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A Kiev, l'amour naît sur les barricades

A Kiev, l'amour naît sur les barricades

Ioulia a laissé tomber son travail pour rejoindre la "révolution" à Kiev. Blessée, elle a été soignée par un jeune homme qui a eu un coup de foudre pour elle. Un mois plus tard, ils ont célébré leur mariage sur les barricades.

Les jeunes mariés fêtent leur première Saint-Valentin en distribuant des médicaments dans la mairie de la capitale, occupée par les manifestants depuis décembre et transformée en "QG de la Révolution".

Au lieu de se rendre en Egypte où elle devait donner des cours de gymnastique dans un hôtel, Ioulia Serko, 25 ans, originaire de Rivne, une ville de l'ouest de l'Ukraine, avait préféré aller à Kiev, théâtre d'une contestation sans précédent depuis la volte-face du pouvoir en novembre sur un rapprochement avec l'Europe au profit de la Russie. Le mouvement s'est transformé depuis en un rejet total du régime.

"Je n'en pouvais plus de ce chaos, de ce pouvoir mafieux", explique la jeune femme brune et svelte.

Début janvier, une armoire servant de barricade contre un éventuel assaut de unités antiémeutes Berkout lui est tombée dessus pendant qu'elle dormait à la mairie de Kiev, après avoir préparé des repas pour les contestataires.

Bogdan Zabavtchouk, 21 ans, un chimiste de l'infirmerie, lui a pansé le bras et a préparé une décoction pour la soigner.

"Je vois une belle fille qui me demande de lui soigner le bras", se souvient-il, assis dans la grande salle de la mairie où des manifestants dorment sur des chaises. Un petit groupe suit de son côté un cours d'anglais.

"Trois jours plus tard, j'ai compris que je voulais passer ma vie avec elle", raconte-t-il.

Ioulia repart chez elle, mais revient quand éclatent les heurts qui ont fait quatre morts et plus de 500 blessés fin janvier.

"Regarder ça à la télévision faisait plus peur que d'être là", explique-t-elle.

Bogdan vient la chercher à la gare et elle voit qu'il a du mal à porter sa valise. C'est ainsi qu'elle apprend qu'il a été blessé aux côtes par les forces antiémeute.

Un prêtre orthodoxe venu de Francfort pour rejoindre les manifestants dans la capitale célèbre leur mariage à la mairie quelque jours plus tard.

Ils font ensuite en voiture le tour des barricades qui entourent le centre de Kiev et trinquent au champagne avec ceux qui sont là.

"J'ai appris mon mariage à mes parents la veille seulement. J'avais peur qu'ils ne prennent pas ça au sérieux : révolution, émotions...", raconte Ioulia.

Les parents de Bogdan ont appris la nouvelle en regardant la télévision.

"La révolution inspire l'amour", assure Ioulia.

"Les gens qui sont ici partagent les mêmes idées. Dans la vie de tous les jours, ils sont souvent mal compris par leur famille ou leur amis, ici il est plus facile de trouver l'âme soeur", explique-t-elle.

Galina et Olexandre se sont aussi rencontrés sur le Maïdan, la place centrale de Kiev, et ont choisi la Saint-Valentin pour y célébrer leur mariage.

"Je souhaite aux autres amoureux de se marier, il y a sur le Maïdan une atmosphère particulière qui unit les coeurs", a dit Galina en longue robe blanche.

"On a l'idée de faire un flash mob, d'aller voir les Berkout (forces antiémeute ndlr) et de leur offrir du champagne... sans alcool", a-t-elle ajouté.

Début février, un jeune opposant casqué et portant un gilet pare-balles, le visage couvert d'un passe-montagne noir, a solennellement passé une bague de fiançailles au doigt d'une jeune femme, au beau milieu des barricades.

"Le combat change l'homme", avait-il alors expliqué.

Encouragés par ces exemples, Iaroslava, 21 ans, et Stas, 18, s'apprêtent à se marier dimanche.

"Cela fait un an que nous nous connaissons, mais nous sommes ensemble depuis deux mois", raconte la jeune femme aux cheveux courts, portant une veste de treillis et un keffieh autour du cou.

Créatrice de jeux vidéo en temps normal, elle fait partie du système de défense de la mairie, de même que Stas.

"On monte ensemble la garde, cela rapproche", dit Stas en souriant.

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