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Pour Han, héraut de la cause ouvrière, la Chine vit un moment "historique"

Pour Han, héraut de la cause ouvrière, la Chine vit un moment "historique"

Le syndicaliste et dissident chinois Han Dongfang, fondateur en 1989 d'un éphémère syndicat indépendant, l'assure: la Chine est à un tournant grâce à l'émergence d'une génération d'ouvriers n'hésitant plus à se battre pour leurs droits.

Ces jeunes, nés après la répression du mouvement démocratique de 1989 place Tian'anmen, n'ont pas connu les tumultes de la Chine du XXe siècle, "n'ont pas expérimenté la peur" et, pour ces consommateurs et internautes, "la grève devient un mode d'action normal", explique à l'AFP Han Dongfang, en visite à Paris où est publié, sous la plume du journaliste Michaël Sztanke, "Mon combat pour les ouvriers chinois", récit de 25 ans de lutte.

Un combat entamé à Tian'anmen en 1989, qu'il poursuit aujourd'hui depuis Hong Kong, à la tête du China Labour Bulletin (CLB), organisation qu'il a fondée en 1994, ou sur les ondes de Radio Free Asia (depuis 1997).

"Les ouvriers vont devenir de plus en plus actifs, prendre conscience de leurs droits", les revendiquer, et l'introduction de la démocratie sociale dans les entreprises rejaillira sur toute la société, prédit Han, 50 ans, interdit en Chine, hors Hong Kong, dissident de facto qui préfère se définir comme "un syndicaliste, un militant de la cause ouvrière".

Car il le croit fermement, la nouvelle direction communiste conduite par Xi Jinping n'aura d'autre choix que d'accepter ce "processus pacifique" et se montrer flexible: "elle vit un moment historique, confrontée à la pression de la corruption et du mécontentement des travailleurs(...). Le parti communiste est sur une falaise, (d'où il peut) tomber ou lâcher du lest", comme en 1978, quand, après "le désastre" de la Révolution culturelle (1966-1976), Deng Xiaoping a décidé l'ouverture économique.

Han, électricien dans les chemins de fer lors des manifestations étudiantes de Tian'an men, n'est pas un révolutionnaire. "En 1989, les autorités avaient raison sur un point, je suis un contre-révolutionnaire", souligne, malicieux, ce charismatique militant qui préfère les "règles", "la loi" à la révolution". L'accusation lui avait alors valu deux ans de détention, un poumon en moins après une tuberculose non soignée et l'exil forcé aux Etats-Unis entre 1991 et 1994.

Sa stratégie, est celle du "pas à pas" avec une priorité: "se consacrer aux questions du travail et de vie quotidienne", former les ouvriers au dialogue social, dépêcher des avocats dans les usines pour obtenir des dommages en cas d'accidents du travail, de meilleurs salaires ou conditions de travail, bref "bâtir la démocratie dans les entreprises" dans un pays où des millions de gens travaillent dans des conditions difficiles voire insalubres.

Han dénonce: "il y aurait cinq ou six millions de victimes des maladies du poumon noir" (silicose) dues à l'inhalation de poussières et fibres au travail.

Son pragmatisme est parfois critiqué par ses amis du syndicalisme international ou des dissidents politiques mais il garde le cap. "Il faut d'abord établir le processus de négociation en entreprise" avant de parler liberté d'association.

D'autant que mieux valent des acquis sur le terrain qu'une loi sans effet. "Peu importe d'avoir une belle loi si les ouvriers ne peuvent pas peser" sur leurs conditions de travail, insiste-t-il.

Mais aujourd'hui "le pouvoir de négociation collective des ouvriers s'accroît".

Pour lui, le temps est proche où la Chine ne sera plus l'usine à sueur de la planète: "depuis vingt ans, nous avons tiré par le bas les critères (sociaux) internationaux à cause de notre travail bon marché, notre absence de droits. Mais nous allons défaire ce que la mondialisation a entraîné pour les travailleurs partout dans le monde".

Et de rêver à "un avenir brillant avec 5-600 millions de syndiqués en Chine et toutes les implications pour le monde entier!"

Mais pour cela il faut réinvestir le champ syndical, occupé par la fédération officielle, "ni loyale aux travailleurs, ni loyale au parti communiste", mais concernée par "ses seuls intérêts", déplore Han Dongfang.

"Si ta maison est occupée illégalement, tu essaies de la récupérer", alors à chaque conflit le CLB demande aux ouvriers de se retourner vers le syndicat officiel, une façon de le mettre face à ses responsabilités.

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