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Centrafrique: plus de 600 morts en une semaine, Paris s'alarme de l'escalade des violences

Centrafrique: plus de 600 morts en une semaine, Paris s'alarme de l'escalade des violences

Les tueries entre chrétiens et musulmans ont fait "plus de 600 morts" en une semaine en Centrafrique selon l'ONU, la France s'alarmant de la brutale aggravation de ces violences malgré l'intervention de son armée.

"Les combats et les violences inter-religieuses de la semaine écoulée ont provoqué la mort de 450 personnes" à Bangui et fait 160 tués dans d'autres régions du pays, a indiqué vendredi un porte-parole du HCR.

L'agence onusienne a également fait état de 159.000 déplacés dans la seule capitale, répartis autour de l'aéroport, dans les églises et les mosquées.

Le 5 décembre, des milices d'autodéfense chrétiennes avaient lancé une offensive dans Bangui contre des positions de l'ex-rébellion à dominante musulmane de la Séléka (au pouvoir) et des quartiers musulmans. Cette attaque avait entraîné les représailles sanglantes des combattants Séléka sur les populations très majoritairement chrétiennes de la capitale.

Ces violences avaient précipité l'intervention militaire de la France, lancée le soir-même après un feu vert de l'ONU, et qui mobilise près de 1.600 hommes déployés pour l'essentiel à Bangui.

Malgré cette intervention, "la spirale de l'affrontement s'est brutalement aggravée, ajoutant à la crise sécuritaire les prémices d'une crise humanitaire", a reconnu vendredi le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, arrivé vendredi à Bangui .

Lundi, les troupes françaises avaient entrepris un vaste désarmement, à commencer par celui des anciens rebelles, mais l'opération s'est accompagnée de représailles chrétiennes contre les communautés musulmanes.

Le bilan des violences devrait encore s'alourdir, de nouveaux corps étant découverts chaque jour dans les quartiers et dans la brousse, selon l'ONU.

Ainsi, 27 musulmans ont été tués jeudi par des milices chrétiennes dans un village de la région de Bouar (ouest), Bohong, selon le Haut commissariat aux droits de l'homme.

Sa porte-parole a décrit "la poursuite d'un cercle vicieux d'attaques et de représailles" dans d'autres villes (Bouca, Bossangoa, Bozoum).

"Alarmé par les tensions croissantes entre communautés religieuses en Centrafrique", le Haut commissariat a appelé leurs dirigeants "à contenir l'intolérance et les violences".

De même, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a invité chrétiens et musulmans à "suivre la voie de la paix", soulignant que "l'effusion de sang doit cesser".

Le Premier ministre de transition, Nicolas Tiangaye, a lui aussi appelé à la fin des tueries "le plus rapidement possible".

Sur le front humanitaire, le Programme alimentaire mondial a commencé sa première distribution de nourriture aux 45.000 déplacés près de l'aéroport de Bangui sous la surveillance de militaires français.

Vers 16H00, la foule excédée par la longue attente a débordé le service d'ordre, pillant les vivres qui devaient être distribués sans toutefois toucher aux camions qui devraient poursuivre leur travail samedi.

A Genève, l'Unicef avait promis pour vendredi l'envoi de 77 tonnes de biens humanitaires.

A Bangui, toujours quadrillée par les soldats français, la vie quotidienne a commencé à reprendre avec notamment l'ouverture des banques, mais des coups de feu et accrochages entre hommes armés restent fréquents dans certains quartiers.

Au moins un accrochage impliquant des soldats de l'opération Sangaris a eu lieu vendredi matin sur la route de l'aéroport, selon des témoins.

M. Le Drian a souligné que la situation pouvait "déstabiliser toute la région en attirant des groupes criminels et terroristes".

Il a rappelé aux soldats français que leur mission était d'"enrayer les exactions, les dérives confessionnelles, permettre le retour des humanitaires et le déploiement des structures étatiques de base".

M. Le Drian s'est ensuite rendu à Bossangoa, à 300 km au nord de Bangui, où se trouvent plusieurs centaines de soldats français et des dizaines de milliers de réfugiés.

A son retour à Bangui, il devait s'entretenir avec le président centrafricain Michel Djotodia, ex-chef de la Séléka.

Un des sujets abordés pourrait être la mission confiée aux soldats confrontés à la montée d'un sentiment anti-français dans les communautés musulmanes. Certains y accusent la France de faire le jeu des chrétiens en désarmant les ex-rebelles et les livrant aux représailles.

Les soldats français "seront impartiaux jusqu'au bout", a affirmé M. Le Drian, de retour de Bossangoa.

Il a précisé que les forces françaises se "déploieront sur l'extérieur (de Bangui) pour sécuriser l'ensemble du pays (...) au fur et à mesure que les forces africaines se renforceront et que le calme se poursuivra à Bangui".

Dans la soirée, le ministre devait se rendre au Tchad rencontrer le président Idriss Deby. Puissance régionale, allié incontourable de la France sur le continent, le Tchad a été accusé d'avoir soutenu la Séléka lors du renversement du président François Bozizé en mars 2013. La force africaine en Centrafrique (Misca) compte un important contingent tchadien, accusé par de nombreux Banguissois d'être complice des ex-rebelles.

De son côté l'Union africaine a donné son feu vert au renforcement des effectifs de la Misca à 6.000 hommes contre 3.650 prévus.

Dans le centre de Bangui, les banques ont rouvert et les stations d'essence ont servi du carburant pour la deuxième journée consécutive.

"C'est ma première journée depuis le 5 décembre", affirme Théodore Jusalin, qui a fait deux heures et demie de queue pour le plein de son taxi. "Les gens commencent à sortir, ils partent au travail".

Mais la situation reste extrêmement tendue. Dans la matinée, des échanges de coups de feu ont retenti dans le quartier Miskine (ouest), selon une habitante. "C'était horrible. Ca tirait de partout. Ca a duré longtemps", a-t-elle dit, ignorant l'identité des groupes impliqués.

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