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Electricité: l'Europe menacée de disjoncter

Electricité: l'Europe menacée de disjoncter

Prix incohérents, retour du charbon polluant, politiques mal calibrées, risque croissant de black-out malgré des surcapacités de production: en Europe, gouvernements et énergéticiens cherchent à corriger un marché de l'électricité qui menace de disjoncter.

Trois pistes sont sur la table.

Le "marché carbone" (ETS), un système de quotas et d'échanges d'émissions de tonnes de CO2, devait être la "pierre angulaire" de la politique européenne. Mais avec un prix qui navigue depuis près de deux ans à des niveaux très faibles (autour de 5 euros la tonne), l'incitation est trop faible pour se tourner vers des énergies moins émettrices.

"La première priorité, c'est de rétablir un signal carbone", a souligné cette semaine le patron de l'influente direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) française, Pierre-Marie Abadie.

Avec un prix du CO2 faible, les producteurs européens d'électricité ont intérêt à se tourner vers le charbon, dont le prix a en outre chuté avec l'émergence du gaz de schiste aux Etats-Unis.

Après des mois de négociations - certaines industries comme la chimie étaient contre -, un accord a été trouvé en novembre à Bruxelles pour retirer 900 millions de quotas ces trois prochaines années.

"Est ce que ça sera suffisant? Probablement non", explique Benoît Leguet, directeur de la recherche de la filiale "verte" de la Caisse des dépôts (institution publique française), CDC Climat.

Dans sa proposition de paquet "énergie-climat" pour 2030 présentée la semaine dernière, la Commission européenne propose d'accentuer (à 2,2% par an) la baisse annuelle du nombre de quotas alloués.

Une autre piste serait d'instaurer un prix-plancher, voire de basculer vers une "taxe carbone" fixe, mais un consensus européen n'a pas encore émergé.

Pour que les centrales au gaz redeviennent compétitives par rapport au charbon, la tonne de CO2 devrait valoir 30 à 40 euros, selon des experts.

Revoir les aides aux renouvelables : C'est une des revendications des grands énergéticiens européens (EDF, GDF Suez, RWE, EON, Iberdrola, Enel, Vattenfall...) et qui inquiète les partisans des énergies vertes.

Dans le viseur: les "tarifs d'achat" subventionnés dont bénéficie l'électricité éolienne et photovoltaïque dans plusieurs pays, qui passe en priorité sur le réseau.

Ces privilèges contribuent à faire baisser davantage les prix de marché, déjà mal orientés du fait de la crise économique. Tout en alourdissant la note pour les ménages et les entreprises, plaident les groupes.

Cette ligne semble marquer des points, même si la Commission vient de retenir un nouvel objectif d'énergies renouvelables pour 2030 (27%). En Allemagne, où les prix de l'électricité ont doublé en 10 ans, le nouveau gouvernement d'Angela Merkel a annoncé la semaine dernière des coupes conséquentes dans le soutien aux renouvelables. Et en 2017 au plus tard, les producteurs d'électricité verte devront vendre au prix du marché.

L'Espagne, exsangue budgétairement, a brutalement inversé mi-2013 sa politique de soutien aux énergies renouvelables.

En France, qui pourrait aussi abandonner progressivement les "tarifs de rachat", un rapport officiel publié mardi a appelé à y renoncer pour les technologies "matures" comme l'éolien terrestre et le photovoltaïque.

Payer une centrale électrique, même quand elle ne produit pas ou peu? L'idée du "mécanisme de capacité" s'impose peu à peu, l'Allemagne étant la dernière en date à se joindre au mouvement.

Sur un réseau électrique, l'offre de courant doit en permanence être adaptée à la demande, ce qui implique d'avoir de la production rapidement mobilisable (hydroélectricité et centrales au gaz, principalement) pour aider à passer les pics de demande, où à faire face à une chute de la production aléatoire des éoliennes et des panneaux solaires.

Or, du fait de la crise du système électrique européen, "sur tout le continent, il n'y a pas une seule centrale à gaz qui gagne de l'argent", a constaté la semaine dernière le dirigeant de l'allemand EON, Leonhard Birnbaum.

La disparition du marché de ces capacités - qui devraient atteindre 38 gigawatts d'ici à 2015 selon les industriels - accroît fortement le risque de pénurie et d'un "black-out" catastrophique.

Il s'agirait donc de rémunérer certaines capacités disponibles, comme c'est déjà le cas dans quelques pays européens (Irlande, Grèce, Espagne, Portugal, Suède, Finlande). Royaume Uni, France, Italie et Allemagne sont attendus dans cette voie dans les années à venir.

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