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Mali: des communautés s'engagent publiquement à abandonner l'excision

Mali: des communautés s'engagent publiquement à abandonner l'excision

Des représentants de 14 communautés du Mali ont publiquement annoncé jeudi à Bamako leur décision d'abandonner l'excision à l'occasion de la journée mondiale contre cette pratique toujours répandue dans ce pays majoritairement musulman, a constaté un journaliste de l'AFP.

"Nous, représentants de 14 communautés (des ethnies) bambara, peuhl, songhaï, dogon, bobo, minianka et sénoufo de Yirimadio", dans la banlieue de Bamako, "prenons l'engagement solennel en toute connaissance de cause d'abandonner la pratique de l'excision, des mariages précoces et forcés des filles au sein de nos communautés", a déclaré leur porte-parole, Moussocoura Sidibé, lors d'une cérémonie officielle dans un stade de la capitale malienne.

Les quatorze communautés concernées représentent environ un millier de personnes, selon l'ONG Tostan, à l'origine avec le gouvernement malien de cette manifestation. La cérémonie, qui s'est déroulée en présence de plusieurs centaines de personnes, a été marquée par des sketches et des animations musicales.

Fanta Kourouma, une mère de famille de Yirimadio, a raconté à l'AFP s'être engagée depuis 1982 dans la lutte contre l'excision pour en avoir été "victime" tout comme ses filles.

"J'ai perdu une fille à cause de l'excision. J'ai une deuxième fille", aujourd'hui étudiante, "qui vit encore avec des séquelles. (...) Je suis très fière de ce qui se passe aujourd'hui dans mon propre quartier", a-t-elle dit, émue.

Cette déclaration officielle d'abandon de l'excision est le fruit de plusieurs années de sensibilisation ayant visé "90 associations de femmes à Yirimadio" et Tostan a sollicité l'appui des chefs coutumiers et des autorités de la zone, a expliqué à l'AFP Mme Mah Cissé, coordinatrice de cette ONG au Mali.

"Nous avons rencontré beaucoup de difficultés (dans le processus), parce qu'il n'est pas facile de changer les comportements des populations", a indiqué Mme Cissé.

Youssouf Bagayogo, chef du programme national de lutte contre l'excision, s'est félicité de la déclaration officielle, saluant les "bons résultats du processus" de sensibilisation sur les conséquences des mutilations génitales féminines.

"Au Mali, plus de 800 villages ont complètement abandonné la pratique de l'excision. Dans un passé récent, 30 communautés (l')ont abandonné à Koulikoro (environ 60 km au nord-est de Bamako) grâce aux actions engagées par Tostan. (...) Bientôt, le gouvernement va pouvoir légiférer sur l'interdiction de la pratique", a déclaré M. Bagayogo, sans fournir de calendrier.

Plus de 125 millions de filles et de femmes dans le monde ont subi des mutilations génitales, et que plus de 100 millions d'entre elles vivent en Afrique, a estimé jeudi l'ONG pour les droits de l'enfant Plan International dans un communiqué transmis à l'AFP par son bureau régional, basé à Dakar.

"Une enquête nationale de santé au Mali en 2006 a montré que plus de 85% des femmes entre 15 et 45 ans dans le pays avaient été excisées", a indiqué Plan International.

Avec près de 16 millions d'habitants, le Mali est musulman à environ 95%. L'excision y est toujours pratiquée, en dépit de nombreuses campagnes de sensibilisation et l'islam figure parmi les raisons fournies par certaines communautés pour la justifier.

Un chef religieux musulman malien, l'imam Diallo, a affirmé que la plupart des populations croient respecter un devoir islamique en faisant subir des mutilations génitales à leurs filles et femmes, alors que cela n'est pas exigé par l'islam.

"L'excision est une pratique dangereuse qu'il convient d'abandonner au plus vite. Nous avons interrogé le Coran, la parole sainte, nous avons trouvé (...) plein d'enseignements qui rejettent cette mutilation génitale", a déclaré l'imam Diallo.

Au Sénégal, pays voisin du Mali, une loi interdisant l'excision a été adoptée en 1999, mais la pratique y persiste, dans des proportions toutefois inférieures à ce qui se fait dans la région, d'après des acteurs de terrain.

"Malgré les législations locales et internationales, la pratique se poursuit et 30 millions de filles courent le risque d'être excisées d'ici les dix prochaines années", a prévenu Plan International dans son communiqué.

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