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Soudan du Sud: dans Bor "libérée", le chaos et la peur

Soudan du Sud: dans Bor "libérée", le chaos et la peur

A l'ombre d'un arbre, près des eaux lentes du Nil blanc, le cadavre d'un homme tué pendant la reconquête par l'armée de la ville sud-soudanaise de Bor attire les mouches.

Au bord de la route cahoteuse qui mène au complexe hautement fortifié des Casques bleus de la mission de l'ONU, un autre corps gît.

Des habitants de Bor dansent cependant: ils célèbrent la libération de leur ville, il y a quelques heures seulement, des forces rebelles qui l'occupaient depuis presque une semaine.

Des femmes poussent des cris de joie au passage des soldats de la SPLA (Armée populaire de libération du Soudan), entonnant à pleine voix des chants de l'époque de la guerre pour l'indépendance du pays.

Des centaines de civils chargés de bagages, certains portant des matelas enroulés sur leur tête, sont revenus dans la ville après la fuite des rebelles devant l'armée.

Bor, capitale de l'Etat-clé de Jonglei, située à quelque 200 km au nord de la capitale de Juba, était tombée mercredi aux mains des forces de l'ancien vice-président Riek Machar, entré en rébellion armée le 15 décembre.

Des troupes du gouvernement ont pénétré dans Bor mardi en fin de journée, les combats pour le contrôle total de la ville se poursuivant dans la nuit.

Des tirs occasionnels retentissaient encore mercredi après-midi. Des soldats de la SPLA affirmaient qu'ils pourchassaient d'éventuels rebelles restants.

Dans la ville livrée aux rebelles puis aux soldats loyalistes, le chaos est complet.

Les magasins ont été pillés, les maisons détruites, tandis que dans le bureau du gouverneur - utilisé comme base par les rebelles pendant leur occupation - les fenêtres ont été défoncées et les portes arrachées de leurs gonds.

De nombreuses liasses de papier jonchent le sol, recouvertes de traces de bottes.

"Nous avons pris Bor hier soir...mais il y a encore eu des tirs dans la nuit, jusqu'à l'aube," a déclaré le soldat Simon Deng à l'AFP, au cours d'une visite de la presse mercredi après-midi, organisée par le gouvernement.

La reprise de Bor a mis un terme à un siège de presque une semaine, qui a contraint plus de 17.000 civils désespérés, qui cherchaient refuge et protection auprès du complexe de l'ONU qui, assailli, a vu ses stocks de nourriture et de fournitures considérablement réduits.

Les Casques bleus de Bor ont dit avoir redouté une attaque similaire à celle qui a frappé la semaine dernière un avant-poste reculé de l'ONU à Akobo, dans le même Etat de Jonglei, dans laquelle 2.000 hommes armés avaient pris d'assaut la base, tuant au moins une vingtaine de personnes, dont deux Casques bleus indiens.

Pour empêcher des hommes armés pénétrer dans leur base de Bor, les Casques bleus ont passé plusieurs jours à fortifier leurs bâtiments avant l'attaque de l'armée gouvernementale.

Pendant que les rebelles contrôlaient la ville, quatre militaires américains ont été blessés le 21 décembre en tentant d'évacuer certains de leurs concitoyens, leurs trois avions ayant été touchés par balle. L'évacuation n'a pu réussir que le lendemain.

Le Soudan du Sud est en proie à d'intenses combats depuis le 15 décembre, le président Salva Kiir ayant accusé son ancien vice-président de tentative de coup d'Etat. Riek Machar dément, accusant Salva Kiir de vouloir éliminer ses rivaux.

La reprise de Bor a été décrite par le ministre de l'Information, Michael Makwei, comme "le cadeau du gouvernement du Soudan du Sud au peuple".

Dans leur lutte pour le pouvoir, les deux rivaux instrumentalisent les antagonismes entre leurs ethnies réciproques: les Nuer de Machar, les Dinka de Kiir. Dans Bor, en dépit des déclarations rassurantes du gouvernement, les civils Nuer craignent de possibles représailles.

str-pjm/afp/jpc/sb

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