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Les prisonniers palestiniens tentent de se reconvertir après leur libération

Les prisonniers palestiniens tentent de se reconvertir après leur libération

Naël Barghouthi se rend chaque matin dans son champ à Kober, au nord de Ramallah. Depuis qu'il a été libéré il y a près de trois ans, il a pris goût au travail de la terre qu'il cultive avec son frère Omar, lui aussi ancien détenu en Israël.

Les deux hommes ont trouvé dans l'agriculture une façon de se réintégrer dans la société palestinienne, un objectif souvent difficile pour des détenus ayant passé des dizaines d'années dans les geôles israéliennes, comme les 26 devant être libérés lundi soir dans le cadre des négociations de paix.

Omar a été libéré en vertu d'un accord conclu en 1985 entre Israël et le Front populaire de libération de la Palestine - Commandement général (FPLP - CG), après 25 ans dans les prisons israéliennes. Il a été arrêté depuis à plusieurs reprises et a été de nouveau libéré il y a quatre mois à l'issue de trois ans de détention administrative (sans inculpation ni procès).

Naël, 56 ans, a passé de son côté plus de 33 ans derrière les barreaux avant d'être relâché à la suite de l'accord entre le mouvement islamiste Hamas et Israël qui s'est traduit par la libération d'un millier de détenus palestiniens en échange du soldat franco-israélien Gilad Shalit.

Ce militant du Hamas déplore que les habitants de son village ne s'intéressent plus à l'agriculture, qui lui a permis de retrouver une place dans la société à sa sortie de prison.

Plus de 200 dunams (20 hectares) de terre jouxtent la maison qu'il vient de construire. "Ces champs étaient verts il y a 30 ans, je me rappelle avant mon arrestation que les gens du village y travaillaient jour et nuit. Malheureusement, aujourd'hui ça ressemble à un désert, cela me fait mal au coeur de voir ce paysage", confie-t-il à l'AFP.

"C'est dommage que la génération d'aujourd'hui ait abandonnée (la terre). Moi je reviens à la terre parce que j'ai payé plusieurs années de ma vie en prison pour la défendre", explique-t-il.

Et de souligner que "si nous abandonnons la terre et que nous ne la cultivons pas, nous resterons à la merci de ce que les autres planifient pour nous".

Omar et Naël ne regrettent pas les années passées en prison. "C'est un tribut pour le pays", témoignent-ils.

Mais Ismat Mansour, qui a retrouvé la liberté il y a deux mois après avoir passé 20 ans dans les geôles israéliennes, se sent "étranger" chez lui, même s'il a réintégré le Front de libération de la Palestine (FLP), auquel il appartenait avant sa détention.

"Tout a changé, les bâtiments, l'organisation", avoue-t-il.

"Nous étions des combattants et vivions à la campagne. Maintenant nous travaillons dans des bureaux avec une Autorité (palestinienne) qui essaie de fonctionner comme un Etat, même si elle est sous occupation (israélienne)", raconte-t-il, amer.

Pour Hilmi al-Aaraj, qui dirige une ONG palestinienne, le Centre pour les libertés démocratiques, et qui a été emprisonné pendant 10 ans en Israël, le fait de se sentir étranger pour un prisonnier à sa libération est "un sentiment naturel", commun à tous les anciens détenus.

L'Autorité palestinienne du président Mahmoud Abbas, basée à Ramallah (Cisjordanie), paie à chaque détenu libéré environ 2.000 dollars (1.500 euros) pour chaque année passée en détention afin de leur permettre de recommencer leur vie, selon Hilmi al-Aaraj.

Les anciens détenus sont comptabilisés sur la liste des forces de sécurité de l'Autorité palestinienne pourvu qu'ils soient affiliés à un groupe appartenant à l'OLP (Organisation de libération de la Palestine) - ce qui exclut les membres du Jihad islamique et du Hamas. Ils sont ainsi éligibles pour recevoir une retraite de l'Autorité.

En revanche, ils ne bénéficient d'aucun programme d'aide psychologique ou d'insertion sociale, ces derniers étant réservés aux détenus de droit commun, selon le président du Club des prisonniers palestiniens à Ramallah, Qaddoura Fares.

he-dms/agr/cco

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