vous devez finir le travail", leur a-t-elle lancé.

Sa libération immédiate avait été votée samedi par le Parlement. Peu après, les députés ont pris acte de ce qu'ils ont présenté comme une vacance du pouvoir, justifiant une destitution de facto du chef d'Etat et l'organisation d'une présidentielle anticipée le 25 mai.

"Le président Ianoukovitch s'est écarté du pouvoir et ne remplit plus ses fonctions", selon la résolution adoptée par le Parlement. L'intéressé, élu en 2010 et dont le mandat court jusqu'en mars 2015, a cependant assuré qu'il n'avait nullement l'intention de démissionner.

"Le pays assiste à un coup d'Etat (...) Je suis un président élu de manière légitime", a-t-il souligné dans une allocution télévisée non datée, diffusée par une chaîne régionale à Kharkiv (est).

Selon le nouveau président du Parlement, Olexandre Tourtchinov, M. Ianoukovitch a tenté samedi de fuir en Russie à bord d'un avion mais en a été empêché par les gardes-frontières. Ces derniers ont indiqué par la suite que M. Ianoukovitch avait tenté en vain de les corrompre pour qu'ils laissent son avion décoller.

On ignorait dimanche où se trouvait l'ex-président.

"Ianoukovitch a été mis KO", s'est réjoui l'un des principaux responsables de l'opposition ukrainienne, le champion du monde de boxe poids-lourds, Vitali Klitschko.

Son parti, Oudar (coup), a demandé le lancement d'un mandat d'arrêt international, "pour que les criminels qui se sont enfuis ou qui souhaitent le faire n'échappent pas à la justice".

Une enquête a déjà été ouverte contre 30 hauts responsables de la police, pour leur rôle dans la répression.

La Russie avait accusé samedi l'opposition ukrainienne de ne pas avoir "rempli une seule des obligations" figurant dans l'accord signé vendredi avec le président et dénoncé "les extrémistes armés et les pillards dont les actes constituent une menace directe (pesant) sur la souveraineté de l'Ukraine".

Côté européen, le ton était radicalement différent. "Il n'y a pas de coup d'Etat à Kiev. Les bâtiments officiels ont été abandonnés. Le président du Parlement a été légitimement élu", selon le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski, qui a participé cette semaine aux négociations entre opposition et pouvoir.

ahe-neo-thm/nm/ros

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