Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Lev Tahor : l'histoire d'une famille déchirée

Lev Tahor : l'histoire d'une famille déchirée

Comment se fait-il que pendant près de 10 ans, la communauté juive des Lev Tahor a vécu au Québec et scolarisé ses enfants à sa façon sans que les autorités s'en mêlent? Cette question demeure toujours sans réponse, mais une entrevue exclusive avec Shlomo Helbrans nous a permis de comprendre la genèse de toute cette histoire qui trouve, en grande partie, sa source dans un conflit intime : celui d'une famille qui implose.

Un texte d'Émilie Dubreuil

Il y a plus d'un an, un des fils de Shlomo Helbrans a décidé de dénoncer ce qui se passait dans le groupe de son père à Sainte-Agathe. Il n'est pas le seul à l'avoir fait, mais sa défection constitue un des catalyseurs des déboires que connaît le groupe aujourd'hui.

Le fils d'Helbrans a lancé un appel à l'aide aux organisations juives de Montréal, comme en témoigne David Ouellette, du Conseil consultatif des relations juives et israéliennes.

Ce n'est pas d'hier que Shlomo Helbrans suscite l'inquiétude; il a un passé extrêmement controversé. En Israël, son pays d'origine, mais aussi aux États-Unis, d'où on l'a chassé il y a une dizaine d'années.

Converti ou kidnappé?

C'est le titre d'un des premiers articles que le New York Times consacrera à cette affaire que suivront avec attention les lecteurs du célèbre quotidien de New York. Shlomo Helbrans, qui a alors la jeune trentaine, vient de quitter Israël avec ses disciples parce qu'il craint l'avènement d'un nouvel holocauste.

Il est installé depuis peu dans un quartier hassidique de Brooklyn, où il enseigne sa vision des textes saints dans une petite yeshiva.

À l'époque, Shai Reuvens, 13 ans, s'apprête à célébrer sa bar-mitsvah, rite initiatique par lequel un garçon juif marque sa majorité. Comme il vient d'une famille non pratiquante, la mère de Shai croit bon de l'inscrire à des cours d'enseignement religieux de Shlomo Helbrans.

Jacky Fhima confiera à un des journalistes du New York Times que, dès le début, l'Israélien se comporte de façon étrange vis-à-vis de son fils. La première fois qu'il le voit, le chef des Lev Tahor déclare qu'il voit la lumière dans le visage du jeune garçon. Nous sommes en 1992.

Quelques semaines après le début des cours, Helbrans et sa femme refusent de remettre le garçon à sa mère. Le FBI s'en mêle. Le garçon est introuvable.

Shai reverra ses parents pour la première fois deux ans plus tard devant le tribunal au procès d'Helbrans, accusé de kidnapping.

Or, le jeune garçon, qui a alors 15 ans, témoigne en faveur d'Helbrans. Il prétend qu'il était maltraité chez lui et qu'il était beaucoup mieux avec le Rabbin. « On t'a fait un lavage de cerveau, mon fils », s'est alors exclamée la mère du jeune homme.

Helbrans est condamné à deux ans de prison pour cette affaire par la Cour suprême de Brooklyn en 1994. En mai 2000, le gouvernement américain décide de déporter le gourou, en libération conditionnelle, vers son pays d'origine : Israël.

Réfugié au Canada

En octobre 2003, le Canada accorde à Shlomo Helbrans le statut de réfugié. C'est le célèbre avocat Julius Grey qui plaide sa cause, et sa preuve convainc les autorités de donner asile au personnage controversé.

Grey démontre que, dans les années 80, Helbrans est battu à répétition par des miliciens et qu'il reçoit des menaces de mort. La police ne fait rien. Bien au contraire, elle dit à Helbrans qu'il mérite ces sévices. Un ancien agent des services secrets israéliens vient témoigner de l'affaire au Canada.

Dans les médias israéliens, on décrit Helbrans comme un fou furieux qui veut tuer tous les juifs non religieux. Le visionnement d'un reportage particulièrement alarmant convaincra la commission du statut de réfugié au Canada qu'Helbrans est victime d'une campagne de haine dans son pays.

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.