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Afrique du Sud: le big bang sur les investissements étrangers inquiète

Afrique du Sud: le big bang sur les investissements étrangers inquiète

La loi sur les investissements étrangers en Afrique du Sud doit changer d'ici à 2015, mais Pretoria, qui a mis fin à plusieurs traités bilatéraux datant des années Mandela, assure à ses partenaires, notamment européens, qu'ils ne se feront pas plumer.

"Il y a malheureusement des allégations et de fausses affirmations", observe le directeur juridique pour l'investissement du ministère sud-africain du Commerce et de l'Industrie (DTI) Muhammad Mustaqeem De Gama.

"Mais la loi réitère les garanties constitutionnelles dont bénéficient déjà les investissements étrangers en Afrique du Sud", dit-il. Et son ministre, le communiste Rob Davies, souligne qu'aucune expropriation n'est à l'ordre du jour.

La version finale de la nouvelle loi sur la Protection de l'investissement bilatéral n'est pas connue. Le gouvernement examine encore les avis recueillis durant les trois mois de la consultation publique qui s'achevait fin janvier.

La loi sera promulguée "probablement avant la fin de l'année", souligne M. Mustaqeem De Gama à l'AFP. "C'est une loi importante qui touche à la confiance du marché, à la certitude juridique, donc nous devons la mettre en place assez rapidement."

Le tournant est délicat pour l'Afrique du Sud dont l'image est déjà brouillée par une croissance faiblarde, un climat social tendu et une réglementation durcie pour les permis de travail et la discrimination positive à l'embauche pour la majorité noire.

L'Afrique du Sud a préparé 48 traités sur l'investissement bilatéral après l'avènement de la démocratie en 1994 pour inciter les investisseurs à revenir après leur désengagement massif à la fin de l'apartheid.

Une vingtaine de traités ont été mis en oeuvre, en majorité avec des pays de l'Union européenne.

Aucun traité de cette nature n'a été signé avec le Canada, le Japon ou les Etats-Unis, mais plusieurs sociétés américaines opèrent depuis un siège fiscal au Pays-Bas.

Or, depuis 2012, Pretoria a stoppé le renouvellement automatique des traités passés avec sept pays de l'UE --Pays-Bas, l'Allemagne, Espagne, Belgique, Luxembourg, Grande-Bretagne, France-- et avec la Suisse.

Et les milieux d'affaires s'inquiètent.

"Nous sommes à l'aube d'investissements majeurs, donc c'est un sujet très important pour nous, et nous avons vu beaucoup de consultations publiques qui n'ont débouché sur aucun changement", exposait récemment un dirigeant d'une major du pétrole, lors d'un forum patronal à Johannesburg.

Toute la question, explique un diplomate, est de savoir si la nouvelle loi est cohérente avec le Plan national de développement (NDP), un document très libéral adopté par l'ANC --le parti au pouvoir-- fin 2012, ou si elle est l'indice d'un tournant de politique économique pour soutenir "la deuxième transformation" de l'Afrique du Sud.

A savoir: une nouvelle donne légale et économique censée répondre aux besoins d'une grande partie de la majorité noire, dépossédée sous la domination blanche mais que la transformation politique du pays n'a pas tirée de la pauvreté.

Même si l'ANC a assuré qu'il n'y aurait pas de nationalisation des mines, le parti a tendance à souffler le chaud et le froid.

Le gouvernement ANC peut compter sur le soutien du prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz. Les traités bilatéraux, dit-il, sous couvert de défendre la propriété privée, ne servent pas à investir, mais à permettre aux multinationales d'empêcher les gouvernements de légiférer à leur guise. Rien n'interdit d'ailleurs à ces dernières de souscrire une assurance, en dehors de tout traité, notamment via la Banque mondiale.

L'Afrique du Sud reçoit plusieurs milliards de dollars d'investissements directs étrangers tous les ans. Le montant fluctue, mais il est inférieur à celui du Nigeria qui a reçu 30% de plus sur la période 2000-2012 selon la Cnuced.

Au final, le nouveau texte chagrine car il supprime la possibilité de recourir à un arbitrage international, renvoyant en cas de litige sur les juridictions locales.

Il crée la possibilité de procéder à des saisies réglementaires qui ne constitueront pas une expropriation stricto sensu, en principe interdite par la Constitution.

Et s'il garantit un traitement identique aux investisseurs étrangers et locaux, certaines formulations alimentent des craintes.

"Il y a des inquiétudes sur les normes de compensation, les nationalisations, et le contexte politique particulier dans lequel les choses sont faites", reconnaît M. Mustaqeem De Gama. "Quiconque fait des allégations a droit au débat, et c'est ce que nous faisons."

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