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Pakistan : début des pourparlers entre les talibans et le gouvernement

Pakistan : début des pourparlers entre les talibans et le gouvernement

Les pourparlers entre le gouvernement pakistanais et les talibans locaux du TTP visant à mettre fin à sept années d'une insurrection islamiste armée ont débuté jeudi à Islamabad inspirant davantage de pessimisme que d'espoir.

Il s'agit de la première rencontre entre les médiateurs du gouvernement et ceux des rebelles islamistes depuis que le Premier ministre Nawaz Sharif a décidé, la semaine dernière, de donner une "autre chance" à la paix après la rupture en novembre de contacts préliminaires avec les insurgés après la mort de leur chef Hakimullah Mehsud par une frappe de drone américain.

Cette déclaration surprise du Premier ministre avait douché les espoirs d'une offensive militaire imminente dans les fiefs talibans du Nord-Ouest, appelée de leurs voeux par l'intelligentsia libérale.

"La rencontre s'est déroulée dans une atmosphère cordiale. Nous partageons un point commun : notre objectif envers la paix pour le pays à la lumière du message de l'islam", a déclaré après la rencontre le négociateur en chef du gouvernement, Irfan Siddiqui.

Les rebelles du Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP), un regroupement de factions islamistes armées à l'origine de centaines d'attentats meurtriers depuis sa création en 2007, militent pour l'imposition de la loi islamique (charia) dans ce pays musulman de plus de 180 millions d'habitants.

"Sans la charia, il n'y a pas même 1% de chance que les talibans acceptent un accord", a déclaré cette semaine à l'AFP le mollah Abdul Aziz, l'un des trois médiateurs talibans.

Au Pakistan, la cour islamique fédérale a déjà pour mandat de s'assurer que les lois du pays se conforment au Coran ainsi qu'aux dires et aux actes du prophète Mahomet.

Lorsqu'une loi enfreint les principes de l'islam, selon ses juges, la cour doit demander aux élus d'amender la législation. "Mais ces tribunaux sont trop faibles" et ne mettent pas véritablement en oeuvre la loi de Dieu, selon les négociateurs des insurgés.

Les médiateurs du gouvernement ont réitéré jeudi que ces pourparlers devaient respecter la Constitution.

"Le gouvernement va prétendre que techniquement le pays est déjà un Etat islamique" et pourrait suggérer d'évaluer les lois pour les rendre conformes à la charia, estime l'analyste Ayesha Siddiqa. Chaque fois que les autorités ont tenté "d'apaiser" les islamistes, le pays "a glissé encore plus vers la théocratie", prévient-elle.

Autre incertitude : le conflit en Afghanistan voisin. Les pourparlers pakistanais sont considérés par nombre de commentateurs comme une façon polie de "gagner du temps" par les talibans et le gouvernement à l'approche du retrait des forces de l'Otan du sol afghan, échéance cruciale pour toute la région.

Les Etats-Unis souhaitent maintenir une force résiduelle en Afghanistan après 2014, mais le président afghan Hamid Karzaï refuse pour le moment de signer l'accord de sécurité bilatéral (BSA) garantissant le maintien de soldats américains après cette échéance.

"Si les Américains restent en Afghanistan, il n'y aura pas de paix possible dans la région, la situation sera la même, instable", a toutefois averti le mollah Sami ul-Haq, négociateur en chef des talibans pakistanais.

Considérant la position des insurgés sur la loi islamique et la présence occidentale dans la région, "je ne vois pas d'accord possible" avec le gouvernement, estime Saifullah Khan Mehsud, directeur du centre de recherches sur les zones tribales, fief taliban dans le nord-ouest du pays.

Par ailleurs, les négociateurs des deux camps ont appelé l'armée et les talibans, qui n'ont pas signé de cessez-le-feu, à faire preuve de retenue afin de ne pas compromettre ces discussions.

Le commandement central des talibans s'était dissocié cette semaine d'un attentat suicide ayant fait huit morts à Peshawar, grand carrefour aux portes de l'Afghanistan.

Mais une faction rebelle avait ensuite revendiqué l'attaque, ce qui suggère des dissensions profondes au sein de la rébellion islamiste à propos de cette nouvelle initiative de paix.

"Je ne sais pas si les talibans logent à la même enseigne à propos de ces pourparlers et quelles factions les négociateurs représentent vraiment et par conséquent s'ils peuvent garantir un cessez-le-feu", a ajouté M. Mehsud.

"Il y a des groupes au sein des talibans qui prennent leurs propres décisions" et pourraient rapidement faire capoter le processus de paix, a-t-il souligné.

gl-bur/ml

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