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Contrefaçon de grands crus: un célèbre marchand de vin reconnu coupable à New York

Contrefaçon de grands crus: un célèbre marchand de vin reconnu coupable à New York

Le marchand de vins indonésien Rudy Kurniawan, un temps adulé comme l'un des plus grands experts au monde, a été reconnu coupable mercredi à New York de contrefaçon de grands crus français, une activité qui lui avait rapporté des millions de dollars.

Après avoir délibéré moins de deux heures, les 12 jurés du tribunal fédéral de Manhattan l'ont reconnu coupable des deux chefs d'accusation retenus contre lui, passibles d'une amende et d'une peine maximale de 40 ans de prison.

Sa peine sera prononcée par un juge le 24 avril 2014.

Kurniawan, 37 ans, visage enfantin, ne s'est pas exprimé lors de l'audience et est resté de marbre à l'énoncé du verdict.

Lors du procès, entamé le 10 décembre, l'accusation avait produit une multitude d'éléments accablants contre l'accusé, qui avait connu après 2002 une ascension météorite dans le petit monde des collectionneurs de grands crus.

Accusant Kurniawan d'avoir monté chez lui, à Arcadia en Californie, un véritable laboratoire de contrefaçon, l'accusation avait montré fausses bouteilles, fausses étiquettes par milliers, cire, tampons, capsules, bouchons, cahiers de notes, formules de mélange écrites à même des bouteilles, ainsi que des photos et emails.

Elle avait expliqué comment il récupérait soigneusement les bouteilles anciennes, faisait ses mélanges à partir de vins moins chers, étiquetait, scellait... et vendait ses fausses bouteilles avec de grands crus authentiques.

C'était un "faussaire de vins prolifique, qui dans sa cuisine en Californie avait assemblé tout ce dont il avait besoin", avait déclaré lors de son réquisitoire le procureur Joseph Facciponti.

Kurniawan disait avoir "une cave magique (...) Mais il n'y avait pas de magie, seulement les mensonges de l'accusé", avait-il ajouté, rappelant que Kurniawan avait ainsi gagné des millions de dollars. "Cette affaire est un affaire de mensonges et de cupidité", avait-il insisté.

L'accusation a cité une quinzaine de témoins, dont plusieurs experts en vins et trois vignerons de grands crus de Bourgogne français, victimes de l'Indonésien.

L'un d'eux, Laurent Ponsot, a confié mercredi à l'AFP qu'il était "satisfait, mais pas heureux" du verdict. "Satisfait parce qu'il est condamné, mais pas heureux que le vin ait été présenté sous cette lumière", a-t-il expliqué.

C'est une vente de vins du Domaine Ponsot, prévue en avril 2008 à New York, qui avait scellé la chute de Kurniawan. Presque toutes les bouteilles étaient fausses.

Vivant illégalement aux Etats-Unis depuis qu'une demande d'asile lui avait été refusée en 2003, il avait été arrêté en mars 2012.

Surnommé "Dr Conti", en raison de sa passion pour le Romanée- Conti, Kurniawan, au passé inconnu, avait construit son ascension sur un excellent palais, une mémoire prodigieuse des vins, et une générosité sans limite pour les collectionneurs et experts qu'il régalait volontiers de ses meilleures bouteilles.

En 2006, il avait proposé 12.000 bouteilles lors de deux ventes aux enchères à New York, vendues pour 35 millions de dollars. Un expert, Michael Egan, a témoigné que des dizaines de lots contenaient des vins contrefaits.

A l'époque, Kurniawan menait la grande vie, dépensant des millions de dollars par an, collectionnant les montres, voitures, et oeuvres d'art.

Mais le procès a révélé qu'en 2007, il devait 10 millions de dollars, principalement à la maison d'enchères qui vendait ses vins à New York.

La défense a en vain plaidé la bonne foi, affirmant que Kurniawan n'avait jamais cherché à tromper personne.

Vu les quantités de bouteilles de vins qu'il achetait et revendait, " à un moment, il allait commencer à acheter de fausses bouteilles", dans un marché où la contrefaçon est "endémique", avait plaidé son avocat Jerome Mooney, affirmant que son client n'était "pas assez éduqué pour voir la différence".

Face aux preuves accablantes, il avait tenté d'expliquer que Kurniawan avait reconditionné certains vins chez lui, "pour les protéger".

L'ampleur totale de ses contrefaçons, une opération "massive" selon les procureurs, reste inconnue. Mais plus de 1.000 bouteilles de faux grands crus, dont des Bourgogne des domaine de la Romanée-Conti, Ponsot ou Roumier, et des Bordeaux Chateau Petrus, achetées par sept collectionneurs pour des millions de dollars, ont été attribués à Kurniawan.

La question d'éventuelles complicités, dans cette activité particulièrement lucrative, reste entière. Elle n'a pas été abordée au procès.

bd/jca

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