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Turquie: le gouvernement continue ses purges et va faire voter sa réforme judiciaire contestée

Turquie: le gouvernement continue ses purges et va faire voter sa réforme judiciaire contestée

Le gouvernement turc a procédé jeudi à une nouvelle purge dans les rangs de la justice et pourrait faire voter dès la semaine prochaine sa réforme judiciaire contestée, dénoncée par l'opposition comme une tentative d'étouffer l'enquête anticorruption qui l'éclabousse.

Nouvel épisode de la reprise en main de la police et la justice engagée par le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, le Haut-conseil des juges et procureurs (HSYK) a annoncé avoir ordonné la mutation d'une vingtaine de procureurs, dont le procureur général d'Istanbul Turhan Colakkadi.

Le même HSYK a également annoncé l'ouverture d'une enquête sur plusieurs magistrats d'Istanbul récemment dessaisis de l'enquête anticorruption qui vise le gouvernement.

Depuis le 17 décembre, plusieurs dizaines de patrons, hommes d'affaires et élus réputés proches du Premier ministre islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan, qui règne sans partage sur le pays depuis 2002, ont été inculpés et/ou incarcérés pour fraude, blanchiment d'argent et corruption.

Cette affaire a provoqué la démission de trois ministres et précipité un remaniement gouvernemental d'ampleur le jour de Noël.

M. Erdogan accuse la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen, très influente dans la police et la justice, de manipuler l'enquête en cours pour le déstabiliser à la veille des élections municipales du 30 mars et présidentielle d'août.

Depuis l'éclatement de cette affaire, le chef du gouvernement a démis de leurs fonctions plus d'un millier de policiers, hauts gradés ou officiers subalternes.

Sur un autre front, son gouvernement a déposé au Parlement un projet de loi de réforme judiciaire très controversé destiné à renforcer le contrôle politique sur les magistrats en donnant au ministre de la Justice le dernier mot sur les décisions de nomination du HSYK.

Ce texte, discuté en commission depuis vendredi, a suscité l'ire des partis d'opposition, qui le jugent contraire à la Constitution.

Face aux critiques suscitées par son projet, aussi bien en Turquie qu'à Bruxelles ou Washington, le Premier ministre a offert mardi de le "geler" en échange d'un accord de ses rivaux sur le principe d'une réforme constitutionnelle de l'organisation judiciaire.

Mais deux des trois partis d'opposition représentés au Parlement ont tour à tour refusé cette offre.

"Nous considérons ces propositions comme étant inadéquates et hypocrites, dans la mesure où les discussions en commission sur le projet réformant le HSYK n'ont jamais été suspendues", a tranché jeudi le Parti républicain du peuple (CHP) dans un communiqué.

Faute d'un compromis, le Parlement turc devrait donc se prononcer dès la semaine prochaine sur le texte, a annoncé jeudi soir un député du parti au pouvoir.

"Nous allons présenter le projet débattu à la commission parlementaire de la justice en séance plénière, probablement la semaine prochaine, et nous allons le voter", a déclaré à la presse le vice-président du groupe parlementaire du Parti de la justice et du développement (AKP), Nurettin Canikli.

"Aucun retard, suspension ou retrait du projet n'est envisagé", a ajouté M. Canikli.

Cette crise politique qui secoue le sommet de l'Etat a continué à perturber les marchés financiers, où la livre turque (LT) a atteint un nouveau plus bas historique face au dollar.

Après avoir plongé sous la barre des 2,21 LT, la devise turque a clôturé à 2,2008 pour un dollar et à 3,0058 LT pour un euro, alors que le principal indice de la Bourse d'Istanbul (BIST 100) cédait à la fin de la séance 1,89% à 66.843,56 points.

Victime du scandale politico-financier en cours et du resserrement de la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed), la devise turque a perdu plus de 20% depuis le mois de mai.

Même si les agences de notation financière ont pour l'heure maintenu les notes de la Turquie, de nombreux acteurs économiques redoutent que la crise politique n'impacte l'économie du pays.

bur-pa/bap

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