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Espagne: la frilosité des banques pourrait freiner la reprise

Espagne: la frilosité des banques pourrait freiner la reprise

Effrayées par le chômage record et l'épidémie de faillites, les banques espagnoles rechignent à accorder des crédits, mais leur prudence menace la fragile reprise du pays, préviennent économistes et organismes internationaux.

"Le secteur financier espagnol a amélioré considérablement sa solvabilité, mais il ne joue toujours pas son rôle indispensable de soutien à l'économie, car le flux de crédit vers les familles et entreprises n'a pas repris", souligne une étude publiée mardi par l'école de commerce Esade.

"Il y a un manque de crédit depuis mi-2009, le taux de crédits accordés a diminué, non seulement pour les familles mais aussi et surtout, pour les petites et moyennes entreprises", explique Josep Manel Comajuncosa, auteur de l'étude.

Selon la Banque d'Espagne, les crédits aux ménages ont baissé en novembre de 4% sur un an et ceux aux entreprises ont fondu de 8,3%, malgré la sortie du pays, au troisième trimestre, de deux ans de récession.

Bénéficiaire d'une aide européenne de 41,3 milliards d'euros pour assainir ses banques, soutenue par la Banque centrale européenne (BCE) qui a apaisé les doutes des marchés, l'Espagne s'attire les louanges des analystes pour son ambitieux travail de réformes, même s'il est coûteux socialement.

Pourtant, ces derniers mois, les mises en garde se multiplient.

Les crédits en Espagne subissent "l'une des plus fortes baisses parmi les grandes économies développées", insistait récemment le Fonds monétaire international (FMI), appelant à "stimuler la capacité des banques à prêter".

"L'accès au crédit bancaire reste excessivement restrictif", a aussi souligné Angel Gurria, secrétaire général de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), et "entre 2011 et 2012, la chute a été de 17% pour les crédits aux petites et moyennes entreprises".

"Les prêts, en particulier ceux aux entreprises, continuent de baisser de manière substantielle", s'inquiète la Commission européenne, "même si on est peut-être près de toucher le fond".

Les banques rappellent, elles, la situation encore fragile d'un pays ébranlé par l'éclatement de sa bulle immobilière en 2008.

"Quand l'économie a une croissance nulle ou très modérée, le crédit ne peut pas augmenter", explique une porte-parole de l'Association espagnole des banques (AEB).

Alors que le chômage touche un actif sur quatre et que les faillites ne cessent de monter, "il y a un problème de quantité et de qualité de la demande: d'un côté, la demande de crédit par le secteur privé reste très faible et, de l'autre, la solvabilité des entreprises et des familles a empiré par rapport à avant la crise".

L'endettement des ménages et des sociétés ayant explosé pendant les belles années de l'économie, l'heure est au remboursement de ces dettes, plutôt qu'à en contracter de nouvelles: selon l'Esade, les familles ont réduit leur ardoise de 85% du PIB en 2010 à 79% en 2013. Les entreprises ont fait de même, passant de 148% en 2010 à 143% fin 2012.

Et difficile pour les banques de faire confiance à un emprunteur quand leurs créances douteuses (prêts risquant de ne pas être remboursés) sont déjà au plus haut en cinquante ans.

"Les chiffres montrent qu'il y a des entreprises solvables qui n'obtiennent pas de crédits", rétorque Josep Manel Comajuncosa.

"Bien sûr, si une entreprise n'est pas solvable, il n'est pas raisonnable que la banque lui donne un crédit, mais si elle l'est et que la banque ne le lui accorde pas, c'est un problème car cela contracte l'économie", ajoute-t-il, prévoyant une croissance faible en 2014 (0,5%-1%), qui pourrait devenir nulle en 2015 si la situation du crédit ne s'améliore pas.

"Les banques ont complètement coupé le crédit", témoigne Maria José Landaburu, secrétaire générale de l'Union d'associations de travailleurs indépendants et petites entreprises (UATAE), "et la situation actuelle est que 90% des petits entrepreneurs qui demandent un crédit ne l'obtiennent pas".

La question de la solvabilité "est une excuse, à mon avis", car "l'activité bancaire repose aussi sur le risque", dit-elle, regrettant les effets de leur extrême prudence: "depuis le début de la crise, 90 entreprises ont fermé chaque jour, et la raison, dans de nombreux cas, était le manque de crédit".

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