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Khodorkovski libéré, gracié par Poutine après dix ans de camp

Khodorkovski libéré, gracié par Poutine après dix ans de camp

L'ex-magnat du pétrole et critique du Kremlin, Mikhaïl Khodorkovski, est sorti de prison vendredi, gracié par le président Vladimir Poutine après un peu plus de dix ans passés derrière les barreaux.

Un porte-parole de l'ex-milliardaire a confirmé à l'AFP que M. Khodorkovski avait quitté le camp de détention de Segueja, une localité reculée de Carélie (nord-ouest de la Russie).

La télévision publique RT, citant des sources aéroportuaires, a affirmé que le détenu avait été emmené par hélicoptère à destination de Saint-Pétersbourg.

Selon une source proche de la famille, Mikhaïl Khodorkovski pourrait être à Moscou dès vendredi soir.

Vendredi matin, le Kremlin avait publié un bref communiqué indiquant que Vladimir Poutine avait gracié celui à l'égard duquel il n'avait pas dissimulé dans le passé son hostilité personnelle.

La veille, il avait annoncé que M. Khodorkovski, qui s'y était toujours refusé auparavant, avait sollicité une grâce, sa mère étant atteinte d'un cancer.

"Guidé par des principes humanitaires, je décrète que Mikhaïl Borissovitch Khodorkovski (...) doit être libéré avant la fin de sa peine", a écrit M. Poutine dans le décret à effet immédiat, selon le communiqué publié vendredi.

"Je n'arrive pas encore à réaliser", a déclaré la mère de M. Khodorkovski, Marina, à la télévision russe, la voix tremblante.

Des analystes politiques et économistes ont estimé que Vladimir Poutine cherchait à améliorer le climat des affaires, et l'image de la Russie à l'approche des jeux Olympiques de février à Sotchi, un projet de première importance pour le président russe.

Le nouveau ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a salué dès vendredi soir une "bonne nouvelle".

L'annonce de la grâce de M. Khodorkovski a surpris aussi bien ses avocats que la famille de l'ex-oligarque qui fut un temps l'homme le plus riche de Russie.

Le quotidien Kommersant a affirmé vendredi que M. Khodorkovski, libérable en août 2014, a accepté de demander une grâce après avoir reçu en détention la visite de membres des services secrets qui ont évoqué la perspective d'une nouvelle condamnation et lui ont raconté que l'état de santé de sa mère se dégradait.

Le Parquet russe avait évoqué début décembre à la surprise générale une nouvelle enquête contre l'ancien patron du groupe pétrolier Ioukos.

"Cette conversation, qui s'est déroulée sans la présence d'avocats, a contraint Mikhaïl Khodorkovski à s'adresser au président", ajoute Kommersant.

Le principal opposant à Vladimir Poutine, Alexeï Navalny, s'est interrogé à ce titre sur l'état d'esprit de M. Khodorkovski après cette grâce.

"Tenir le coup pendant dix ans avec une si formidable dignité. Qu'a-t-il aujourd'hui dans la tête et sur le coeur?", a -t-il écrit sur son blog.

Considéré un temps comme l'un des citoyens les plus influents de Russie, Mikhaïl Khodorkovski a été arrêté en 2003 et condamné en 2005 à huit ans de camp pour "escroquerie et fraude fiscale". Cette peine a été portée à 14 ans à l'issue d'un deuxième procès en 2010 pour "vol de pétrole et blanchiment" de 23,5 milliards de dollars, toutes accusations dénoncées comme infondées par ses avocats. La peine sera ensuite réduite à 11 ans.

Pour les défenseurs des droits de l'homme et de nombreux observateurs étrangers, Mikhaïl Khodorkovski, aujourd'hui âgé de 50 ans, a été la victime d'un règlement de comptes organisé par Vladimir Poutine. Condamné pour avoir affiché son indépendance et ses ambitions politiques, et financé l'opposition, il est devenu le symbole de la dérive autoritaire de la Russie.

Sa grâce est à rapprocher de l'amnistie adoptée mercredi, qui devrait lever les poursuites contre l'équipage de Greenpeace, parmi lesquels 26 étrangers, et libérer les deux jeunes femmes emprisonnées du groupe contestataire Pussy Riot, deux dossiers qui ont contribué à détériorer encore l'image de la Russie dans le monde.

La libération de M. Khodorkovski est "un signal très important", a déclaré l'économiste russe Sergueï Gouriev, réfugié en France après avoir été interrogé à plusieurs reprises en Russie sur ses relations avec M. Khodorkovski.

"En soi, cela ne change rien, mais cela donne de l'espoir à tous les investisseurs", a ajouté M. Gouriev dans un courriel à l'AFP, ajoutant qu'il n'avait pas pour autant l'intention pour l'instant de rentrer en Russie.

Pour le journal Vedomosti, "Poutine a plusieurs raisons pour avoir voulu résoudre le cas Khodorkovski: la dégradation de l'image de la Russie à la veille des JO de Sotchi, la stagnation de l'économie, le mauvais climat des affaires". La nouvelle de la grâce a fait monter la Bourse jeudi, a observé ce quotidien des affaires.

Le principal associé de M. Khodorkovski, Platon Lebedev, arrêté, jugé et condamné avec lui, devrait pour sa part sortir de détention en mai 2014. Son avocat a déclaré à l'agence Interfax qu'il allait évoquer avec lui la possibilité d'une demande de grâce.

bfi-lpt/nm/abk

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