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La justice allemande passe la main aux juges européens sur l'action de la BCE

La justice allemande passe la main aux juges européens sur l'action de la BCE

La Cour constitutionnelle allemande a émis des doutes vendredi sur le programme de la BCE pour lutter contre la crise de la dette publique qui a failli emporter la zone euro, mais a décidé de laisser la justice européenne trancher sur ce sujet délicat.

"De l'avis (de la Cour), d'importantes raisons plaident pour dire que (l'OMT) dépasse le mandat de la Banque centrale européenne en matière de politique monétaire", et notamment son interdiction de financer les Etats, écrit la Cour, qui siège à Karlsruhe (sud-ouest), dans son argumentaire.

Mais avant de rendre une décision attendue depuis de long mois par les marchés financiers, elle a décidé de "soumettre à la Cour de justice européenne plusieurs questions", une décision sans précédent.

"Cela pourrait être le signe soit que la Cour a atteint ses limites légales en matière de questions européennes ou alors que cette question est si épineuse et délicate qu'il vaut mieux déléguer", explique Carsten Brzeski, économiste chez ING.

L'OMT (outright monetary transactions), programme de rachat de dette publique adopté en septembre 2012 par la BCE, n'a jamais été appliqué jusqu'à présent.

Dans tous les cas, la BCE, qui a réagi vendredi en réaffirmant sa conviction d'agir dans le cadre de son mandat, va pouvoir un peu respirer, en attendant de nouvelles avancées sur ce dossier. Un retoquage de ce programme OMT risquait de réduire à néant tous les efforts menés depuis plus d'un an pour ramener le calme dans la zone euro.

"C'est plutôt une bonne nouvelle pour la BCE", a assuré à l'AFP une source européenne. Cela limitait d'ailleurs, vendredi matin, la baisse de l'euro face au dollar, tout de même un peu ébranlé par les commentaires de Karlsruhe, qui d'après Christian Schulz, économiste de Berenberg, "jette le doute sur la crédibilité de l'OMT".

En plein coeur de l'été 2012, le président de la BCE, Mario Draghi avait, en promettant de faire tout ce qui était en son pouvoir pour éviter une implosion de la zone euro, par cette seule phrase magique, amplement contribué à apaiser des marchés financiers au comble de la nervosité. Quelques semaines plus tard, cette promesse se concrétisait par l'annonce de ce programme OMT, qui consiste dans le rachat par l'institution monétaire de Francfort des obligations d'Etats en difficulté en quantité illimitée, si ceux-ci se plient au préalable à un plan d'aide.

La seule existence théorique de ce programme a suffi à faire redescendre les taux d'emprunt de pays comme l'Espagne ou la Grèce dans des zones raisonnables.

Il n'empêche qu'il a fait grincer pas mal de dents chez des eurosceptiques, dont certains ont saisi la Cour de Karlsruhe, mais aussi à la Bundesbank, la banque centrale allemande, fidèle à son rôle de héraut de l'orthodoxie monétaire.

La majorité des juges (six sur huit) s'est montré de leur avis, en estimant que le programme OMT allait à l'encontre de la souveraineté nationale des 18 pays de la zone euro dans le sens où ce sont eux qui devront supporter au final le risque pris par la BCE en rachetant cette dette publique de pays qui ne seront peut-être pas en capacité de rembourser.

Mais certains passages de sa décision semblent montrer "que la Cour n'est pas totalement convaincue par sa propre évaluation", relève M. Brzeski. En effet, les juges estiment toutefois "possible de parvenir à une conformité avec le droit par une interprétation restrictive de l'OMT".

Avec cette formule, la Cour allemande "offre à la Cour de justice européenne une sortie facile", considère Johannes Gareis, économiste chez Natixis.

En ce qui concerne un autre pan du plan de sauvetage de la zone euro, sur laquelle la Cour de Karlsruhe s'était penchée pendant deux jours d'audition en juin, à savoir le Mécanisme de stabilité européen, elle rendra sa décision le 18 mars. Les juges suprêmes avaient déjà rendu un premier jugement de conformité à la constitution allemande à l'automne 2012.

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