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Bain de sang en Ukraine, l'UE tente d'imposer un compromis, Washington menace

Bain de sang en Ukraine, l'UE tente d'imposer un compromis, Washington menace

La violence s'est déchaînée jeudi en Ukraine avec au moins 60 morts à Kiev, selon l'opposition, alors que les efforts de trois ministres européens pour arracher un compromis se sont poursuivis toute la nuit de jeudi à vendredi.

De son côté, Washington a haussé le ton, menaçant de prendre des sanctions contre "les gouvernants responsables des violences", un message transmis par le vice-président Joe Biden directement au président ukrainien Viktor Ianoukovitch, tandis que le secrétaire d'Etat John Kerry a appelé à la fin des violences et "aux morts insensées".

"Les négociations chez le président (Viktor) Ianoukovitch (...) sont toujours en cours", a écrit sur son compte Twitter le porte-parole du ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski.

"Les leaders de l'opposition ukrainienne, le chef du Parlement et de nombreux députés sont là. Nous travaillons", a ajouté le porte-parole, Marcin Wojciechowski.

Quelques heures plus tôt, l'entourage du chef de la diplomatie française Laurent Fabius avait indiqué que les négociations étaient "très difficiles" et qu'il n'y avait "pas d'accord pour l'instant".

M. Fabius a par la suite quitté Kiev pour Pékin en raison d'engagements en Chine, a indiqué le Quai d'Orsay. Il demeure cependant "en permanence en liaison avec ses homologues allemand et polonais" et "pleinement mobilisé par cette négociation".

Les deux diplomates et leur homologue allemand Frank-Walter Steinmeier ont passé une grande partie de la journée en consultations avec le président Ianoukovitch et avec les leaders de l'opposition ukrainienne, au moment même où une nouvelle vague de violence s'abattait sur le pays.

"Plus de 60 manifestants ont été tués (jeudi). Tous l'ont été par balle", a déclaré à l'AFP le responsable des services médicaux de l'opposition, Sviatoslav Khanenko. Des journalistes de l'AFP ont vu 25 corps au cours de la seule journée de jeudi.

Le bilan s'élève à 75 morts depuis mardi, a annoncé jeudi soir le ministère de la Santé, revoyant en hausse un précédent décompte de 67 victimes.

Le ministère de l'Intérieur avait précédemment fait état de 3 policiers tués jeudi, qui s'ajoutent aux 10 hommes tués les deux jours précédents. A Lviv (ouest), les corps de deux policiers antiémeute ont été retrouvés jeudi dans une caserne brûlée, ont annoncé les autorités locales.

Armés de bâtons, boulons, pavés, mais aussi de cocktails Molotov, des centaines de manifestants radicaux, le plus souvent casqués et équipés de boucliers ont affronté les forces antiémeute Berkout, qui ont répliqué avec des balles en caoutchouc, grenades lacrymogène mais aussi à la kalachnikov, selon des témoignages.

Des images tournées par un média ukrainien ont montré des hommes, apparemment membres des forces de sécurité, dont l'un d'eux ouvre le feu avec un fusil d'assaut Kalachnikov sur une cible non identifiée, dans le centre de Kiev.

"Les manifestants ont été tués de manière très professionnelle par des snipers qui ont visé au coeur, au cerveau ou à la carotide", a affirmé un médecin, Olga Bogomolets, interrogée sur la chaîne privée Kanal 5.

En fin d'après-midi, les affrontements avaient cessé, et des manifestants pouvaient être vus renforçant les barricades du centre-ville, charriant de la nourriture, des planches, des pneus et des bouteilles vides destinées à être transformées en cocktails molotov.

Sur l'emblématique place Maïdan, rendue méconnaissable par les barricades, installations et tentes des manifestants, les chants et discours se poursuivaient sans trêve, tard dans la nuit.

"Le pire scénario que l'on craignait, c'est à dire le scénario d'une guerre civile, est malheureusement très réel", a déploré le Premier ministre polonais Donald Tusk.

"Il a été convenu avec Ianoukovitch qu'il est prêt à tenir des élections présidentielles et parlementaires, prêt à créer un gouvernement d'unité nationale dans les dix prochains jours et à changer la constitution d'ici l'été", a-t-il ajouté sans dissimuler son scepticisme. "Nos expériences nous disent que les engagements entrepris par l'administration ukrainienne sont rarement tenus", a-t-il souligné.

Les ministres européens des Affaires étrangères, réunis à Bruxelles, avaient décidé de priver de visas et de geler les avoirs de responsables ukrainiens.

Des discussions se sont également tenues entre la chancelière allemande Angela Merkel, le président américain Barack Obama et le président russe Vladimir Poutine. Tous trois sont "d'accord pour dire qu'il (faut) trouver une solution politique à la crise en Ukraine le plus rapidement possible et que le bain de sang devait cesser", a indiqué le gouvernement allemand.

Alors que les experts s'accordent à dire que la Russie est incontournable pour une sortie de crise, Moscou reste pour le moment sur une position très ferme, le chef du gouvernement, Dmitri Medvedev, ayant expliqué que son pays ne coopérerait qu'avec un pouvoir sur lequel on ne "s'essuie pas les pieds".

Le Kremlin a indiqué dans l'après-midi avoir dépêché son représentant, le délégué aux droits de l'homme et ancien diplomate Vladimir Loukine à la demande de la présidence ukrainienne, pour participer à une médiation avec l'opposition.

Nombre de responsables politiques ukrainiens se sont également élevés contre le "bain de sang" des derniers jour, à l'instar du maire de Kiev, qui a annoncé qu'il quittait le parti au pouvoir, le Parti des régions. Douze députés l'ont imité jeudi soir, annonçant avoir claqué la porte de la formation du président.

Le Parlement qui a pour la première fois réussi à former une majorité anti-Ianoukovitch a voté dans la soirée de jeudi une résolution revenant sur les mesures antiterroristes annoncées la veille par les services spéciaux et ordonnant le retour des soldats dans leurs casernes.

"La mise à l'écart immédiat de Ianoukovitch et les poursuites contre lui pour meurtres massifs de civils doivent être la seule exigence du peuple, de l'opposition et de la communauté internationale", a pour sa part déclaré l'opposante emprisonnée Ioulia Timochenko dans une déclaration publiée sur le site de son parti.

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