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Les investisseurs boudent la France, selon un rapport de l'ONU

Les investisseurs boudent la France, selon un rapport de l'ONU

Les investisseurs étrangers boudent la France, plébiscitent l'Allemagne et les pays émergents quand ils ne se ruent pas sur les paradis fiscaux: c'est le tableau dressé mercredi dans un rapport des Nations unies, qu'il faut toutefois manipuler avec précaution.

Tous les ans, la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED) établit un classement des destinations favorites des investissements directs étrangers (IDE), destinés par exemple à racheter des entreprises ou ouvrir des usines, mais qui peuvent aussi être des opérations comptables entre filiales d'un même groupe.

Les IDE sont des "investissements internationaux par lesquels des entités résidentes d'une économie acquièrent ou ont acquis un intérêt durable dans une entité résidente d'une économie autre que celle de l'investisseur", selon la Banque de France.

Ce caractère "durable" permet de distinguer les IDE des "investissements de portefeuille", flux purement financiers et plus fluctuants.

L'édition 2013 du rapport de la CNUCED livre un chiffre frappant pour la France, où les IDE se sont effondrés de 77% en 2013 par rapport à 2012, à 5,7 milliards de dollars.

Au total, la CNUCED a estimé à 1.460 milliards de dollars le montant des IDE dans le monde l'an dernier, en hausse de 11%.

Elle note que les flux vers les pays développés, bien qu'en hausse, restent "historiquement bas", 39% du total, sans retrouver leur montant de 2007. Les IDE vers les pays en développement ont au contraire atteint "un nouveau plus haut à 759 milliards de dollars", 52% du total. Avec toutefois certains pays moins demandés, comme la Turquie "qui n'a connu l'an dernier aucun IDE de grande ampleur".

Sur le continent européen, le tableau est contrasté: si les investissements étrangers en France se sont effondrés, ils ont au contraire bondi de 392% à 32,3 milliards vers l'Allemagne, c'est-à-dire quasiment quintuplé, et de 37% vers l'Espagne (37,1 milliards).

Ce sont aussi des stratégies fiscales qui ont la primauté en Europe: les investissements cumulés vers quatre pays à "la fiscalité accueillante" selon la CNUCED (Belgique, Irlande, Pays-Bas et Luxembourg) ont augmenté l'an dernier de plus de 100 milliards de dollars, un chiffre énorme par rapport à leur petite taille.

Le Luxembourg se retrouve en 2013 à la 15e place du classement des destinations préférées des investissements étrangers, avec 31 milliards de dollars, à peine un milliard de moins que le géant industriel allemand.

Hors Europe, le même phénomène explique par exemple le bond de 37,8% l'an dernier des investissements vers les Caraïbes, "imputable principalement aux Iles vierges britanniques". Ce paradis fiscal était la quatrième destination mondiale d'investissements directs en 2013, derrière les Etats-Unis, la Chine et la Russie.

La Conférence des Nations unies estime qu'en 2014 et 2015 les investissements directs étrangers "pourraient continuer à augmenter" pour atteindre 1.600, puis 1.800 milliards de dollars, mais souligne les risques liés au durcissement en cours de la politique monétaire américaine.

Pour Christophe Destais, directeur-adjoint du centre de recherche économique CEPII, les chiffres de la CNUCED "peuvent être un bon thermomètre au niveau agrégé", au niveau des grandes masses, mais "il faut les aborder avec beaucoup de précaution" quand il s'agit de conclusions plus détaillées.

Le chercheur invite ainsi à ne pas "exagérer" la variation constatée pour la France ou pour tout autre pays particulier, en relevant que beaucoup d'investissements suivent des chemins extrêmement complexes, des processus de décision longs et que par ailleurs il suffit d'une grosse acquisition pour changer radicalement le tableau d'une année sur l'autre.

Ainsi en 2013, un énorme rachat dans la bière, celui du mexicain Grupo Modelo par le belge AB InBev, explique presque à lui seul le doublement des IDE en Amérique centrale.

M. Destais souligne par ailleurs que les paradis fiscaux, outre leur fonction dans des schémas d'optimisation fiscale, servent aussi "de pivots pour des investissements dans d'autres pays" ou "des contrats de sous-traitance", lesquels n'apparaissent pas dans les statistiques.

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