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Les soldats traumatisés de 14-18 sortent de l'oubli

Les soldats traumatisés de 14-18 sortent de l'oubli

De "l'obusite" de la guerre de 1914-18 au "syndrome du stress post-traumatique" de l'Irak, les troubles mentaux des soldats ont profondément marqué les conflits depuis un siècle, comme en témoigne une exposition choc en Belgique.

"Guerre et trauma", qui se tient à Gand (nord) jusqu'en juin, ne montre pas de soldats partant fièrement au front ni de héros célébrant la victoire, drapeau au vent.

Au contraire, les tableaux, sculptures et vidéos exposés sont uniquement peuplés de "gueules cassées" ou de combattants hagards, comme ce GI au regard totalement vide immortalisé par le célèbre photographe Don McMullin au Vietnam.

Organisée l'année du centenaire de la Grande Guerre, cette exposition "se penche sur les souffrances de ceux qui ont directement subi ce conflit et les suivants", explique Patrick Allegaert, son directeur artistique.

Le visiteur est rapidement plongé dans l'ambiance puisque le musée qui l'accueille est installé dans le plus ancien hôpital psychiatrique de Belgique, dont une partie est toujours en activité.

Il y a un siècle, y ont séjourné des soldats victimes de tremblements irrépressibles, de cauchemars et troubles du comportement. Inconnue jusqu'alors, cette maladie mentale a été surnommée "obusite" en référence au choc causé par les explosions d'obus sur les champs de bataille et les tranchées de France ou de Belgique.

Les soldats victimes d'"obusite" étaient souvent traités de "lâches" ou de "simulateurs", certains d'entre eux étant même exécutés pour désertion.

Au front, "le sort des individus était toujours subordonné à celui du groupe. De ce fait, les traumatismes psychologiques étaient considérés et traités comme des problèmes de discipline" par la hiérarchie militaire, souligne M. Allegaert.

Cette attitude a progressivement évolué au cours du XXe siècle jusqu'aux guerres d'Irak et d'Afghanistan. L'explosion du nombre d'anciens combattants affectés par des troubles de stress post-traumatique (SSPT) est ainsi devenu un enjeu de santé majeur aux Etats-Unis ces dernières années.

Même s'il reste difficile à déceler et à traiter, "ce type de traumatisme est aujourd'hui mieux pris en compte par la médecine. Et la notion de SSPT a été reprise dans la liste des pathologies du manuel DST, considéré comme la +bible+ des psychiatres, depuis les années 1980", indique M. Allegaert.

Pour illustrer les dégâts psychologiques liés au stress du combat, l'exposition présente des oeuvres fortes, parfois à la limite du soutenable. A l'image de cette fanfare composée de cinq statues grandeur nature de "gueules cassées", atrocement défigurées, qu'a réalisée l'artiste anglais Eleanor Crook.

Parmi les peintures, figure un autoportrait "halluciné" de l'artiste belge Rick Wouters, profondément marqué par sa courte expérience sur le front à Liège. "La vue de tous ces jeunes décédés m'a rendu fou", écrit le peintre en 1915.

L'une des oeuvres les plus frappantes est la fresque "The sacrifice": soixante photos de corps ensanglantés et de blessés angoissés prises dans les salles d'opération de l'armée américaine en Irak par le célèbre photographe James Nachtwey en 2006.

"Guerre et trauma, des soldats et des psychiatres", jusqu'au 30 juin, musée du docteur Guislain à Gand (Belgique), www.Museumdrguislain.be

jri/aje/mf

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