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Le Pakistan donne "une autre chance" au dialogue avec les talibans

Le Pakistan donne "une autre chance" au dialogue avec les talibans

Le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif a réitéré mercredi sa proposition de dialogue de paix avec les talibans, sourd aux appels en faveur d'une offensive militaire contre des rebelles qui ont multiplié les attentats dernièrement.

Interrogé par l'AFP après cette annonce, un porte-parole du Mouvement des talibans du Pakistan (TTP) a indiqué que les rebelles étaient ouverts à des négociations "sincères" mais devaient d'abord se réunir pour y répondre.

Appelant les rebelles à un cessez-le-feu, M. Sharif a annoncé la formation d'un comité destiné à enclencher enfin le dialogue de paix qu'il cherche à établir avec le TTP depuis son retour au pouvoir en mai dernier.

Ces déclarations n'ont pas apaisé dans l'immédiat le flot de critiques qui se sont abattues ces dernières semaines sur son gouvernement, accusé de manquer de fermeté tandis qu'au moins 114 personnes ont été tuées dans des attentats depuis le début de l'année (décompte de l'AFP).

Quelques heures plus tôt, trois attentats à la bombe revendiqués par le TTP et visant des membres des forces de sécurité ont fait au moins quatre morts à Karachi, la mégalopole du sud, selon les autorités locales.

Dans son discours devant le Parlement, M. Sharif a d'abord rendu un vibrant hommage aux victimes du terrorisme dans le pays. "Des citoyens lambda sont visés, nos enfants innocents meurent" et "la société vit dans la peur", a-t-il souligné.

Dénonçant le rejet par les talibans de sa première offre de dialogue, il les a également accusés de travestir les enseignements de l'islam, avant d'ajouter: "Notre existence même est menacée. Nous ne pouvons pas rendre la nation et le pays otages des rebelles".

"Je sais qu'aujourd'hui, si l'Etat veut éliminer les terroristes par la force, la nation entière le soutiendra. Mais comme la proposition de dialogue a également été émise par l'autre partie, nous voulons donner une autre chance à une solution de paix", a-t-il poursuivi.

"Nous attendons une assurance de la part des talibans qu'ils ne commettront aucune violence qui pourraient saboter les négociations", a expliqué à l'AFP Irfan Siddiqui, un membre du comité de quatre personnes chargé par M. Sharif de faciliter les négociations.

"Nous sommes prêts à de vraies négociations à condition que le gouvernement soit sincère dans le but recherché ", a aussitôt réagi auprès de l'AFP le porte-parole du TTP, Shahidullah Shahid, ajoutant que le conseil central du mouvement était en réunion pour étudier la déclaration de M. Sharif.

Nawaz Sharif prône le dialogue avec le TTP pour mettre fin à ses attaques qui ont tué près de 7.000 personnes dans le pays depuis 2007. Mais rares sont ceux qui estiment un accord possible au vu des demandes actuelles du TTP.

Ce dernier a jusqu'ici souligné qu'il n'accepterait de discuter que si l'armée libère ses prisonniers et se retire de ses bastions des zones tribales du nord-ouest, et si les Etats-Unis cessent leurs tirs de drones qui y visent et tuent régulièrement ses combattants et ses alliés d'Al-Qaïda.

Or peu d'observateurs jugent qu'Islamabad et Washington seraient prêts à accepter ces conditions, de surcroît à l'entame d'une année qui s'annonce cruciale (élection présidentielle, retrait de la grande majorité de la force de l'Otan) pour la stabilité de l'Afghanistan voisin des zones tribales.

Autre membre du comité de négociation nommé par M. Sharif, l'ancien diplomate Rustam Shah Mohmand, a, quant à lui, déclaré à l'AFP qu'"Il est difficile d'être optimiste quant à la réussite (du processus) au vu de la très forte méfiance actuelle entre les deux parties".

Après les derniers attentats du TTP, les médias libéraux et l'opposition menée par Bilawal Bhutto Zardari, fils de l'ancien Premier ministre assassinée Benazir Bhutto, avaient appelé ces derniers jours le gouvernement à lancer enfin une grande offensive militaire pour neutraliser le TTP, notamment dans son fief principal du Waziristan du Nord.

Washington pousse depuis des années Islamabad à lancer une telle opération dans cette zone tribale qui est également le principal refuge d'Al-Qaïda dans la région, ainsi qu'une important base arrière des talibans afghans qui combattent Kaboul et l'Otan de l'autre côté de la frontière.

Mais le Pakistan s'est jusqu'ici gardé de se lancer une offensive qui pourrait provoquer des attentats encore plus sanglants du TTP chez lui, mais aussi déstabiliser des talibans afghans à qui il est historiquement lié, même si ces liens sont décrits comme fluctuants en fonction des intérêts de chacun.

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