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Bangladesh: législatives à risque sans la participation de l'opposition

Bangladesh: législatives à risque sans la participation de l'opposition

La Première ministre du Bangladesh, Sheikh Hasina Wajed, est assurée d'être reconduite après la décision de l'opposition de boycotter les élections législatives de dimanche, mais ce scrutin faussé risque d'aggraver les violences qui ont fait des centaines de morts ces derniers mois.

L'opposition réclame la démission du gouvernement et la mise en place d'un gouvernement neutre et provisoire avant l'organisation d'élections, comme ce fut le cas dans le passé, mais la Première ministre refuse.

Elle a une nouvelle fois redit jeudi à la télévision sa détermination à mener le processus électoral à son terme et a accusé la chef de l'opposition, Khaleda Zia, d'avoir "pris le pays en otage" en organisant grèves et blocages avant le scrutin.

Sa victoire ne fait donc aucun doute, les candidats de son parti, l'Awami League, ou de ses alliés se présentant sans concurrence dans 153 circonscriptions sur 300.

Mais sa légitimité sera très affaiblie sans la participation du Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), principale formation de l'opposition, et de ses alliés.

Un sondage a révélé vendredi que 77% des électeurs bangladais étaient opposés à la tenue du scrutin dans ces conditions et que 41% seulement iraient voter. Le même sondage, publié par le Dhaka Tribune, crédite le BNP --s'il participait-- de 37% des intentions de vote, devant l'Awami League.

"Une farce?" interrogeait en "une" le populaire Daily Star en publiant des photos d'autobus calcinés et de victimes d'attaques au cocktail Molotov.

"Ce n'est pas une élection. C'est une sélection honteuse", a dénoncé Khaleda Zia, qui a dirigé le gouvernement à deux reprises entre 1991 et 2006.

L'acrimonieuse rivalité entre Hasina et Zia a empêché tout compromis, et la chef de l'opposition est de facto placée en résidence surveillée depuis la fin décembre.

Khaleda Zia a exhorté vendredi les Bangladais à ne pas participer aux élections. "J'appelle mes compatriotes bangladais à boycotter totalement cette farce scandaleuse", a-t-elle déclaré dans un communiqué. "Personne, ici ou à l'étranger, ne qualifiera cette farce d'élection crédible".

Dans sa première expression publique depuis qu'elle se trouve en résidence surveillée, Khaleda Zia a accusé Sheikh Hasina de "tuer la démocratie" et a promis de continuer à "lutter contre cette autocrate".

Après l'échec de pourparlers récemment organisés sous l'égide de l'ONU, les Etats-Unis, l'Union européenne et le Commonwealth ont renoncé à envoyer des observateurs, affaiblissant un peu plus la crédibilité du scrutin et la position de Sheikh Hasina.

Les Etats-Unis se sont inquiétés des arrestations massives de partisans de l'opposition et l'Union européenne a déploré l'incapacité des autorités à "créer les conditions nécessaires à la tenue d'élections transparentes".

Le Bangladesh a connu cette année les violences les plus meurtrières depuis sa création en 1971 (à la suite de son indépendance du Pakistan), avec entre 300 et 500 morts selon les sources, dont 140 depuis octobre dans des manifestations.

Ces violences sont égalements liées aux condamnations à mort prononcées par un tribunal controversé jugeant les crimes de guerre commis en 1971.

Elles ont été imputées aux partisans du Jamaat-e-Islami, le principal parti islamiste interdit de participer aux élections --allié du BNP-- et dont les dirigeants ou ex-dirigeants sont les principaux accusés dans ces procès. Plusieurs ont déjà été pendus.

Pour Imitiaz Ahmed, professeur à l'université de Dacca, "la violence pourrait s'aggraver après les élections sans une recherche de consensus" entre la majorité et l'opposition.

D'un côté, le BNP pourrait intensifier ses manifestations, de l'autre, le gouvernement pourrait "se raidir", a-t-il prévenu.

Des dizaines de milliers de militaires ont été mobilisés à l'approche des législatives.

Ahsan H. Mansur, du centre de réflexion Policy Research Institute, craint que la confrontation ne fasse in fine le jeu de "l'extrémisme, en l'occurrence l'activisme islamique", dans ce pays à 95% musulman.

L'islam est religion d'Etat au Bangladesh, mais les lois du pays sont séculaires, héritage de la colonisation britannique.

L'instabilité et les grèves générales et blocus qui affectent depuis des mois le huitième pays le plus peuplé du monde nuit gravement à l'économie et aux 154 millions de Bangladais, dont un sur trois vit sous le seuil de pauvreté.

Jeudi soir, Sheikh Hasina s'est engagée à faire du Bangladesh un "pays à revenu intermédiaire" d'ici la fin de la décennie et à résoudre ses pénuries d'électricité chroniques, qui pénalisent ses ateliers de textile assurant 80% des exportations nationales.

bur/co/gab/ia/plh

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