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L'état d'urgence imposé à Bangkok pour faire face aux manifestations

L'état d'urgence imposé à Bangkok pour faire face aux manifestations

La Thaïlande a annoncé mardi l'instauration de l'état d'urgence à Bangkok pour faire face au mouvement de rue réclamant depuis plus de deux mois la chute du gouvernement, à l'approche des législatives du 2 février que les manifestants ont promis d'empêcher.

L'état d'urgence, qui entre en vigueur mercredi pour 60 jours dans la capitale et sa proche banlieue, donne plus de pouvoirs aux autorités qui ont toutefois promis de ne pas mettre un terme au mouvement par la violence.

"Nous n'utiliserons pas la force. Nous n'avons pas de politique pour disperser (les manifestants), nous n'avons pas annoncé de couvre-feu pour l'instant", a déclaré Chalerm Yubamrung, ministre du Travail chargé de superviser l'application de l'état d'urgence, assurant que la Thaïlande respecterait les règles internationales.

Cette décision intervient après plusieurs incidents violents ces derniers jours et plus de deux mois d'une crise qui a fait au total neuf morts, la plupart abattus dans des circonstances troubles.

Des grenades et des tirs ont visé vendredi et dimanche la foule des manifestants, faisant un mort et des dizaines de blessés. Les deux camps se sont rejeté la responsabilité des attaques.

Les Etats-Unis, alliés militaires de la Thaïlande, ont "condamné avec force (...) la poussée de violences à Bangkok", mais le département d'Etat n'a pas fait mention, dans son communiqué, de l'état d'urgence, se contentant d'exhorter les deux camps à "résoudre leurs différends de manière pacifique et démocratique".

Les manifestants, alliance hétéroclite des élites de Bangkok, d'ultra-royalistes et d'habitants du Sud, réclament la tête de la Première ministre Yingluck Shinawatra et la fin du "système Thaksin", du nom de son frère Thaksin Shinawatra, qu'ils associent à une corruption généralisée et qu'ils accusent de gouverner depuis son exil à Dubaï.

L'ancien chef du gouvernement, qui reste le personnage central de la politique du royaume, a été renversé en 2006 par un coup d'Etat, engluant la Thaïlande dans des crises à répétition, mettant en lumière la division du pays entre ceux qui l'adorent et ceux qui le haïssent.

Les manifestants ont lancé la semaine dernière une opération de "paralysie" de Bangkok qui s'est depuis essoufflée, même si plusieurs grands carrefours de la capitale sont toujours occupés.

Leur meneur Suthep Thaugsuban, ancienne figure du Parti démocrate, principal parti d'opposition, a promis que l'état d'urgence n'arrêterait pas le mouvement. "Nous n'avons pas peur (...). Nous n'arrêterons pas", a-t-il déclaré devant ses partisans, assurant que les manifestants étaient "sans arme et les mains vides".

Les militants, qui veulent remplacer le gouvernement par un "conseil du peuple" non élu, sont décidés à empêcher les législatives du 2 février convoquées par Yingluck pour sortir de l'impasse. Un scrutin dont le parti au pouvoir est une nouvelle fois favori, et que le Parti démocrate boycotte.

Malgré tout, la décision a été prise de ne pas donner à l'armée les premiers rôles dans l'état d'urgence, pour "éviter les violences de 2010", a déclaré Yingluck.

Jusqu'à 100.000 "chemises rouges" pro-Thaksin avait alors occupé le centre de Bangkok pendant deux mois pour réclamer le départ du gouvernement Démocrate, avant un assaut de l'armée.

La crise, lors de laquelle l'état d'urgence avait été invoqué, avait fait plus de 90 morts et 1.900 blessés. Et Suthep, vice-Premier ministre à l'époque, est poursuivi pour meurtre pour son rôle dans cette répression.

L'état d'urgence donne en principe aux autorités la possibilité d'interdire les rassemblements, de détenir un suspect sans accusations pendant 30 jours et de censurer les médias, mais le gouvernement n'a pas précisé à ce stade quelles mesures seraient utilisées.

La question est de savoir si les manifestants respecteront les nouvelles règles, quelles qu'elles soient.

"Ca peut aller dans les deux sens. Si vous pensez que les manifestants veulent inciter à la violence pour créer les conditions d'une intervention (militaire), alors ils vont probablement pousser encore plus et défier l'état d'urgence", a commenté Pavin Chachavalpongpun, de l'université de Kyoto.

"D'autant plus que Suthep commence à manquer de temps avant les élections", a-t-il ajouté, notant que l'état d'urgence pouvait aussi être vu "comme un signe que le gouvernement est un peu désespéré dans sa tentative de contrôler les violences des derniers jours".

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