Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Le FC Barcelone, "armée désarmée" des revendications catalanes

Le FC Barcelone, "armée désarmée" des revendications catalanes

"Le Barça est l'armée désarmée de la Catalogne": par ces mots, l'écrivain Manuel Vasquez Montalban avait résumé le lien particulier qui lie le FC Barcelone et le sentiment nationaliste catalan, pour lequel il a fait figure de mode d'expression indirect et de caisse de résonance.

Usage permanent de la langue catalane, écusson mêlant les blasons de Barcelone et de la Catalogne, deuxième maillot aux couleurs du drapeau catalan: le Barça affiche clairement sa "catalanité" et se revendique "més que un club" - "plus qu'un club".

Depuis un siècle, l'institution "blaugrana" (bleu et grenat) a servi d'instrument détourné pour les revendications des nationalistes, qui ont entamé jeudi un bras de fer avec Madrid en annonçant un référendum sur l'indépendance en 2014.

Fondé en 1899, sacré quatre fois champion d'Europe, "le Barça reflète l'histoire de la Catalogne au XXe siècle", explique à l'AFP Carles Santacana, docteur en histoire contemporaine à l'Université de Barcelone.

"Sa formule, Manuel Vasquez Montalban l'écrit dans les dernières années du franquisme. Au travers du Barça, il y avait une identification avec une idée de la Catalogne qui ne pouvait pas s'exprimer. Le Barça est devenu une sorte de succédané, une manière indirecte de manifester la catalanité."

L'Espagne, rappelle l'historien, a connu successivement sous les dictatures de Primo de Rivera puis de Franco deux régimes militaires qui réprimaient l'affirmation de l'identité catalane.

"La senyera (le drapeau sang et or catalan, NDLR) a été interdite pendant 40 ans. Pour beaucoup de gens, au travers des couleurs du Barça se projetaient un drapeau et des couleurs qui étaient interdits", poursuit-il.

Dans ce contexte, les tribunes du Barça ont souvent servi de lieu d'expression dans une société muselée.

En 1925, le club a été suspendu de tout match pendant six mois pour avoir sifflé l'hymne espagnol. Sous le franquisme, des pamphlets étaient distribués dans les tribunes, des cartes de "socios" - les supporteurs-actionnaires du club - étaient imprimées en langue catalane malgré l'interdit et les matches contre le Real Madrid, vu comme le club du centralisme, déchaînaient les passions.

"A l'époque de la résistance au franquisme nous sommes tous allés au stade, même ceux qui ne sont pas supporteurs du Barça comme moi, pour crier +Liberté!+", raconte Josep Ramoneda, politologue et éditorialiste du quotidien El Pais.

"C'était pendant le franquisme l'emblème national de la Catalogne et par conséquent (...) une espèce de sélection catalane sans l'être officiellement."

Toutefois, avec la transition démocratique, l'affirmation de l'identité catalane a peu à peu glissé vers des revendications indépendantistes, dont le Barça s'est fait l'écho sous le mandat de son président Joan Laporta (2003-2010), aujourd'hui élu nationaliste.

Pep Guardiola, entraîneur emblématique du Barça triomphant de l'ère Laporta et aujourd'hui au Bayern Munich, n'a jamais fait mystère de ses positions et a parlé du référendum annoncé jeudi comme d'une "grande opportunité".

Successeur de Laporta, Sandro Rosell semble moins en vue sur ces questions, mais il a tout de même introduit cette saison un jeu de maillots aux couleurs de la "senyera" et déclarait en octobre que le Barça était "un club catalan et catalaniste, dont la langue officielle est le catalan".

Pour Carles Santacana, le Barça n'est pas à l'avant-garde de la société catalane, ni en retrait, il va au même rythme qu'elle dans la revendication d'éléments d'identité, parmi lesquels la langue catalane est un des plus importants".

Le Barça promeut notamment le catalan via son hymne ou ses communiqués de presse. Ses dirigeants donnent aussi des conférences dans les pays que le club visite en coupe d'Europe.

"Le Barça, en tant que club sportif, a une capacité beaucoup plus puissante d'irradier le sentiment catalan", analyse Carles Santacana.

"Avec ses 150.000 +socios+, le suivi médiatique qui est le sien, la répercussion est très grande (...) C'est l'élément de diffusion le plus important qui existe."

Des centaines de millions de téléspectateurs ont ainsi pu apercevoir dans les tribunes une banderole "C'est normal de vouloir un pays normal" lors du clasico joué en octobre contre le Real Madrid. Et remporté 2-1, pour la plus grande fierté des Catalans.

acc-dbh-jed/fbx

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.