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A Kaboul, l'effroi des expatriés après l'attentat contre un restaurant

A Kaboul, l'effroi des expatriés après l'attentat contre un restaurant

"On aurait tous pu y être": l'attaque meurtrière perpétrée dans un restaurant de Kaboul fréquenté par les étrangers a saisi d'effroi de nombreux expatriés de la capitale afghane, qui redoutent une dégradation de la sécurité à l'approche de l'élection présidentielle du 5 avril.

Vendredi soir, peu après 19H00, un commando-suicide taliban a fait irruption dans "La Taverne du Liban", un restaurant apprécié des diplomates, consultants, travailleurs humanitaires et autres représentants de la communauté expatriée vivant dans la capitale afghane.

Les assaillants ont tiré à feu nourri sur les clients, tuant 21 personnes, dont 13 étrangers, avant d'être eux-mêmes abattus par les forces spéciales afghanes.

Situé à Wazir Akbar Khan, un quartier bourgeois, réputé calme, le restaurant figurait sur la liste des établissements autorisés -- censés fournir des garanties en termes de sécurité -- de nombreuses organisations internationales et ambassades.

De fait, "La Taverne du Liban" était un lieu où la plupart des expatriés se rendaient les yeux fermés, ou presque.

"On aurait tous pu y être" au moment de l'attaque, souligne Valérie Docher, chef de mission de l'ONG MRCA.

"Ce qui s'est passé aura forcément un impact", ajoute-t-elle. "Il va falloir qu'on se pose des questions dans les jours qui viennent sur notre sécurité".

Trouver la réponse idoine risque de tourner au casse-tête: les expatriés qui travaillent en Afghanistan, pays en proie à une violente insurrection des talibans, sont déjà soumis à toute une série de contraintes.

"A chaque fois qu'il se passe quelque chose, explique Mme Docher, on se pose la question suivante: dans quelle mesure est-il possible de limiter les risques?". "On peut diminuer le nombre de sorties, restreindre le nombre de lieux autorisés, éviter d'être toujours au même endroit", poursuit-elle.

"Mais à un moment donné, on voit bien que ce n'est pas suffisant. Il n'y pas un nombre illimité de restaurants à Kaboul pour les expatriés".

L'attaque contre la Taverne du Liban est "clairement un coup dur", renchérit Florent Caillibotte, chef de mission de l'ONG Afghanistan Libre, notant que la situation était "plutôt calme à Kaboul" ces derniers temps.

Cette attaque, ajoute-t-il, est surtout de mauvaise augure à l'approche de l'élection présidentielle du 5 avril prochain, un scrutin qui fait figure de test pour la stabilité du pays en guerre depuis 12 ans.

"Les ONG se posent la question de savoir si elles gardent des équipes d'expatriés, et si le pays est sûr ou pas. Et cette attaque va sans doute les pousser à préparer encore davantage la période électorale", dit-il.

Si ce contexte déjà tendu ne suffisait pas, les expatriés devront également compter avec le retrait, d'ici la fin de l'année, des dizaines de milliers de soldats de la Force internationale de l'Otan en Afghanistan (Isaf).

La sécurité du pays sera alors entre les mains des forces de sécurité afghanes, certes conséquentes (350.000 hommes), mais sous-équipées, et minées par des problèmes de corruption, d'organisation et de désertion.

"Il est clair que les expatriés vont devoir réexaminer leur situation", avance Jorge Garcia, un consultant d'Atmospherics Unlimited, une entreprise de conseils en sécurité.

"Les étrangers présents en Afghanistan doivent rester en alerte. Par exemple en évitant de se retrouver à côté de cibles potentielles" des talibans, développe-t-il, en appelant toutefois les expatriés à ne pas céder à la psychose.

"Il serait prématuré, dit-il, de recommander aux gens ne plus aller dans les restaurants. Il est trop tôt pour dire si les talibans ont décidé de s'en prendre aux membres des organisations internationales ou au personnel humanitaire".

Hélas, à en croire Mohammad Azim Popal, gérant du Sufi, un restaurant traditionnel afghan plutôt haut de gamme, le mal est déjà fait.

"La nuit dernière, de nombreux étrangers étaient en train de dîner au Sufi quand l'attaque est survenue", raconte-t-il. "Mais dès qu'ils ont appris ce qu'il s'était passé, ils se sont hâtés de quitter le restaurant", dit-il. Et ne semblent guère disposés à revenir.

"A moins d'un miracle, ça va devenir très compliqué pour les restaurants et commerces de Kaboul".

eg-us/bir

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