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Mexique: la réforme énergétique devant une longue route

Mexique: la réforme énergétique devant une longue route

La réforme historique adoptée jeudi par le Parlement du Mexique et qui ouvre les ressources pétrolières nationales au secteur privé, est le début d'une longue route vers la modernisation d'une industrie à la production déclinante, déficiente dans le domaine du raffinage et de l'exploration en eaux profondes, soulignent des experts.

Pendant 75 ans, la seconde économie d'Amérique latine, après le Brésil, a fait du géant pétrolier d'Etat, Pemex, en l'une des principales sources de recettes de l'Etat.

Quelque 35% du budget fédéral, soit l'équivalent de 55 milliards d'euros, viennent chaque année de la rente pétrolière en provenance de Pemex, qui reverse 67% de ses bénéfices à l'Etat, avec une faible marge pour sa maintenance et l'investissement.

Cela s'est traduit par une baisse de la production de pétrole brut de 3,4 millions de barils par jour en 2004 à 2,5 millions en 2013. Résultat: le Mexique importe actuellement 50% de sa consommation de carburants.

"La majorité des raffineries du Mexique sont vétustes" en raison du manque d'entretien pendant des dizaines d'années et pour remonter la pente "il va falloir du temps, des années", selon Alejandro Villagomez, expert pétrolier du Centre de recherches et d'enseignement économiques (Cide) de Mexico.

Bien avant le début des débats parlementaires de cette semaine, le directeur de Pemex, Emilio Lozoya, soulignait l'urgence de l'entrée de capitaux étrangers dans l'industrie: au cours des six prochaines années il faudrait consacrer quelque 30 milliards d'euros pour relancer la seule activité du raffinage.

Partager le risque de l'exploration et de l'exploitation des gisements en eaux profondes (à plus de 3.000 mètres sous la surface de la mer), est une autre urgence du secteur.

"C'est là peuvent certainement apparaître les nouvelles réserves de pétrole et, comme l'Etat n'a pas non plus investi suffisamment pour développer la technologie, il faut avoir recours aux investissements privés. Mais constater des résultats va prendre des années, si ça se passe bien", souligne Villagomez.

Après sept décennies de tutelle étatique, il faudra travailler "pendant des mois et des années pour que la réforme livre son potentiel", estime aussi David Shields, consultant de l'industrie pétrolière.

La proposition initiale du président Enrique Peña Nieto était plus timide que celle qui est finalement sortie du Parlement. Elle n'envisageait que des contrats de partage des revenus avec les entreprises privées.

Sous la pression du Parti action nationale (PAN, conservateur) la reforme adoptée envisage un éventail de possibilités par les entreprises privées, nationales ou étrangères, qui outre le partage des revenus, vont des contrats de service, à la production partagée ou des licences, "entre autres" dit la loi.

Ce qui fait dire à l'opposition de gauche que cette réforme revient en fait à une "privatisation sauvage" des ressources énergétiques mexicaines, pétrole, gaz ou électricité.

L'avocat Manuel Cervantes, de MCM Abogados, reconnaît que cette gamme de contrats pourrait avoir un effet "similaire" à ce que seraient des concessions, qui restent pourtant interdits dans la Constitution.

"Le Mexique a des réserves si vastes qui n'ont pas été explorées que (la réforme) ne peut être que positive pour nos entreprises à Houston" (Texas), dit à l'AFP Pete Garcia, directeur exécutif de la section de locale de la Chambre de commerce Etats-Unis Mexique, dont Exxon Mobil est l'une des compagnies fondatrices.

Dans l'attente des candidatures des compagnies privées, Pemex a prévu sur son compte Twitter que la réforme pourra créer un demi-million d'emplois lors des cinq prochaines années et deux millions et demi d'ici à 2025.

Toutefois le Parti de la révolution démocratique (PRD), le principal parti de gauche, a averti jeudi qu'il allait envoyer à toutes les grandes entreprises pétrolières une lettre leur expliquant son projet d'une référendum en 2015 pour l'abrogation d'une réforme, qui selon la gauche va au contraire aboutir à la suppression de dizaines de milliers d'emplois actuels.

"Nous les avertissons du risque qu'elle courent d'investir au Mexique avant 2015", a dit Jesus Zambrano, le président du PRD.

Selon Villagomez, "les investisseurs ne vont pas manquer de considérer cette possibilité et il est probable que cela affectera le rythme auquel nous pourrons constater les progrès de la réforme".

jg/csc/jcb

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