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Tunisie: colère à Sidi Bouzid trois ans après le début de la révolution

Tunisie: colère à Sidi Bouzid trois ans après le début de la révolution

Une large frange de la société civile prévoit une journée de colère mardi à Sidi Bouzid, berceau de la révolution tunisienne et du Printemps arabe, pour dénoncer son enlisement dans la pauvreté trois ans après son soulèvement.

"Ca sera une journée de colère et de protestations contre la politique du gouvernement qui n'a pas tenu ses promesses et a trahi les engagements de la révolution", lance à l'AFP Youssef Jlili, porte-parole du Comité du 17-Décembre.

En coordination avec d'autres associations et le puissant syndicat UGTT, "une marche pacifique rassemblant toutes les forces démocratiques est prévue", ajoute le porte-parole de ce collectif créé lors de la révolution déclenchée le 17 décembre 2010 par l'immolation du marchand ambulant Mohamed Bouazizi, excédé par la misère et les brimades policières.

Un hommage à deux opposants tués cette année est également prévu, des assassinats qui ont plongé la Tunisie dans une inextricable crise politique paralysant les réformes institutionnelles et économiques.

Les organisateurs refusent catégoriquement la venue du président Moncef Marzouki, celui de la Constituante Mustapha Ben Jaafar et le Premier ministre Ali Larayedh. Les deux premiers avaient d'ailleurs déjà été chassés le 17 décembre 2012 par les jets de pierres des manifestants à Sidi Bouzid.

"Nous refusons catégoriquement la présence des trois présidents (...) Ils n'ont fait qu'appauvrir notre région. Ils n'ont aucune crédibilité ", a prévenu Lazhar Ghmoudi, secrétaire général du syndicat.

Des festivités officielles sont néanmoins prévues mais aucun dirigeant n'a dans l'immédiat confirmé sa venue. Vu la situation délicate du pays nous allons célébrer et non pas fêter la date du 17 décembre", précise Mohamed Jalléli directeur du festival officiel.

Trois ans après le soulèvement qui a poussé le président Zine El Abidine Ben Ali à la fuite, le désenchantement et la frustration sont palpables dans cette région du centre-ouest tunisien de 418.000 habitants où le taux de chômage est le plus élevé du pays, touchant 24,4% de la population active et 57,1% des diplômés.

"Trois ans sont passés et rien n'a changé ! La situation socio-économique est toujours difficile dans cette région enfoncée dans la misère", déplore Mondher Chaïbi, membre dirigeant du Comité du 17-Décembre.

La colère grandissante, plusieurs manifestations ont dégénéré ces deux dernières années en affrontements avec la police, le siège d'Ennahda a été incendié et la préfecture à maintes reprises assiégée.

"La seule chose qui a changé à Sidi-Bouzid c'est la construction de hauts murs autour des bâtiments de l'Etat", assure M. Chaïbi.

"Notre vie va de mal en pis, nous sommes plus pauvres qu'avant et nos enfants sont toujours au chômage", se lamente Hasnia Mnasri, une vendeuse ambulante de vêtements, en étalant sa marchandise.

"C'est la seule chose que le gouvernement nous a offert !", poursuit cette femme de 58 ans en pointant du doigt un monument commémoratif représentant le chariot de marchandises de Bouazizi et le drapeau national frappé des mots "la Tunisie est au-dessus de tous".

Les jeunes, attablés dans l'un des nombreux cafés bondés sur l'avenue principale de Sidi Bouzid, n'ont guère plus d'espoir et rêvent d'Europe.

"J'étais en chômage, je le suis encore et je le serais toujours", résume Safouane Amri, un jeune de 24 ans.

La solution "magique", selon lui, est de "faire connaissance via internet d'une étrangère et de se marier avec elle, même si elle a 80 ans".

"Heureusement pour moi, j'ai trouvé une femme de 36 ans", confie-t-il à l'AFP, le regard malicieux, espérant partir au plus vite.

Les problèmes socio-économiques, exacerbés par une crise politique interminable et l'essor de groupes jihadistes, ont entraîné ces dernières semaines une multitude de grèves, parfois émaillées de heurts, dans plusieurs régions.

Dans ce contexte, le patron de l'UGTT, Houcine Abassi a supplié la classe politique de s'accorder sur un gouvernement d'indépendants, d'adopter la nouvelle Constitution et de conduire la Tunisie aux élections, "faute de quoi le pays ouvert à tous les dangers".

Un nouveau Premier ministre a été désigné samedi. Mehdi Jomaâ, ministre de l'Industrie sortant, aura la tâche de former un gouvernement d'indépendants dans les quinze prochains jours.

kl/alf/feb

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