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Après les massacres, Bangui est menacée d'une crise humanitaire

Après les massacres, Bangui est menacée d'une crise humanitaire

Bangui était menacée jeudi d'une crise humanitaire après les massacres et les violences de la semaine passée, qui ont déplacé des dizaines de milliers d'habitants, réfugiés près de la base française à l'aéroport ou terrés dans des quartiers.

Des points d'extrême tension subsistaient toujours dans la capitale centrafricaine, notamment dans le quartier majoritairement musulman du PK-5, au centre-ville, où un homme circulant à moto a été lynché par une foule en colère après que six corps de victimes de violences, dont celui d'un enfant, eurent été amenés à la mosquée, selon des témoins.

"On va laver le sang avec le sang", a lancé un homme de la foule à un journaliste de l'AFP.

Dans les zones relativement épargnées par les violences, la vie revenait peu à peu à un semblant de normalité. La population recommençait à se déplacer sans crainte apparente, à la recherche des commerces ouverts dans la ville toujours survolée par des avions de combat et parcourue par des patrouilles de blindés français.

Selon des agences de l'ONU, il y a plus de 100.000 déplacés dans Bangui, qui compte environ 800.000 habitants.

Massés aux abords de l'aéroport pour se placer sous la protection de l'armée française, ils étaient au moins 45.000 jeudi matin, selon des sources humanitaires sur place. Quelques tentes y ont été dressées, certains ont fabriqué des abris avec des sacs en plastique, mais la plupart demeuraient à la belle étoile.

"On n'a pas à manger, on n'a pas d'abri, pas d'école, pas d'avenir", témoignait Jefferson, venus avec 11 enfants du quartier de Boy-Rabe.

Maximine Touabé, avec ses jeunes jumeaux, racontait: "c'est difficile. On vit sous des bâches (...) On ne sait pas jusqu'à quand on va rester là".

"On cherche un refuge, mais il n'y a pas d'eau, pas de nourriture", ajoutait un troisième, venu du quartier voisin de Boeing, où la population était terrorisée par les exactions des ex-rebelles de la Séléka, que l'armée française a commencé à désarmer lundi.

Dans le quartier majoritairement musulman du PK-5, au centre-ville, d'autres déplacés ont cherché refuge chez des parents, fuyant eux les pillages et les tueries de musulmans perpétrées la semaine dernière.

Aux abords de l'aéroport, où les organisations humanitaires considèrent la situation comme la plus alarmante, avec de possibles risques d'épidémies, Médecins sans Frontières (MSF) a monté une clinique mobile, qui assure 200 à 300 consultations par jour.

Mais il y a seulement deux points d'eau, installés par la Croix-Rouge, pour tous les déplacés. Et depuis une semaine, les agences d'aide des Nations unies n'ont procédé à aucune distribution de nourriture, déplore sous couvert d'anonymat un responsable humanitaire.

Signe d'un relatif retour à la normale, Air France a annoncé qu'elle reprenait jeudi son vol hebdomadaire vers Bangui, annulé mardi. L'aéroport est protégé en permanence depuis 2002 par un contingent français.

Les violences de la semaine dernière ont fait quelque 400 morts, comptabilisés par la Croix-rouge - et très probablement beaucoup plus -, rien qu'à Bangui.

La semaine dernière, l'ONU a donné son feu vert à la France pour lancer une nouvelle opération militaire, en appui à la force africaine (Misca) déjà présente en Centrafrique, pour rétablir la sécurité dans le pays livré au chaos depuis le renversement en mars du président François Bozizé par la coalition rebelle Séléka dirigée par Michel Djotodia.

Les premiers éléments du contingent burundais qui va renforcer la Misca ont quitté Bujumbura jeudi pour Bangui, à bord d'un avion de l'armée américaine, a constaté un journaliste de l'AFP.

Selon Paris, les soldats français ont pour mission de "rétablir la sécurité, protéger les populations et garantir l'accès de l'aide humanitaire" et stopper une spirale infernale de violences inter-religieuses depuis la prise du pouvoir par la Séléka, une coalition hétéroclite de groupes rebelles à dominante musulmane.

Le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a reconnu mercredi que l'intervention en Centrafrique "est beaucoup plus difficile" que celle entamée il y a près d'un an au Mali, "parce que l'identification de l'adversaire n'est pas si simple".

Dans les faits, le désarmement vise en priorité les combattants de l'ex-rébellion Séléka, jusqu'à présent tout-puissants dans la capitale où ils se sont rendus coupables de nombreuses exactions.

Frustrés d'avoir été désarmés et cantonnés dans leurs bases, beaucoup d'hommes de la Séléka sont aussi furieux d'avoir été privés par les Français de tout moyen de se défendre --avec leurs familles et leurs proches-- face à la vindicte populaire.

Malgré l'accalmie enregistrée dans la capitale, la situation peut à tout moment basculer de nouveau dans une extrême violence. La Centrafrique se trouve face à un "vrai risque de guerre civile" qui n'a peut-être pas encore été écarté, a jugé mercredi le ministre français délégué au Développement, Pascal Canfin.

mc-pgf/via

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