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L'Allemagne courtise les médecins étrangers mais la langue reste un obstacle

L'Allemagne courtise les médecins étrangers mais la langue reste un obstacle

L'Allemagne dépend de plus en plus de médecins étrangers pour combler les besoins des services de santé, mais la barrière de la langue complique la prise en charge des patients.

Si les modalités administratives ont été simplifiées pour attirer ces compétences, des voix s'élèvent pour réclamer que soit fixé un niveau suffisant de maîtrise de l'allemand pour communiquer correctement avec les malades.

"C'est un problème grandissant en Allemagne", a expliqué à l'AFP Hartwig Meyer, un avocat à la tête de l'Association de protection des patients allemands. "Il y a beaucoup de médecins qui arrivent de l'étranger, et leur niveau d'allemand est très faible".

D'après l'Ordre des médecins, en 2012, 15% des praticiens en Allemagne étaient nés à l'étranger, contre 5% en 2007. La perspective de rémunérations plus attractives que dans leur pays d'origine, combinée à un désert médical grandissant dans les petites villes et les zones rurales allemandes ont attiré des médecins de Grèce, Roumanie et Pologne, notamment.

Mais les médias ont fait état de plusieurs litiges survenus avec des patients, comme Volker Mikat, 49 ans, un habitant de Gütersloh (ouest) qui a attaqué en justice l'hôpital où il a été opéré de l'estomac, affirmant qu'il avait été mal informé des risques de l'opération.

"Quand j'ai demandé (au médecin) quelles étaient les alternatives (à l'opération), il n'a rien pu me répondre, je pense que c'est parce qu'il ne me comprenait pas", a raconté M. Mikat à la chaîne de télévision publique ARD, qui n'a pas dévoilé la nationalité du médecin mis en cause.

Hartwig Meyer affirme recevoir régulièrement de telles plaintes.

Beaucoup d'étrangers apprenant l'allemand se plaignent de la complexité de la langue, un obstacle majeur à l'immigration dans une Allemagne qui tente de combler une pénurie de travailleurs qualifiés liée à sa démographie déclinante.

La docteure iranienne Hengameh Bigdeli, 45 ans, a pris un cours intensif de six mois avant de commencer à travailler près de Nuremberg (sud). "Quand j'ai commencé à travailler, j'avais vraiment peur qu'il y ait une urgence et que je ne sois pas capable de comprendre le patient, confie-t-elle. Mais quand j'ai eu un problème, j'ai demandé aux patients de répéter, de parler lentement, et ils ont répété et répété jusqu'à ce que je comprenne".

"C'est dur pour les patients, parce qu'ils ont peur que leur médecin ne les comprenne pas", a témoigné pour l'AFP Armin Ehl, directeur général de l'association des médecins de Marbourg, une ville de la Hesse, l'Etat régional de Francfort (ouest).

"Il y a des services dans des hôpitaux en zone rurale où, à part le médecin-chef, il n'y a que des étrangers", a expliqué à l'AFP ce praticien qui milite pour un test de langue national standardisé pour les médecins immigrés.

En Grande-Bretagne, un patient est décédé en 2008 après avoir reçu une surdose d'antalgiques de la part d'un médecin allemand qui débutait dans le pays. Les autorités britanniques ont décidé l'an dernier de faire passer un test d'anglais aux médecins de pays non anglophones.

En Allemagne, le niveau de langue exigé est fixé de façon indépendante par chaque Etat régional. D'après M. Ehl, la plupart exigent au minimum un certificat de niveau européen B2 --soit un niveau intermédiaire-supérieur, équivalent à celui d'un bachelier en première langue--, mais aucun test portant sur la terminologie médicale.

"Si quelqu'un a un niveau B2, il peut sûrement acheter une saucisse, un ticket de train ou de bus en Allemagne, mais il n'y a aucune garantie qu'il puisse communiquer avec un patient", estime Jürgen Hoffart, président de l'Ordre des médecins de Rhénanie-Palatinat, devenu l'an dernier le premier Etat régional à exiger des tests d'allemand lors de simulations de consultations avec de faux patients, selon un modèle déjà mis en oeuvre en Autriche.

Il a été suivi ce mois-ci par le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie (ouest), le plus peuplé d'Allemagne.

Les ministres de la Santé des différents Länder sont convenus l'été dernier de la nécessité d'introduire une norme commune pour les examens de compétences en langue.

"C'est la pagaille en Allemagne en ce moment. Chaque région a un système différent. C'est le Moyen-Age", critique Matthias Klug, qui dirige des "cours d'intégration" pour les médecins à Nuremberg.

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