Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Nigeria: HRW dénonce les violences et l'absence de justice dans le centre du pays

Nigeria: HRW dénonce les violences et l'absence de justice dans le centre du pays

Les violences inter-ethniques dans le centre du Nigeria font depuis des années des milliers de morts, sans que les autorités réagissent, a affirmé jeudi l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW).

Ces violences font rarement l'objet de recours en justice, incitant les communautés touchées à se venger, affirme HRW dans un nouveau rapport.

Le document intitulé "+S'en remettre à Dieu de tout+ : la responsabilité de la violence inter-communautaire dans les Etats de Plateau et Kaduna, au Nigeria" appelle les autorités policières, judiciaires et gouvernementales à prendre des mesures urgentes afin d'enrayer le cycle des violences qui "n'est pas inévitable".

"Des témoins se sont présentés pour raconter ce qu'ils avaient vécu, ils ont établi des listes de morts et identifié les agresseurs, mais dans la plupart des cas, rien n'a été fait", a déclaré le directeur de la division Afrique à HRW, Daniel Bekele.

"Les autorités ont peut-être oublié ces meurtres, mais pas les communautés. En l'absence de justice, les gens ont eu recours à la violence pour venger leurs pertes", a expliqué M. Bekele.

Le rapport est fondé sur des entretiens avec des témoins, des victimes et les autorités des Etats de Plateau et Kaduna, situés dans le Middle Belt, région instable entre le Nord du pays, à majorité musulmane, et le Sud à majorité chrétienne.

HRW estime que les règlements de comptes ont fait 10.000 morts depuis 1992, dont plusieurs milliers depuis 2010, pour des raisons d'appartenance ethnique ou d'identité religieuse.

L'ex-ambassadeur américain au Nigeria, John Campbell, a comparé la situation nigériane au "nettoyage ethnique" survenu suite à l'éclatement de la Yougoslavie.

"Des villages ou quartiers (de Jos, capitale de l'Etat de Plateau), autrefois mixtes, n'abritent plus qu'un seul groupe ethnique," a écrit M. Campbell, désormais affilié au groupe d'études Council on Foreign Relations, dans le magazine The Atlantic.

Selon HRW, les autorités n'ont pas réussi à traduire en justice les responsables des violences, dont les identités étaient pourtant largement connues. L'ONG estime également que les autorités ne se sont pas attaquées aux causes sous-jacentes des tensions.

Les conflits en question opposent généralement les musulmans Haoussas-Fulani à des groupes ethniques plus petits, notamment chrétiens.

Les chrétiens, majoritaires dans la région du Middle Belt, se sentent menacés par les Haoussas-Fulani, la communauté dominante dans le nord, accusée par certains d'essayer d'imposer l'Islam dans la région.

Les Haoussas-Fulani estiment pour leur part que les gouvernements locaux favorisent les groupes chrétiens, considérés comme étant les habitants "indigènes" de la région. Chaque groupe accuse l'autre de recourir à la violence.

HRW déclare que même quand la police interpelle des suspects, les charges sont généralement abandonnées discrètement, et que les poursuites éventuelles dépendent de leur financement par les plaignants eux-mêmes.

Des dirigeants communautaires et religieux font régulièrement pression sur les autorités afin qu'elles classent sans suite les affaires impliquant les membres de leurs communautés, et l'on craint que l'arrestation de suspects ne provoque davantage de troubles sectaires, précise le rapport.

Un magistrat de l'Etat de Kaduna a déploré une "défaillance" complète du "système" de la justice pénale qui empêche que les responsables soient traduits en justice, les deux parties "préférant s'en remettre à Dieu de tout".

"Ces cycles de violence ne sont pas inévitables", estime HRW et "les autorités nigérianes peuvent et doivent prendre des mesures urgentes pour assurer que les auteurs des violences inter-ethniques, allant jusqu'au massacre, soient poursuivis, et que les victimes bénéficient de compensations pour leurs immenses pertes."

phz/bs/gd/afp/via

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.