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Michel Djotodia, président éphémère du chaos centrafricain

Michel Djotodia, président éphémère du chaos centrafricain

Arrivé au pouvoir presque par hasard après dix ans de règne de Bozizé, le président centrafricain Michel Djotodia laisse un pays en ruine et l'image d'un dirigeant éphémère et discret, incapable d'enrayer la spirale des violences interreligieuses.

Il avait confié ne pas aimer le pouvoir. Finalement contraint sous pression internationale à démissionner vendredi, Michel Am-Nondroko Djotodia, né en 1949 - on ignore sa date de naissance exacte -, aura connu une chute aussi brutale que sa marche vers le pouvoir avait été rapide.

A ses débuts au palais présidentiel de Bangui, après avoir chassé par les armes François Bozizé - lui-même arrivé au pouvoir 10 ans plus tôt par un coup d'Etat - cet homme massif mais courtois aimait souvent répéter: "Je souhaite être le dernier chef rebelle en Centrafrique (...) je voudrais bien que ceux qui m'acclament aujourd'hui puissent le faire à mon départ, au lieu de me renvoyer par des jets de pierres".

Très rapidement, l'ex-chef rebelle devenu le premier président musulman de l'histoire troublée de la Centrafrique a paru dépassé par la tournure des évènements, entre exactions innombrables des combattants qui avaient accompagné sa marche sur Bangui, exaspération et désespoir de la population, puis finalement tueries entre chrétiens et musulmans.

Tout aussi vite, il a perdu tout crédit international face à son incapacité à assumer les charges de sa fonction et à "tenir" ses troupes issues d'une coalition hétéroclite de groupes armés, la Séléka (Alliance en langue nationale sango). Ceci malgré des appels répétés à la "réconciliation" devenus inaudibles pour ses compatriotes.

Le 23 novembre, il avait fait un aveu rarissime pour un chef d'Etat: il n'aimait pas le pouvoir.

A des représentants des partis politiques ébahis, il avait lancé: "là où je suis, je veux que les choses aillent pour le mieux, et vite, pour que je m'en aille. Je n'ai pas envie de me maintenir au pouvoir, je vais m'en aller".

Affirmant avoir perdu le sommeil, il avait ajouté: "vous, vous dormez, mais nous ne dormons pas. Mais si vous ne dormez pas, comment pouvez-vous vous accrocher à quelque chose qui vous empêche de dormir? Parfois tu ne penses même pas à ta femme!"

Il a été élu président le 13 avril par acclamations par un "Conseil national de transition" pour donner un vernis institutionnel à sa prise de pouvoir.

Djotodia avait voulu donner - en parole du moins - les gages attendus par la communauté internationale: remettre le pouvoir dans 18 mois, promettre un Etat laïc respectueux de toutes les ethnies et religions.

Même son investiture, en présence de chefs d'Etat des pays voisins, le 18 août, a mal tourné: les décorations qu'il portait lors de sa prestation de serment étaient des faux grossiers, achetés 910.000 euros à des escrocs.

Michel Djotodia est né dans la Vakaga, la préfecture la plus au nord-est de la Centrafrique, frontalière du Tchad et du Soudan, et a vécu de longues années à l'étranger, notamment en URSS.

"C'est quelqu'un de déterminé. Quand il a décidé quelque chose, il va jusqu'au bout. Quand il donne sa parole, il la tient", assurait, sous couvert d'anonymat, un rebelle qui l'a longtemps fréquenté.

"Cette qualité est aussi son défaut: il peut se montrer rigide et n'accepte souvent pas qu'on le contrarie quand il a décidé". Ses détracteurs disent qu'il est "buté".

Héritage peut-être de ses 14 années de formation soviétique, à son retour au pays, lui qui a connu la planification communiste, travaille comme fonctionnaire au ministère du Plan, avant de passer aux Affaires étrangères. Il demande ensuite à être nommé consul à Nyala au Soudan.

En 2005, Djotodia entre en rébellion et est un des fondateurs de l'Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), fusion de plusieurs petits groupes armés.

En 2007, il part en exil au Bénin avec Abakar Sabone, le fondateur du Mouvement des libérateurs centrafricains pour la justice (MLCJ), mouvement rebelle qui a signé les accords de paix de 2008 avec Bozizé. Arrêté par les autorités béninoises, il passe plusieurs semaines en prison.

De retour au pays, entre 2011 et 2012, il réussit à rallier ses anciens partisans et fonde la Séléka en juin 2012, avant de se lancer dans une marche rapide et irrésistible vers Bangui, qui tombe le 24 mars 2013. Depuis, déboires et désillusions n'ont fait que s'accumuler pour Michel Djotodia, finalement contraint à un départ sans gloire.

bur-mc/cl/jmc

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