Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

A Rio, la glacière symbole de résistance à l'envolée des prix

A Rio, la glacière symbole de résistance à l'envolée des prix

Longtemps considérée comme le "comble de la ringardise" dans les quartiers huppés de Rio de Janeiro, la glacière en polystyrène s'est convertie en symbole branché de résistance aux prix abusifs pratiqués dans les bars à quatre mois du Mondial.

"Ce qui est ringard aujourd'hui, c'est de se faire arnaquer en payant une bière 10 réais (plus de trois euros)" dans un bar, affirme à l'AFP Guigga Tomaz, un vidéo-jockey (VJ) de 28 ans à l'origine du mouvement, en cet été austral où les températures avoisinent les 40°C.

La dynamique est simple et rappelle la tradition espagnole du "botellon" : on se donne rendez-vous entre amis sur une place ou à la plage. Et chacun apporte à boire et à manger dans sa glacière.

Dernier phénomène à la mode à Rio, "l'Isoporzinho" ("petite glacière", ndlr) s'intègre à un mouvement plus vaste d'appel au boycottage des prix qui ne cessent d'augmenter, sous l'effet de l'inflation générale dans le pays et de l'approche du Mondial de football (du 12 juin au 13 juillet) et des Jeux Olympiques de 2016.

Lancé mi-janvier, la page Facebook de ce mouvement baptisé le "Rio $urreal", un jeu de mot combinant "surréalisme" et "réal", la monnaie nationale, compte déjà plus de 180.000 adhérents.

"Si tu penses que la nouvelle monnaie de Rio est le $urreal, alors adhère à la campagne +NE PAYE PAS UN PRIX SURREAL+", annonce la page.

Elle est illustrée par des faux billets de fantaisie à l'effigie de Salvador Dali, le maître espagnol du surréalisme.

"Nous savons que ce sentiment d'abus sur les prix est général. S'il n'y a pas une réaction forte de la société, la tendance va empirer", affirme Daniela Name, la fondatrice du site.

Comme tout augmente bien au-dessus de l'inflation (5,9% en 2013), il ne se passe pas un jour sans que les internautes ne dénoncent sur internet toutes sortes d'abus : une cruche de jus d'ananas à 52 réais (16 euros) dans un restaurant du quartier de Santa Teresa ou un sandwich à 99 reais (30 euros) à Leblon.

"Quand je suis rentré de vacances, la bière était passée en 15 jours de 7,5 réais à neuf dans le bar que je fréquente. J'ai trouvé cela absurde et j'ai posté sur Facebook que j'allais commencer à utiliser une glacière", témoigne Guigga Tomaz.

Le mouvement "isoporzinho" est en train de gagner d'autres grandes villes comme Sao Paulo, Brasilia ou Manaus.

Lors d'un des premiers rendez-vous "glacière", le 23 janvier, "80 personnes sont venues, la plupart que je ne connaissais pas. On a remis ça et maintenant on est plus de 200 les week-ends", explique Guigga Tomaz.

Avec un salaire moyen de 615 euros par mois et des loyers qui peuvent augmenter jusqu'à 40% au renouvellement du bail, un vent de révolte souffle au milieu des glacières.

"C'est un acte politique, tout est trop cher, Rio est une ville chère et elle est gérée en fonction de ceux qui ont de l'argent", déplore Guigga.

Déborah Turturro a organisé un "Isoporzinho" sur la plage de Copacabana: "Cette bière dans un supermarché, elle coûte 1,89 real. Dans un bar, elle serait à six, sept ou huit réais", dit-elle.

"Grâce à ces rassemblements, il y aura moins de clients, moins de demande, et donc automatiquement les prix vont baisser", prévoit-elle.

Certains bars de Rio ont déjà baissé le prix de la bière de 15%.

Pour d'autres, comme le "Casa Brasil" sur la Place Sao Salvador, où la bière est à cinq reais, l'isoporzinho "ne change pas grand chose" : "On a nos clients habituels", affirme le gérant.

Depuis le début du mouvement, témoigne Guigga, "je ne suis plus jamais retourné dans un bar. On est mieux dehors. On peut circuler et interagir. On n'est pas limité par une table qui sépare les gens".

cdo/pal/hdz/glr

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.