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Dans le centre de Kiev, "une école de la révolution" (écrivain Kourkov)

Dans le centre de Kiev, "une école de la révolution" (écrivain Kourkov)

Maïdan, la place centrale de Kiev avec ses tentes et ses barricades, devient "une école de la révolution" face à un pouvoir "pas du tout en phase" avec sa société civile, estime l'écrivain Andreï Kourkov dans un entretien à l'AFP.

Auteur ukrainien de langue russe, l'un des écrivains post-soviétiques les plus lus à l'étranger, M. Kourkov, 52 ans, se rend régulièrement sur Maïdan, haut lieu de la contestation pro-européenne, occupé depuis la volte-face fin novembre du pouvoir ukrainien sur un rapprochement avec l'Union européenne au profit de la Russie.

"Maïdan c'est une école de la révolution. Il y a beaucoup de fous et de personnages hauts en couleurs, mais il y a aussi plein de gens qui consolident leur militantisme", souligne-t-il.

Il compare ce camp de tentes avec les "Sitch", les camps retranchés des cosaques ukrainiens organisés dès le 15e siècle en confréries militaires, où était appliquée la démocratie directe pour l'élection des chefs.

En 2004, Andreï Kourkov avait été un fervent partisan de la Révolution orange, dont Maïdan avait aussi été un haut-lieu et qui avait abouti à porter au pouvoir des pro-occidentaux.

Cette implication lui avait d'ailleurs valu une chute drastique des tirages de ses ouvrages en Russie.

En 2010, lorsque l'homme décrié sur Maïdan, Viktor Ianoukovitch, devient président, M. Kourkov estime alors qu'un homme "ne peut connaître qu'un seul Maïdan dans sa vie".

Mais aujourd'hui, il a radicalement changé d'avis et considère qu'il y aura "un troisième Maïdan, puis un quatrième etc".

En effet, selon lui, cette forme de protestation "est désormais enracinée dans la conscience des gens".

D'autant plus que "le comportement de Viktor Ianoukovitch et de ses alliés n'est pas du tout en phase avec l'époque", souligne ce père de trois enfants, marié à une Britannique et auteur de romans pleins d'ironie dont "Le Pingouin", où l'anti-héros Viktor Zolotarev voit mourir les unes après les autres les personnes dont il est chargé d'écrire à l'avance les nécrologies.

"L'explosion sociale" avec des centaines de milliers d'Ukrainiens descendus dans la rue contre le régime "a montré que la moitié du pays n'acceptera jamais de vivre selon ses principes".

L'autre moitié du pays qui soutient traditionnellement M. Ianoukovitch, l'Est et le Sud pro-russes, "est apolitique et facile à acheter", poursuit-il.

En effet, pour contrebalancer la contestation pro-européenne, un "anti-Maïdan" pro-pouvoir avait été mis en place à Kiev, et certains des participants avaient avoué devant les caméras avoir été payés. Ce camp a été dissous avant le Nouvel An.

L'obtention d'un crédit russe de 15 milliards de dollars représente "la défaite psychologique la plus grave de Ianoukovitch": "il dépend désormais de l'humeur" du président russe Vladimir Poutine.

"Aucun homme politique ukrainien n'a récolté tant de haine dans le pays et n'a été si peu respecté à l'étranger", estime M. Kourkov.

Le président sous-estime également sa société civile qui "s'est développée beaucoup plus rapidement qu'en Russie", analyse-t-il.

"Mentalement l'Ouest ukrainien, frontalier de l'Europe, est devenue européen tandis que l'Est proche de la Russie a cessé d'être la Russie", poursuit-il.

"Il n'y a qu'en Crimée (rattachée à l'Ukraine soviétique en 1954) que les tendances pro-russes sont encore fortes. Dans le Donbass (région industrielle russophone de l'Est et fief de M. Ianoukovitch) personne ne veut s'unir avec la Russie", ajoute-t-il.

Quant au président ukrainien, "il n'a rien à voir avec la mentalité européenne".

neo/lap/bap

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