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Mexique: la bataille du Michoacan, un défi pour la politique de sécurité

Mexique: la bataille du Michoacan, un défi pour la politique de sécurité

La bataille menée par des milices d'autodéfense pour expulser par les armes un cartel de narcotrafiquants de l'ouest du Mexique constitue un défi pour la politique de sécurité du gouvernement d'Enrique Peña Nieto, accusé de laisser agir ces groupes armés paramilitaires.

En dépit du déploiement fédéral, militaire et policier, depuis plusieurs mois dans l'État du Michoacan, les milices armées ont réalisé ces derniers jours, sans opposition des forces fédérales, une offensive contre le cartel des Chevaliers Templiers. Leur objectif affiché est de déloger ce groupe criminel aux allures de secte religieuse de son fief d'Apatzingan, une ville de 130.000 habitants.

Lundi soir, des milices d'autodéfense, armées de fusils surveillaient la localité de Nueva Italia, prise dimanche après deux heures d'affrontements armés ayant fait au moins deux blessés, dans l'attente d'une une possible contre-offensive des Chevaliers Templiers.

Après une réunion lundi avec les autorités locales, le ministre mexicain de l'Intérieur, Miguel Angel Osorio Chong, a démandé à ces milices de cesser leur offensive armée en assurant que "la sécurité de leurs communautés est entièrement à la charge des institutions".

Il a aussi averti qu'il "n'y aurait pas de tolérance pour les personnes surprises en possession d'armes" interdites.

Une réponse aux critiques dont fait l'objet la stratégie du gouvernement de la part de l'opposition et d'analystes selon lesquels la tolérance dont ont fait preuve jusqu'à présent les autorités vis-à-vis des groupes d'autodéfense ressemblait fort à un soutien.

"Le gouvernement a décidé d'appuyer en partie les groupes d'autodéfense pour ne pas aboutir à une guerre civile au Michoacan. Il tente d'éviter un affrontement direct", a dit à l'AFP Raúl Benítez Manaut, expert en sécurité de l'Université nationale autonome du Mexique (Unam).

Les groupes d'autodéfense surarmés se sont multipliés depuis février dernier dans diverses localités du Michoacan, créées au départ par des civils - entrepreneurs, artisans, médecins, agriculteurs - exaspérés face à l'impuissance des polices municipales à protéger les populations face aux exactions des Templiers.

Selon ces groupes d'autodéfense, le cartel de narcotrafiquants des Templiers se livre impunément depuis des années à des activités criminelles allant du trafic de drogue au racket et aux enlèvements, sans que les successives opérations fédérales n'y changent rien. Le Michoacan était déjà l'État où le précédent président, Felipe Calderon (2006-2012) avait pour la première fois lancé l'armée contre les narcotrafiquants, en décembre 2006.

Après les premiers affrontements entre narcos et milices, le gouvernement de Peña Nieto a envoyé en mai d'importants renforts militaires et policiers dans la région, comme force de dissuasion. Cela n'a pas empêché la prise de contrôle d'une vingtaine de municipalités par les milices armées.

"Le gouvernement a changé de stratégie envers les groupes d'autodéfense. Jusqu'à juillet, ils étaient l'objet d'une appréciation négative. Puis il a constaté qu'une partie d'entre eux était une réponse à l'avancée des Templiers et a commencé à les appuyer et les protéger", selon Benitez Manaut.

Dimanche, les militaires sont restés passifs face à la prise de contrôle de Nueva Italia, un point clé qui était jusque-là sous le contrôle des narcos.

"L'encouragement de l'illégalité, le bon accueil réservé aux armées privées, la négociation avec les milices particulières est la voie vers le chaos", a estimé lundi l'universitaire Jesús Silva-Herzog.

Pour lui, ces milices paramilitaires sont des "organisations qui se sont constituées en marge de la loi pour exercer des fonctions correspondant uniquement à l'État, des fonctions aussi essentielles qu'+indélégables+".

Certains de ses groupes, équipés d'armes illégales car en principe d'usage exclusif de l'armée, sont dénoncés par les Templiers, mais aussi par des fonctionnaires fédéraux, comme des alliés d'un cartel concurrent, celui de Jalisco Nouvelle Génération, lié au cartel de Sinaloa, le principal groupe criminel mexicain dirigé par l'homme le plus recherché au Mexique et aux États-Unis, "El Chapo" Guzman.

État exportateur de produits agricoles comme le citron et l'avocat, le Michoacan est aussi un territoire utilisé depuis de nombreuses années pour la culture du cannabis, la production de drogues synthétiques grâce à l'introduction de précurseur chimiques (pour produire plusieurs composés) provenant d'Asie depuis le port de Lazaro Cardénas, sur le Pacifique.

Les sources de revenus des Templiers se sont diversifiés au cours des dernières années avec l'exportation de fer extrait illégalement vers la Chine depuis le même port.

Depuis novembre, l'administration de Lazaro Cardenas est assuré par la Marine militaire, l'État souhaitant ainsi couper un des points vitaux d'approvisionnement et de distribution des cartels criminels.

lp-gbv/abl

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