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La banque centrale turque prête à augmenter ses taux pour sauver la livre

La banque centrale turque prête à augmenter ses taux pour sauver la livre

La banque centrale turque doit annoncer mardi soir la hausse des taux d'intérêt attendue depuis des semaines par les marchés pour endiguer la dégringolade continue de la livre qui pèse sur l'économie, contre l'avis du gouvernement.

Quelques heures avant la réunion d'urgence de son comité de politique monétaire, le gouverneur de la banque Erdem Basci a clairement ouvert la voie à un changement de stratégie passant par une hausse des taux.

"Personne ne doit douter que la banque centrale utilisera tous les moyens à sa disposition (...) la banque n'hésitera pas à prendre des mesures durables pour resserrer sa politique monétaire si c'est nécessaire", a déclaré M. Basci, qui présentait devant la presse ses prévisions révisées à la hausse pour l'inflation en 2014.

Convoquée lundi en pleine dégringolade de la devise nationale, la réunion exceptionnelle du comité de politique monétaire doit dévoiler son nouvel arsenal à 22h00 GMT, sous la forme d'un communiqué.

Après l'échec patent de ses précédentes stratégies, tous les analystes tablent sur une hausse "agressive" de plusieurs points du taux d'intérêt au jour le jour, actuellement fixé à 7,75%.

"Nous pensons qu'une hausse des taux doit faire entrer résolument les taux à court terme dans la zone des deux chiffres", a recommandé Inan Demir, de la Finansbank. "Refaire du taux repo à une semaine l'instrument privilégié de la politique monétaire et le faire passer de 4,5 à 10% serait un bon départ", a renchéri Neal Shearing de Capital Economics.

Dans l'attente de la réunion, la devise nationale s'est raffermie mardi, s'échangeant en fin de journée à 2,2658 LT pour un dollar et à 3,0947 LT pour un euro, nettement au-dessus des planchers historiques de 2,39 LT et 3,27 LT atteints lundi en fin de matinée.

Depuis la mi-2013, la livre a perdu plus de 30% depuis la mi-2013.

Affectée comme les monnaies des autres pays émergents par le resserrement de la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed), elle subit de plein fouet depuis plus d'un mois les effets de la crise politique causée par le scandale de corruption qui éclabousse le régime islamo-conservateur, au pouvoir depuis 2002.

Depuis des semaines, la banque centrale a tenté vainement de soutenir la livre en injectant des liquidités par voie d'adjudication. Elle est même intervenue jeudi directement sur les marchés, pour la première fois depuis deux ans, sans plus de résultat.

Malgré le consensus des analystes en faveur d'une hausse des taux, la banque a jusque-là refusé d'y recourir, sous les pressions du gouvernement qui redoute d'affecter la croissance du pays et de creuser un peu plus ses déficits publics (plus de 7%).

Depuis des semaines, tous les ministres multiplient les signes rassurants sur l'économie, évoquant une crise "passagère". "L'économie turque est robuste et continuer à se développer de façon durable", a lui-même assuré mardi le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan lors de sa harangue hebdomadaire devant les députés de son parti.

Mardi matin, le quotidien pro-gouvernemental Yeni Safak a lui aussi déconseillé le recours à l'arme des taux. "Soyez forts, ne les augmentez pas", a-t-il intimé.

"La banque centrale est indépendante et peut rendre des comptes", lui a répondu le gouverneur de la banque centrale mardi.

Nouveau signe de l'urgence de la situation, M. Basci a annoncé mardi une révision à la hausse de sa prévision d'inflation pour l'année 2014, de 5,3% à 6,6%, se rapprochant ainsi des estimations de la plupart des analystes.

"L'inflation en Turquie est à un niveau élevé (6,2% en 2012 et 7,4% en 2013) et, avec les hausses d'impôts et la faiblesse de la livre, elle va probablement rester forte cette année", a confirmé William Jackson, de Capital Economics.

Si le gouvernement turc persiste pour l'instant à maintenir à 4% sa prévision de croissance pour 2014, la plupart des analystes l'ont déjà revue à la baisse et anticipent un ralentissement de l'activité. Les plus pessimistes agitent même le spectre de la grave crise financière de 2000-2001, qui avait nécessité une intervention urgente du FMI.

Comme le souligne Kathleen Brooks, de Forex.com, la Turquie cumule deux facteurs d'incertitudes: "des fondamentaux économiques instables, notamment de forts déficits" et un "risque politique important".

BA-pa/bir

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